Vacances dans les Pyrénées : le Vignemale en famille, récit d'une ascension

Sortir des sentiers battus, échapper à son petit confort : le temps des vacances est celui de la rupture avec son traintrain quotidien. S'élancer à l'assaut d'un 3000 avec ses enfants, c'est sublimer l'instant présent. Récit d’une conquête en altitude.

Afin de cultiver dépaysement, courage, dépassement de soi et aventure, rien de tel que l’immersion complète dans les paysages grandioses et sauvages des Pyrénées. Parmi les sommets mythiques de la chaîne, nous avons jeté notre dévolu sur le pic du Vignemale, s’élevant à 3298 mètres au- dessus du niveau de la mer et situé dans le Parc National des Pyrénées (Hautes-Pyrénées). Un imposant massif couronné par le pic où le pyrénéiste Henry Russell fut l'un des premiers à passer des nuits en montagne.

Véritable joyau de la chaîne, il est le 12ème plus haut sommet des Pyrénées et le plus élevé du versant français (3298 mètres d'altitude). Il domine tel une géode composée de ses trois doigts la vallée de Gaube, l’une des plus belles des Pyrénées centrales.

Aller toujours plus h​aut !

Le goût de l'aventure, ça se cultive. Pour cela, plusieurs ingrédients étaient nécessaires :
  • Une immersion complète de plusieurs jours en montagne, (3 jours)
  • L’expérience de la vie en refuge de montagne, et surtout des nuits
  • La mise en pratique de la marche sur glacier avec crampons et cordes
  • La grimpette de la partie sommitale, escalade facile sur un terrain rocheux instable
  • La résistance à l’altitude et à l’environnement inhospitalier de la haute montagne
  • La vie en collectivité, la solidarité entre le randonneur et ses partenaires de randonnée
  • La gestion en autonomie de ses propres ressources, physiques, mentales et logistique : eau, nourriture et équipements
C'est parti pour le récit photographique de l'ascension :

Un jeu pour les enfants et un challenge pour les parents

Lorsque que l’on a entre 8 et 12 ans, tout parait plus grand, plus inaccessible mais également plus pur, plus vrai. Et pour que le voyage soit une réussite et reste un plaisir, il fallait y apporter une touche de jeu et de défi. Les enfants n’aiment pas les efforts d’endurance mais lorsqu’ils sont entre eux, marcher, porter son sac-à-dos, gagner quelques mètres devient presque accessoire. A plusieurs, l’ascension prend vite une ambiance joyeuse rythmée par les rencontres. C’est à celui qui s’approchera le plus de la marmotte, qui arrivera en premier au col, qui posera le premier pied sur le névé glissant.

Une expérience en partage vécue à tous les instants de la randonnée  :

  • en bousculant nos habitudes de citadins conditionnées par les messages marketing et bétonnés. La montagne offre une liberté de déplacement seulement limitée par le relief.
  • en testant des plaisirs simples. Le sandwich est bien meilleur lorsqu'il est dévoré après plusieurs heures d'effort assis à même le sol entre gentianes et blocs de granit. Et puis, qu'il est plaisant de prendre de la hauteur et de «dominer le monde» !
  • en créant le frisson et en dépassant ses limites. On est souvent pris de vertige face à l’ampleur du paysage bien avant celle de la pente. La nature splendide et hostile à la fois rend chaque instant plus intense, plus pur.
Autant de défis que Camille 12 ans, Thomas 10 ans, Margaux 9 ans et Paul 8 ans ont attaqué de face, sans fléchir poussés par un besoin de conquête dont ils seront à jamais marqués.

Quant aux parents, ils étaient là pour « assurer » au sens propre comme au sens figuré. Ils préparent, rassurent et encouragent leur progéniture. Tirant du plaisir à accompagner cette épopée sauvage et se gargarisant des exploits de leurs petits.

La montée au refuge de Baysselance : une belle "bavante" et de belles rencontres

Qu’elle était belle et longue cette montée jusqu’au refuge de Baysselance. Planté à  2651 mètres d’altitude,  le refuge le plus haut des Pyrénées ne se laisse pas gagner facilement. Les 1200 mètres de dénivelés gravis dans la journée ont rapidement mis à l’épreuve la motivation de  notre jeune groupe. Durant les 6 heures de marche, le chemin serpente à travers la forêt puis des alpages majestueux. Il suit et enjambe le gave gonflé de la fonte de neiges et encore marqué par le déluge du 18 juin dernier. Les stigmates de l’hiver rude et du printemps pluvieux sont encore très présents donnant plus de sens encore au sérieux de la montagne. 

Au fil du trajet, les premières rencontres avec les autres randonneurs, ceux qui poursuivent un objectif similaire mais aussi avec la faune et la flore sauvage :
  • la farandole de couleurs de rhododendrons en gentianes, de la glace à la roche
  • la rudesse de l’environnement, l’abrasivité du granit, le coupant du schiste, la dureté de la pente
  • la coquetterie de la faune, des marmottes qui se jouent de nous de terriers en galeries
  • l’élégance de la course si aérienne de l’isard
  •  la puissance et la force du massif implanté fièrement face au refuge des Oulettes de Gaube
Le refuge est en vue. La faim nous tenaille, les jambes sont douloureuses mais l’objectif est atteint. Nous rêvons duvet et lit pour un juste repos d’après l’effort.

