C'est le plus connu des romans de Jules Verne : Le tour du monde en 80 jours dont le manuscrit était depuis longtemps considéré comme disparu. Il vient de ressurgir, grâce à la ténacité d'une éditrice, et sera publié le 20 mars, aux éditions des Saints Pères.
Pour de nombreux historiens de la littérature, la cause était entendue. Le manuscrit original du chef d'oeuvre de Jules Verne, "Le tour du monde en 80 jours" s'était "évanoui". La persévérance d'une éditrice a prouvé le contraire.
"Après avoir édité Vingt mille lieues sous les mers en 2014, nous souhaitions partir à la recherche d'un autre grand manuscrit inédit de Jules Verne. Nous avions toutefois renoncé à l'espoir de mettre un jour la main sur le manuscrit
complet du Tour du monde en 80 jours, plusieurs spécialistes nous ayant assuré que ce dernier avait disparu", raconte l'éditrice Jessica Nelson.
Mais la jeune femme, âgée de 36 ans n'est pas du genre à baisser les bras. A la manière de Jules Verne, l'histoire pourrait s'intituler "Voyage au centre d'une bibliothèque".
Elle explore sans relâche le Fonds Hetzel, l'éditeur de l'écrivain, conservé à la Bibliothèque nationale de France, à la recherche d'une note qui parlerait de ce fameux manuscrit.
Dans un dossier censé contenir des contrats d'édition, elle tombe quasi miraculeusement sur le texte intégral du Tour du monde en 80 jours. Personne ne l'avait jamais cherché à cet endroit.
"Quelle ne fut pas notre surprise, au cours de recherches approfondies dans le Fonds Hetzel, de découvrir un manuscrit énigmatique, couvert de l'écriture de Jules Verne et mentionnant les aventures de Phileas Fogg. Quelle
ne fut pas notre joie, à la lecture plus attentive de ce document inattendu, de comprendre qu'il s'agissait bien de l'unique manuscrit intégral du plus célèbre livre de Jules Verne", raconte l'éditrice.
"Ce document, rédigé en 1872, existait donc réellement."
Ce roman "se lit aujourd'hui et se lira demain avec le même émerveillement qui fut celui de ses premiers lecteurs", affirme dans la préface de cette édition, tirée à seulement 2.000 exemplaires, l'Académicien Jean-Christophe Ruffin.
Le texte manuscrit est très lisible. Jules Verne écrit d'un écriture serrée avec assez peu de ratures. On l'avait oublié mais il écrit à la plume. Quand l'encre s'épuise, la ligne pâlit. On imagine Jules Verne plongeant sa plume dans l'encrier puis reprenant son travail.
"Si nous lisons ce livre en entendant crisser la plume sur le papier rugueux, si nous imaginons le va-et-vient régulier de la main vers l'encrier", remarque Jean-Christophe Ruffin.
Le manuscrit publié dans son intégralité est enrichi de 38 feuillets autographes, les seuls manuscrits disponibles jusqu'à présent, et conservés au Musée Jules Verne de Nantes.
Ces feuillets constituent la toute première version du roman. La lecture y est plus malaisée, Verne biffant et réécrivant des passages entiers. Dans la marge, le romancier pose des additions, comme un écolier, pour s'assurer que le délai qu'il a imposé à son héros sera rigoureusement respecté.
En 1895, Jules Verne expliquait ainsi la genèse de son roman: "Le Tour du monde en 80 jours provient de la lecture d'une annonce touristique dans un journal. Le paragraphe qui attira mon attention mentionnait le fait qu'aujourd'hui, il serait tout à fait possible de faire le tour du monde en quatre-vingts jours, et il m'est immédiatement venu à l'esprit que le voyageur, profitant d'une différence de méridien, pourrait gagner ou perdre un jour pendant ce laps de temps. Vous vous souvenez peut-être que mon héros, Phileas Fogg, grâce à cette circonstance, est arrivé chez lui à temps pour gagner son pari, au lieu d'un jour trop tard comme il l'imaginait."
Le manuscrit de ce roman d'aventures rédigé en 1872 sera publié pour la première fois le 20 mars aux éditions des Saints Pères, un éditeur normand spécialisé dans la reproduction de manuscrits rares.
L'édition, présentée dans un coffret bleu, est illustrée avec des gravures de l'édition originale. Le coffret est disponible sur le site de l'éditeur au prix de 189 euros.
➡ A voir aussi : le reportage tourné pendant la Digital Week, quand un manuscrit de Jules Verne inspire aux étudiants une oeuvre numérique.
Intervenants :
Agnès Marcetteau, directrice du musée Jules Verne
Baptiste Flavien, étudiant à e Art Sup