Pendant le festival, une séance du marché du film est consacrée exclusivement aux films tournés avec des téléphones mobiles. Elle n'attire pas les foules, pourtant elle recèle de véritables trésors d'inventivité et même - on peut le dire - de grands moments de cinéma.
La séance "mobile", ce n'est pas la plus courue du festival. Il n'y en a qu'une, le mercredi dans le creux de l'aprés-midi. Dans la salle George Conchon, seule une petite quinzaine de curieux s'est déplacée. C'est donc sur de belles rangées de sièges vide que s'éteignent les lumières.Le principe est simple : 1 minute par film, 50 films et des tournages exclusivement au téléphone mobile.
A peine trois minutes plus tard, on se dit que les absents ont vraiment eu tort.
Alors oui, techniquement, c'est du mobile. Parfois, la mise au point hésite, la compression de l'image fait baver les couleurs, la lumière est moche, ça tremble, c'est terne. Dans certains cas on pourrait presque compter les pixels sur le grand écran. Le manque de moyens s'écrit en grand dans un des génériques avec la présence d'un collaborateur qualifié de "couteau suisse".
Et puis, il y a cette durée : une minute. C'est court. Du très court métrage.
Et bien croyez-le ou non : malgré ces contraintes, on a vu 50 petites merveilles.
Aucun temps mort. Pas le temps. En moins d'une heure, on voit passer des comédies, un viol, une catastrophe naturelle, des chroniques sociales, de la science-fiction, la vie quotidienne d'une boîte de mouchoirs, du sexe, des terroristes de Noël, un vrai message politique, un plaidoyer contre les violences faites aux femmes et même un chat qui rêve de conquérir le monde. Le talent général de la sélection laisse pantois.
Tous ces cinéastes sont inspirés. Tous arrivent à raconter leur histoire, à faire passer leur message, à provoquer des émotions en 60 petites secondes. On oublie vite que tout cela a été filmé avec le petit bout de plastique et de verre que l'on porte presque tous dans nos poches.
Souvent, le film tourné au mobile parle ... de mobile : un combat de "J'aime" sur les réseaux sociaux façon Sergio Leone, un cours de selfie, une relation amoureuse entre un homme et son téléphone, un énervé qui chasse des mobiles ailés comme d'autres le papillon, une critique du narcissime numérique moderne ... Ce cinéma là porte un regard sur ses propres outils.
Surtout, défait des contraintes du cinéma "traditionnel", il invente avec une liberté rarement vue.
Si l'aventure vous tente sur votre (petit) écran, le site du Mobile Film Festival se trouve par ici.