La prise en charge des cancers à l'horizon 2020, c'est le thème de la vaste étude UNICANCER réalisée par les 18 centres de lutte contre le cancer en France. Parmi les 40 experts ayant été consultés pour cette étude, Frédérique Penault-Llorca, directrice du Centre Jean Perrin à Clermont-Ferrand.
La cancérologie traverse une révolution profonde, provoquée par l'arrivée de la médecine personnalisée, de nouvelles formes de chimiothérapie orale, ou bien encore du développement de l'ambulatoire.
Avec l'étude "UNICANCER : quelle prise en charge des cancers en 2020 ?", les 18 centres de lutte contre le cancer en France ont décidé d'identifier et de qualifier ces principales évolutions des prises en charge en cancérologie d'ici à 2020. Parmi les 40 experts qui ont été consultés pour réaliser cette vaste étude, le Professeur Frédérique Penault-Llorca, directrice du Centre Jean Perrin à Clermont-Ferrand. Elle était l'invitée de notre "Page santé" du 23 octobre.
Globalement, qu'est-ce qui va changer dans les prochaines années pour les malades atteints d'un cancer ?
"Beaucoup de choses vont changer dans les années qui viennent. Les traitements se raccourcissent, on le voit avec la chirurgie ambulatoire, on va voir la radiothérapie qui va changer. Avec ce qu'on appelle l'hypofractionnement. On traite en 2 semaines au lieu de traiter en 2 mois et puis on caractérise les tumeurs sur le plan moléculaire pour adapter au mieux les traitements avec des nouvelles thérapies qu'on dit ciblées."
On parle beaucoup de chirurgie ambulatoire, le patient sort de l'hôpital le jour même de son admission, c'est bien pour les finances publiques mais est-ce que le patient ne risque pas de se retrouver livré à lui même ? Est-ce qu'il sera aussi bien soigné chez lui qu'à l'hôpital ?
"Cette technique de chirurgie ambulatoire n'est, bien sûr, pas adaptée à tous les types de cancer et à tous les patients. La première étape de l'interrogatoire est très importante. On regarde si le patient n'est pas seul, n'habite pas trop loin et donc s'il peut être tout à fait candidat à la chirurgie ambulatoire."
La prise en charge globale du patient, c'est aussi l'une des priorités de cette étude UNICANCER, qu'est-ce que cela implique concrètement pour le malade ?
"La prise en charge globale c'est : aujourd'hui, on guérit de plus en plus de cancers. Les patients vont vivre plus longtemps. On fait très attention à ce qui est autour du patient, donc, à son bien-être, à sa nutrition. Mais également à l'exercice physique qu'il peut faire et au suivi des médicaments qu'il va prendre. Tout son environnement, en fait, est pris en compte."
Vous préconisez également des traitements plus courts, oraux, la chimiothérapie à domicile, concrètement comment cela va-t-il se traduire ?
"C'est vrai qu'aujourd'hui avec cette caractérisation moléculaire, beaucoup de médicaments sont devenus des médicaments oraux, donc, en fait, on va prendre des comprimés pendant des années, on ne viendra plus à l'hôpital régulièrement pour avoir ses perfusions. Même s'il restera bien sûr des traitements par perfusions. Cela implique une relation très importante. Le patient est moins à l'hôpital, plus chez lui, donc, on a des infirmières également qui vont suivre le patient par téléphone, pour voir comment cela se passe et puis on a un relais avec les infirmières de ville et les médecins généralistes. On a aussi une unité de prise en charge en urgence. Si jamais il y a un problème au domicile, les patients peuvent venir dans la journée."
Concrètement, comment s'inscrit le Centre Jean Perrin de Clermont-Ferrand dans le cadre de l'étude UNICANCER ?
"Nous sommes au maximum dans cette évolution, avec la chirurgie ambulatoire, avec la radiothérapie. On s'équipe de 2 nouvelles machines dans les 2 années qui viennent. Avec le diagnostic très précis et une nouvelle machine Tep. Et puis avec la radiologie interventionnelle qui est une nouvelle forme de prise en charge des métastases qui va permettre de pouvoir traiter des métastases sans opérer le patient. Tout le monde ne pourra pas être concerné, mais cela peut être très intéressant".
L'ESSOR DE LA CHIRURGIE AMBULATOIRE DU SEIN A JEAN PERRIN
La chirurgie ambulatoire est l'une des 6 tendances préconisées par l'étude UNICANCER. Au Centre Jean Perrin, à Clermont-Ferrand, une unité de chirurgie ambulatoire du sein a vu le jour il y a un an.
Une nouvelle technique qui s'adresse aux patientes souffrant de pathologies mammaires. Principalement de cancers mais à un stade précoce. Il faut aussi que la patiente ne soit pas seule à son domicile et qu'elle n'habite pas trop loin.
La patiente arrive à 7 heures le matin et repart chez elle vers 17 heures.
L'infirmière joue un rôle primordial dans ce type de prise en charge. C'est elle qui va appeler la patiente la veille de l'intervention pour s'assurer que toutes les consignes et précautions ont bien été comprises et respectées. Elle qui va la surveiller durant les quelques heures qu'elle va passer à l'hôpital. Elles encore qui va l'appeler le lendemain de l'intervention pour évaluer ses besoins éventuels et son ressenti.
Ces 12 derniers mois, 35% des patientes opérées du sein à Jean Perrin l'ont été en ambulatoire. Soit 98 depuis le début de l'année 2014.
Le Centre Jean Perrin espère réaliser 50 à 60% de chirurgie ambulatoire du sein chaque année.
LE DIAGNOSTIC EN UN JOUR
Depuis un an également, le Centre Jean Perrin à Clermont-Ferrand, propose le diagnostic en un jour pour le cancer du sein. La patiente arrive à l'hôpital, elle voit un radiologue qui lui fait un bilan sénologique. Un prélèvement est réalisé et analysé en quelques heures. S'il s'agit d'un cancer, la patiente va alors voir un cancérologue, puis un chirurgien. Donc, en une seule journée, elle obtient son plan de route pour son traitement.
Auparavant, il fallait compter entre 3 et 4 jours pour obtenir les mêmes résultats.