L’ascension du sommet du Pic du Vignemale : si près mais encore si loin

Après une nuit courte et agitée, le sommet nous tend les bras. Il parait à portée de main. Levé 7h30, départ 8h30, l’équipe est fin prête pour attaquer la partie la plus technique : l’ascension du glacier et de la partie sommitale.
3h à 4h de marche nous attendent empreint d’incertitude et d’inquiétude. Comment les enfants vont-ils aborder la marche avec des crampons ? Ils devront apprendre le maniement de la corde, les principes de la cordée et faire avec les rafales de vent violentes et imprévisibles qui vont nous accompagner jusqu’au bout.

Tout notre petit monde est concentré sur l’effort de la montée. S’équiper, repartir, attendre que les autres soient à distance devient naturel. Les enfants comme à leur habitude s’adaptent bien mieux que les parents ne le présumaient.

Nous profitons de ces bonnes sensations pour admirer le paysage. Un panoramique à vous couper le souffle s’étire devant nos yeux :  Gavarnie  et son cirque (brèche de Roland, Le Taillon.. ), le Mont perdu côté nord, le massif de Néouveille et de l’Ardiden nous appellent sur l’autre versant.  Pas le temps de lézarder, la partie rocheuse et finale s’impatiente. Elle nous paraît hostile et peu engageante.

Nous sommes à plus de 3000 mètres d'altitude, le souffle se fait court. Un regain de courage nous anime pour lutter contre les rafales dans les derniers mètres exposés de l’accès au sommet.

Nous montons lentement après avoir repéré les passages les plus abordables avant de nous élancer avec d’infinies précautions.
Enfin le sommet. La joie l’emporte sur l’inquiétude pendant le tour d’horizon à 360° que nous effectuons. Tout notre petit monde est unanime, c’est époustouflant de majesté.

Pourtant, pas question de s’attarder, le vent violent nous glace le sang et le ciel prend une couleur ardoise signe d’un orage proche.
Le chemin du retour réclame toute notre attention. Le danger est présent. Chaque pas doit être mesuré pour sa propre sécurité et celle des autres grimpeurs.

« Piedra !!! », les sens en éveils, nous voyons descendre en une course folle incontrôlée un bloc qui se dirige vers nous. Le grimpeur espagnol au-dessus de nous a crié pour nous alerter. Plus de peur que de mal… Juste le rappel que notre vigilance doit être à son maximum.

Fatigués mais heureux, petits et grands regagnent le refuge pour trouver un peu de réconfort et reprendre quelques forces avant la redescente du  lendemain sur le plancher des vaches.

Le retour par le col d’Arraillé et la vallée du Lutour : un parcours pas si tranquille

Notre objectif atteint, nous décidons de retourner le cœur léger à des altitudes plus raisonnables par le col d’Arraillé pour rejoindre la vallée du Lutour (parallèle à celle de Gaube par laquelle nous sommes montés) et le refuge d’Estom. Un parcours sauvage, peu emprunté par les randonneurs. Nous serons les premiers de la matinée à redescendre par le col.

Gagner le col de l’Arraillé est en soi un joli effort qui nous permet d’admirer à nouveau le pic du Vignemale sous sa plus belle face. Coincé entre deux pentes rocheuses, nous découvrons le sentier du retour à travers des névés encore nombreux, glacés et pentus et des éboulis qui s’effondrent sous les pas.
Nous serons obligés par deux fois de creuser des marches dans la neige pour permettre à notre caravane de passer les parties glissantes. Le chemin serpente sur le flanc gauche du col surplombant en de nombreux lacés la vallée en bas. Les isards, mieux équipés, nous narguent avalant la pente en quelques bonds, alors que notre progression restera attentive et lente jusqu’à ce que nous nous soyons en vue du refuge d’Estom.

Le final

A cette altitude, vaches et chevaux se côtoient. Les pentes herbeuses et la forêt prennent le pas sur la pierre et la neige. Nous poursuivons le sentier qui évolue sur un relief plus détendu et nettement plus accueillant pour nos jambes éprouvées par plusieurs heures de descente sur le sentier caillouteux.

Les promeneurs se font plus nombreux, plus souriants. Ils s’étonnent d’entendre les enfants parler de leur « exploit » de la veille. En retour, ils reçoivent de nombreuses félicitations qui entraînent des bouffées de fierté et rendent subitement les efforts passés bien plus amusants.

Cap vers Cauterets et le parking de la Fruitière, où la voiture nous attend. Orteils à l’air libre et sourires à l’affiche, nous nous désaltérons de l’eau revigorante de la source avec l’idée d’un nouveau départ vers un sommet, un col imprenable ou un glacier lointain auquel nous fantasmerons jusqu’aux prochaines vacances.

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