Gilles Guillotin et Christophe Gavat, les 2 anciens policiers de la PJ de Grenoble seront fixés sur leur sort ce mardi 12 juin, dans "l'affaire Neyret". Relaxés en 1ère instance, ils comparaissaient en appel pour "trafic de stupéfiants, détournements de scellés, association de malfaiteurs"
La justice reprochait aux deux fonctionnaires, en poste à l'antenne de la PJ de Grenoble à l'époque des faits, d'avoir détourné des scellés de drogue pour leur "patron", Michel Neyret, l'ex-numéro 2 de la PJ de Lyon, jugé pour corruption.
Ils avaient été relaxés en première instance. En appel, l'avocat général a réclamé huit mois avec sursis à l'encontre du commandant Gilles Guillotin, mais n'a pas requis de peine contre le commissaire Christophe Gavart.
Quatre ans de prison, dont 18 mois avec sursis ,(une peine identique à celle prononcée en première instance en 2016) ont été requis à l'encontre de Michel Neyret, par l'avocat général qui a également réclamé 15.000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction des droits civils, civiques et de famille.
Si la cour d'appel suit le ministère public, le prévenu, qui a déjà effectué huit mois de détention provisoire, pourra bénéficier, avec l'accord d'un juge, d'un aménagement de peine qui lui évitera de retourner en prison.
La justice reproche à Michel Neyret d'avoir fourni des informations confidentielles à des membres du milieu lyonnais présentés comme des "indics", en échange d'avantages, de cadeaux et d'argent liquide, et d'avoir prélevé sa dîme sur une saisie de stupéfiants pour rétribuer des informateurs.
Poursuivi pour huit délits, dont corruption, détournements de scellés de stupéfiants et association de malfaiteurs, il encourt dix ans de prison.
Dans ses réquisitions, l'avocat général a expliqué en avril que Michel Neyret "a non seulement brisé sa vie et sa carrière mais aussi abîmé l'image de la police" et "créé une sorte d'anti-modèle pour les jeunes générations de fonctionnaires".
Après 32 ans de carrière dont 20 à la tête de la prestigieuse brigade antigang de Lyon, Neyret, adulé par ses équipes et ses supérieurs et décoré de la Légion d'honneur pour ses résultats, était une légende au moment de sa chute.
A l'audience, celui qui est aujourd'hui à la retraite a reconnu "un aveuglement" dans la gestion de ses "indics", tout en défendant sa méthode pour réaliser de beaux coups dans le milieu du grand banditisme.
"Industrialisation" de la corruption
"Oui, a reconnu l'avocat général, il est normal d'avoir recours à des "indics" mais la loi a su depuis longtemps "encadrer cette pratique pour mettre fin aux dérives".
Rappelant les nombreux cadeaux reçus par Neyret, comme une montre de luxe, des voyages au Maroc, des séjours dans des hôtels et une villa, l'utilisation de voitures de sport mais aussi le versement d'argent liquide - 1.000 euros par semaine, selon un "indic" , le magistrat a estimé que la corruption du policier n'en était qu'à ses débuts.
Évoquant la création en Suisse avec son épouse et un "indic", Stéphane Alzraa, d'une société panaméenne adossée à des comptes ouverts à Dubaï, il a dénoncé une "industrialisation et une bancarisation de sa corruption".
"Quand on regarde le dossier, on se demande qui était l'informateur de qui", avait observé le président de la cour d'appel, se référant aux informations confidentielles fournies par le policier à certains "indics" qui, en échange, ne lui donnaient pas de renseignements mais des cadeaux.
"Je n'aurais pas dû les accepter", a reconnu Neyret. "Je leur donnais des informations pour qu'ils aient confiance en moi. Certains indics ont mis des années à me procurer de belles affaires", a-t-il justifié.
Le représentant du ministère public a enfin requis trois ans de prison et 250.000 euros d'amende à l'encontre de Stéphane Alzraa, actuellement détenu en Israël pour d'autres dossiers.