"On est éjectable" : pour les livreurs Deliveroo, leur nouveau contrat révèle leur précarité

Implantée en France depuis deux ans, la société britannique de livraison de repas à domicile a décidé cet été de rémunérer ses livreurs à la course et non plus à l'heure. Ceux qui n'ont pas signé le nouveau contrat peuvent voir leur collaboration non renouvelée par envoi de mail.

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"On revient de vacances et on n'a plus de travail." Voilà comment ce livreur Deliveroo que nous avons rencontré et qui tient à garder l'anonymat résume sa situation.  Son tort : avoir été en retrait deux mois pour favoriser ses études et ne pas avoir eu vent du nouveau contrat de prestation que la société britannique de livraison de repas à domicile adresse désormais aux 1500 à 2000 "bikers" qu'elle fait travailler en Île-de-France

De 11,50 € l'heure à 5,75 € la course


A l'origine de ce changement de contrat, la volonté de l'entreprise de rémunérer désormais ces auto-entrepreneurs à la course et non plus à l'heure. Quand elle s'est implantée en France il y a deux ans, Deliveroo payait selon une tarification horaire qui pouvait atteindre 11,50 € de l'heure avec diverses majorations. Pour mettre en place une "convergence de tarification" et s'aligner sur ses concurrents Foodora et Uber Eats, une course sera désormais payée 5,75 €. 

Contactée par France 3 Île-de-France, l'entreprise affirme que ses livreurs, qui sont mis en contact avec les restaurants via une application, peuvent effectuer une moyenne de 3,2 courses par heure, soit une tarification horaire de 18 € à Paris. Des chiffres que contestent les collectifs de bikers qui ont organisé cet été des manifestations à Bordeaux et à Lyon. Selon eux, il faut compter une course ou à peine plus en une heure. Et donc, à présent, 5,75 € pour autant de travail, alors que le SMIC est actuellement à 9,76 € brut


► VIDEO. Témoignage d'un livreur non renouvelé recueilli par Mélissa Genevois et Virginie Delahautemaison


Le non-renouvellement notifié par mail


En plus de constituer une baisse substantielle de leur rémunération, les syndicats de livreurs de Paris accusent ce nouveau statut d'accroître la prise de risque des cyclistes dans la capitale. "Ca veut dire qu'on est payés à aller vite à Paris, en vélo, dans un univers hyper urbain et hyper hostile", précise Jérôme Pimot, cofondateur du Collectif des Livreurs Autonomes de Paris (CLAP).

La nouvelle tarification devait être appliquée en septembre. Mais l'entreprise demande déjà aux livreurs de signer leur nouveau contrat de prestataire par mails et SMS. Ceux qui ne le font pas peuvent se voir notifiés de leur non-renouvellement par mail. Une situation qui scandalise les collectifs de bikers. "On est éjectable, on est jetable, on est désactivable, s'indigne Jérôme Pimot. Un matin, on essaye d'aller bosser, on branche son téléphone et on est désactivé."


Au coeur de la polémique se trouve la question du statut de ces livreurs à vélo. Indépendants, ils n'ont pas les droits des salariés relatifs au licenciement. Une situation qui leur offre une flexibilité mais qui, bien qu'ils puissent souscrire depuis mars dernier à une assurance civile gratuite, ne leur permet de profiter ni de congés payés, ni d’allocations chômage. 

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