La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon s'est prononcée vendredi soir en faveur de l'extradition vers la Russie d'un ancien ministre de la région de Moscou soupçonné d'avoir détourné des milliards de roubles, Alexeï Kouznetsov, arrêté à l'été 2013 sur la Côte d'Azur.
L'avis en faveur de l'extradition s'est accompagné de réserves: l'ancien ministre ne pourra pas être soumis à des travaux forcés et devra pouvoir bénéficier de visites des autorités françaises, a-t-on appris de sources concordantes.
Le président de la cour, Luc Fontaine, a suivi les réquisitions du parquet général qui s'était prononcé, le 18 septembre dernier en faveur de cette extradition. L'avocate générale Alexandrine Lenoir avait rejeté les arguments de la défense qui dénonçait une affaire politique, ainsi que des conditions de jugement et de détention en Russie qui ne seraient pas acceptables.
En janvier, la cour d'Aix-en-Provence s'était déjà prononcée pour l'extradition de M. Kouznetsov, 51 ans, mais son arrêt avait été annulé en avril par la Cour de cassation et l'affaire renvoyée dans le Rhône.
Cet ancien ministre des Finances de la région de Moscou avait été interpellé près de Saint-Tropez le 5 juillet 2013, en possession de cinq passeports aux noms différents. Il est accusé par la Russie d'avoir organisé, de 2005 à 2008, le rachat de créances d'entreprises locales et de les avoir fait garantir par la région de Moscou pour obtenir des prêts dont il aurait détourné les montants. La fraude est estimée à 14 milliards de roubles par le parquet russe, soit plus de 400 millions d'euros au taux de change d'alors. L'argent détourné aurait été blanchi dans l'immobilier à l'étranger, notamment via l'achat de deux hôtels à Courchevel dont la Russie a demandé la saisie. Un juge lyonnais est saisi de ce volet.
D'autres personnes sont soupçonnées par Moscou, dont une soeur et l'ex-femme de M. Kouznetsov, Janna Bullock, une Américaine qui a fait fortune comme marchand de biens et a siégé, un temps, au conseil d'administration de la Fondation Guggenheim à New York. L'avocat de l'ex-ministre, Me Grégoire Rincourt, avait réclamé à la cour le visionnage d'un documentaire sur la colonie pénitentiaire n°6 de Briansk, où son client purgerait sa peine s'il était extradé puis jugé et condamné en Russie, mais sa demande avait été rejetée.La chambre de l'instruction a également examiné ce vendredi 17 octobre la demande d'extradition de la Russie concernant l'ancien banquier et ministre kazakh Moukhtar Abliazov, en présence de l'ancien champion d'échecs et opposant politique russe Garry Kasparov, dont l'audition comme témoin a été refusée par la cour. La décision de l'extradition de M. Abliazov vers la Russie a été mise en délibéré au 24 octobre.