Le 21 avril, alors qu'elle participe avec son compagnon à un trek au Népal, Marie-Charlotte Boucaud fait une chute de 15 mètres après que sa corde se soit brisée. La Chamalièroise de 31 ans souffre de multiples fractures mais elle est en vie après avoir été miraculeusement rattrapée par un sherpa.
Quand Marie-Charlotte Boucaud et son compagnon, Jacky Achard, se réveillent ce 21 avril à 3h du matin, ils savent que la journée sera éprouvante. A 4h, accompagnés de leur guide et de sept sherpas, les deux trekkeurs chamalièrois vont s'élancer pour la plus longue journée de leur périple au cœur du Népal avec deux franchissements de col à 6 000 mètres d'altitude. "C'était une journée magnifique", se souvient Jacky, "le temps était superbe, le paysage extraordinaire et puis, tout a viré au cauchemar". Il raconte.
Que s'est-il passé ce jour-là ?
L'accident a eu lieu le 21 avril, une quinzaine de jours après le début de notre trek dans la région du Makalu (ndlr: 5ème sommet le plus haut du monde à 8 462 mètres). On avait passé le premier col sans trop de difficultés et, dans la descente du deuxième col, sur un dernier relai en rappel, la corde de Charlotte a cassé. Elle a chuté d'une quinzaine de mètres sur les rochers. Elle s'est retrouvée sur le glacier où elle a commencé à glisser dans la descente. C'est un sherpa qui se trouvait ici par hasard qui l'a rattrapée avant qu'elle ne finisse de dévaler dans une crevasse.
La présence de ce sherpa relève presque du miracle…
Des sherpas ont échappé une partie de notre matériel qui a déboulé sur le glacier. L'un d'entre eux est allé voir s'il était possible de le récupérer mais tout était tombé au fond de la crevasse. C'est en remontant au pied du col, quand Charlotte a chuté, qu'il s'est trouvé par chance dans le couloir de la chute. S'il n'avait pas été là, elle aurait pu finir au fond de la crevasse. Au dire du sherpa, on ne voyait pas le fond.
Comment avez-vous vécu la scène ?J'étais au pied du glacier, j'ai assisté à toute la scène. J'ai cru qu'elle était morte sur le coup. Quand elle a commencé à glisser sur le glacier, elle était complètement désarticulée, comme un pantin.
J'étais au pied du glacier, j'ai assisté à toute la scène. J'ai cru qu'elle était morte sur le coup. Quand elle a commencé à glisser sur le glacier, elle était complètement désarticulée, comme un pantin. Quand je suis arrivé près d'elle, Charlotte était vivante. C'est assez miraculeux. Il était 17h, j'ai tout de suite appelé les secours par téléphone satellite mais il était trop tard pour qu'ils interviennent. On a donc fait un bivouac de fortune sur les lieux de l'accident, à 5 900 mètres. On a passé une nuit en attendant les secours le lendemain.
Comment allait Charlotte à ce moment-là ?
Elle ne se plaignait pas, elle a vraiment été très forte. J'avais peur qu'elle ne passe pas la nuit. Dès qu'elle ne bougeait plus, je la réveillais parce que j'avais peur qu'elle ne s'en sorte pas. La nuit a été interminable, il faisait -15° sous la tente, tout était gelé. Le lendemain matin, les secours devaient intervenir à la première heure mais il y avait trop de vent et la topologie du site faisait qu'ils ne pouvaient pas se poser. Ils ont envoyé un deuxième hélicoptère avec un treuil et ce n'est qu'à 15h, l'après-midi, qu'on a été évacués. Un second hélicoptère, médicalisé, l'a transportée sur Katmandou où elle a été opérée en urgence.
De quoi souffrait votre compagne après cette lourde chute ?
Le bilan médical est miraculeux. Elle n'a aucune lésion cérébrale, aucune lésion au niveau du rachis. Elle a quelques hématomes sur le haut du corps et la onzième côte cassée. En revanche, elle a une triple fracture au niveau de la jambe gauche, avec une fracture ouverte du tibia et elle a eu un arrachement ligamentaire au niveau de la malléole droite.
A-t-elle le souvenir de ce qui s'est passé ?
Elle raconte avoir mis en place son rappel puis, dès qu'elle a commencé à descendre, elle a entendu un bruit sourd. Elle a alors compris que sa corde avait lâché. Elle a rebondi deux fois sur les rochers, son sac à dos a amorti sa chute. Elle a vu le paysage défiler et, sur le coup, c'est ce qu'elle dit, elle pensait qu'elle allait mourir parce qu'elle était encore haute. Quand elle est arrivée sur le glacier, elle a perdu connaissance quelques secondes et elle a repris connaissance dans les bras du sherpa qui l'a rattrapée.
Comment expliquer un tel accident ?Elle a chuté d'une quinzaine de mètres sur les rochers. Elle s'est retrouvée sur le glacier où elle a commencé à glisser dans la descente. C'est un sherpa qui se trouvait ici par hasard qui l'a rattrapée avant qu'elle ne finisse de dévaler dans une crevasse.
C'était un de ces cordes fixes qui sont là en permanence. Ce passage emmène les expéditions sur le Baruntse à 7 200 mètres et il est utilisé par les sherpas pour acheminer le matériel. C'est un endroit qui est peu fréquenté, on ne sait pas depuis combien de temps les cordes étaient là. Souvent au Népal, malheureusement, même sur les grosses expéditions, ce sont des cordes de mauvaise qualité qui sont utilisées. Avant son relai, Charlotte a vérifié l'état mais c'est difficile à l'œil nu de passer en revue la corde sur toute sa longueur. Deux sherpas sont passés avant elle et ont utilisé cette corde. Moi, je n'ai plus le souvenir exact, mais il me semble que je l'ai utilisée également.
Deux semaines après, comment va-t-elle ?
Elle va plutôt bien. Elle relativise beaucoup par rapport aux séquelles de l'accident parce qu'elle est en vie. Elle va être immobilisée durant plusieurs semaines. Les médecins lui ont expliqué qu'elle ne reprendra pas une marche normale avant plusieurs mois. C'est peut-être un petit peu tôt, c'est une mordue de montagne, j'ai du mal à croire qu'elle n'y retournera pas.
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