Le fondateur d'Emmaüs s'est de nombreuses fois rendu dans le Nord-Pas-de-Calais, désireux d'impliquer partout les populations dans la lutte contre la pauvreté.
"Laissez toujours un carreau de cassé, pour que la plainte du monde, vous continuiez à l’entendre". Cette phrase, c’est l’Abbé Pierre, dans un documentaire de 1982. Il fête, à Nieppe, les 10 de l’ouverture d’Emmaüs International. Aujourd’hui, c’est un anniversaire plus triste : les 10 ans de sa mort. Lui disait "les grandes vacances" et attendait paisiblement que Dieu les lui accorde.A Nieppe : l'anti-désespoir
En attendant, il aura tout de même réussi à créer l’un des plus grands réseaux de solidarité existant. Tout commence en 1942. Henri Grouès, qui est entré en religion quatre ans plus tôt sous le nom de Frère Philippe, entre dans la résistance pour venir en aide aux juifs et créer des maquis. Pour échapper à la Gestapo, il prend le surnom d’Abbé Pierre.
A la Libération, il entre en politique pour défendre ses idées et devient député de Meurthe-et-Moselle. En 1949, avec ses indemnités parlementaires, il achète une maison à Neuilly-Plaisance, qu’il transforme en auberge de jeunesse. Il la nomme Emmaüs, en référence à un épisode biblique.
En novembre de la même année, il rencontre Georges Legay, un désespéré au bord du suicide. "Je ne peux pas t'aider, je n'ai rien à te donner. Mais toi, tu peux m'aider à aider les autres". lui répond l’Abbé Pierre. Georges accepte et devient le premier compagnon Emmaüs, fondant ainsi le mouvement tel qu’on le connaît aujourd’hui.
En 1954, il fonde la communauté Emmaüs de Wambrechies, qu’il revient visiter 30 ans plus tard, comme on peut le voir dans cette vidéo. "A 72 ans, l’Abbé Pierre repart en croisade contre l’injustice et la pauvreté", estime la journaliste qui le suit pour cette commémoration. Des maraudes sont organisées pour servir une soupe du soir aux sans-abris.
A Wambrechies, les 30 ans d'un combat
« La météo annonce un mois de gelées terribles. Tant que dure l’hiver, que ces centres subsistent, devant leurs frères mourant de misère, une seule opinion doit exister entre hommes : la volonté de rendre impossible que cela dure. [...] Merci ! Chacun de nous peut venir en aide aux « sans abri », dit-il après la mort d’une femme expulsée.
Il déclenche ce que la presse appelle "l’insurrection de la bonté". L’appel rapportera 500 millions de francs, et il faudra plusieurs semaines pour trier les dons en nature. Il fait construire avec cet argent des cités d’hébergement d’urgence, que l’on appellera bientôt des HLM.
En décembre de cette même année 1954, il visite Lille, le 31 décembre. A Lille Fives, et Lille Sud, dans ce que l'on appelait alors le Petit Maroc, il vient apporter son soutien aux familles nombreuses en difficulté. C'est la plus vieille archive existante d'une visite de l'Abbé Pierre dans le Nord.
Au Peit Maroc, à Lille : soutenir les familles nombreuses
Tout au long de sa vie, il forme la relève en faisant prendre des initiatives aux jeunes. En 1982, il crée un camp pour devenir chiffonnier Emmaüs, à Bruay-La-Buissière.
C’est cette même communauté Emmaüs de Bruay-la-Buissière qui créera deux ans plus tard Le Relais, association d'insertion par l'activité économique, spécialisée dans le recyclage textile, qui était encore numéro un de la collecte en France en 2013.
A Bruay-la-Buissière : la mobilisation des jeunes
Emmaüs, c’est aujourd’hui 34 communautés dans le Nord, le Pas-de-Calais et la Picardie. Grâce à la mobilisation de ces groupes très actifs, 13 000 euros ont été réunis en 2014 pour soutenir les actions Emmaüs sur toute la planète.
"N’ayez pas d’inquiétude", disait l’Abbé Pierre, "c’est organisé pour durer". Dix ans après son départ en vacances, les faits lui donnent raison.