Trois policiers jugés lundi à Bobigny pour avoir blessé des manifestants au flash-ball

Un manifestant avait perdu un oeil en 2009 à Montreuil (Seine-saint-Denis), relançant le débat sur l'usage des flash-ball : trois policiers sont jugés à partir de lundi à Bobigny pour avoir blessé avec cette arme six personnes opposées à la fermeture d'un squat.

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8 juillet 2009. Vers 22H, après un "repas de soutien" à des squatteurs expulsés le matin même d'une clinique désaffectée, plusieurs personnes se dirigent vers le bâtiment évacué. Les forces de l'ordre interviennent pour les repousser. Trois policiers tirent chacun à deux reprises avec leur flash-ball, une arme qui lance des balles de caoutchouc.

Six manifestants blessés, quatre sont parties civiles au procès

Six manifestants sont blessés, dont quatre se sont constitués parties civiles au procès, qui se tient devant le tribunal correctionnel jusqu'à vendredi. Un des policiers comparaîtra pour "violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente" pour un tir ayant éborgné Joachim Gatti, 34 ans à l'époque. Le policier sera aussi jugé pour "violences volontaires par une personne dépositaire de l'autorité publique". Il risque dix ans de prison et 150.000 euros  d'amende.

Les deux autres fonctionnaires, également accusés de "violences volontaires", encourent trois ans de prison et 45.000 euros d'amende. Pour justifier leurs tirs, tous trois avaient invoqué la légitime défense, expliquant notamment avoir subi une "pluie de projectiles". Une version mise à mal par les témoignages de riverains qui ont décrit aux enquêteurs un rassemblement "pacifique".

Un rapport estime que les policiers n'avaient pas respecté les règles d'utilisation de l'arme

Dans un rapport, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS, ex-Défenseur des droits) avait estimé que les policiers n'avaient pas respecté les règles d'utilisation de l'arme. - 42 blessés et un décès  - "Les policiers ont menti de façon concertée et éhontée", dénonce Irène Terrel, l'avocate des victimes. Elle dénonce des tirs "aucunement justifiés" et une "thèse de la légitime défense totalement inacceptable". "Les faits sont avec nous", abonde le "Collectif du 8 juillet", qui rassemble des blessés et leur proches. Le collectif, qui veut faire de ce procès celui "de la violence policière ordinaire", fera défiler à la barre jeudi treize témoins, eux aussi victimes de "bavures" des forces de l'ordre.

Me Laurent-Franck Liénard, avocat du fonctionnaire accusé d'être l'auteur du tir à l'encontre de Joachim Gatti, critique des témoignages de riverains "assez peu crédibles" et un dossier "gangréné par une idéologie très marquée". Il plaidera la relaxe pour son client, placé sous contrôle judiciaire depuis les faits. Le flash-ball, introduit chez les forces de l'ordre il y a plus de dix ans, est très critiqué pour son imprécision et la gravité des blessures qu'il peut provoquer.

L'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (ACAT) recense 42 blessés et un décès à la suite de l'utilisation de lanceurs de balle de défense de type LBD 40 ou flash-ball. Vingt-trois ont été énucléés ou ont perdu l'usage d'un oeil selon l'ACAT. Seules quelques procédures ont été portées devant les tribunaux. L'année dernière, un policier a été condamné à un an de prison avec sursis à Bobigny pour avoir blessé un lycéen au visage en 2010. Il a fait appel. Aux assises de Mayotte, un gendarme a aussi écopé de deux ans de prison avec sursis pour avoir blessé un enfant de 9 ans.

L'Etat avait par ailleurs été condamné par le tribunal administratif de Paris en 2013 à indemniser un jeune homme touché au visage par un tir. En revanche, le tribunal correctionnel de Nantes avait relaxé en 2012 un policier accusé d'avoir éborgné un lycéen en 2007, jugeant qu'il avait "exécuté un ordre".

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