Le 11 novembre 1943, 130 résistants ont défilé dans les rues d'Oyonnax, au nez et à la barbe de l'occupant allemand, pour commémorer la fin de la Première Guerre Mondiale. Cette action emblématique de l'histoire de la résistance dans l'Ain a été immortalisée. Le film a été restauré pour ses 80 ans.
Le 11 novembre est traditionnellement la journée de commémoration de la fin de la guerre 14-18. Mais à Oyonnax, c'est un épisode de la deuxième guerre mondiale qui va être célébré durant tout ce week-end.
Le 11 novembre 1943, 130 hommes descendaient du maquis pour défiler dans les rues de la ville, alors que les Allemands étaient à deux pas. Un acte courageux dont le but était de rendre crédible la Résistance. Un film de ce défilé a été tourné, il vient d'être restauré par le Département de l'Ain à l'occasion des 80 ans de l'événement.
Des détails retrouvés
La nouvelle version offre de nouveaux détails perdus par les affres du temps. "On ne voyait pas les visages, il y avait des rayures et des poussières. L'usure du temps avait fait son œuvre", nous explique Jasmine Covelli, responsable scientifique au Département de l'Ain
"Tout le film a été restauré image par image et, par exemple, nous avons décidé de conserver la perforation de la bobine. Auparavant, ils n'apparaissaient pas. Grâce à cela, nous découvrons de nouveaux détails et personnages qui n'apparaissaient pas initialement" se réjouit la scientifique.
Dorénavant, on peut distinguer des plaques d’immatriculation, de la fumée qui se dégage ou encore des hommes et des femmes, d'abord spectateurs de ce défilé, qui rejoignent finalement les rangs quand ils comprennent qu'il est l'œuvre de la Résistance... L'histoire prend du relief.
"Ils ne savaient pas qui étaient ces personnes qui défilaient", explique Pierre Mercier de l'association des Amis du musée de la résistance d'Oyonnax. "Sont-ils des miliciens ? Il y a un drapeau français, de la musique. C'est progressivement, en voyant les mitraillettes, qu'ils comprennent que c'est la Résistance... C'est là qu'ils se sont mis à applaudir", poursuit-il.
Défiler pour exister
Ce défilé, dans une France occupée, était un acte de bravoure orchestré par Henri Petit, dit “Romand”. Il avait le sens de l’événement et il voulait prouver que le maquis existait. Il attendait de l’aide en retour.
"Le film va être envoyé à Londres et à Alger afin que des armes et des moyens financiers soient envoyés pour poursuivre la lutte" explique Delphine Barré, responsable du musée de Nantua. Londres accepta dans la foulée d’envoyer tout ce qu’il fallait, Winston Churchill s’avouant étonné par tant de courage.
Les gants blancs du porte-drapeau
Le musée de la Résistance de l’Ain garde la mémoire de cette épopée, et notamment le visage de Raymond Mulard, le porte-drapeau. Il a souvent parlé du défilé à sa fille Sylviane Tissot.
"Il se posait cette question quelques fois : n'étions-nous pas inconscients ?, témoigne-t-elle. De faire ça, à la barbe des Allemands... La veille, ils venaient de voler de l'armement et des vêtements. Je pense qu'ils étaient inconscients quelque part."
Sylviane Tissot nous compte un événement qui a particulièrement marqué son père. "Quand il est arrivé à Oyonnax, une femme qui venait de se marier lui à donner ses gants blancs. Un porte-drapeau ça porte des gants blancs, ça ressort."
Pour le 80ᵉ anniversaire de ce défilé, une reconstitution est prévue à Oyonnax ce samedi 11 novembre 2023.