L'une des plus vieilles centrales de France, la centrale nucléaire du Bugey, est actuellement en pleine révision pour poursuivre son exploitation. Mais déjà, le Département de l'Ain se positionne pour accueillir deux réacteurs EPR, afin d'assurer "l'après" centrale. Au grand dam des Suisses.
Sa mise en service remonte à 1972. La centrale du Bugey subit actuellement sa 4e visite décennale, qui s'étale de 2020 à 2023. C'est ce que le monde du nucléaire appelle le grand carénage, terme emprunté aux marins pour désigner cette révision cruciale afin de prolonger la vie de la centrale. 2,1 milliards d'euros sont investis pour ce programme industriel qui doit permettre d'atteindre les standards de sûreté internationaux. 4000 salariés sont mobilisés pour l'occasion.
La centrale assure environ 40% de l'énergie consommée en Auvergne - Rhône-Alpes.
Une paire d'EPR dans l'Ain
Ce grand carénage ne doit pas faire oublier que la centrale ne dépassera pas les 10 à 15 ans. Quel sera "l'après" ? Les EPR (Evolutionary Power Reactor), des réacteurs nucléaires nouvelle génération, pourraient prendre le relais. A l'été 2019, EDF a présenté un rapport à son conseil d'administration dans lequel apparaît la création de 6 EPR en France. Comme il s'agit de paires, 3 sites d'implantation sont prévus. L'Etat, qui dit ne pas avoir totalement tranché l'avenir énergétique du pays, a tout de même invité les candidats à lever le doigt. Le Département de l'Ain a levé les deux mains. Son président LR, Jean Deguerry a profité d'une session, courant décembre, pour faire voter une motion en faveur d'une installation près de la centrale du Bugey. Le but recherché est avant tout de soutenir l'économie locale avec 2000 emplois directs ainsi sauvés.Des opposants
Une mauvaise nouvelle pour l'association "Sortir du nucléaire Bugey", qui redoute un copié-collé de Flamanville. Le site de la Manche est en chantier depuis 17 ans ! A l'origine, l'EPR normand devait coûter trois milliards d'euros mais la facture totale s'élève désormais à 12,4 milliards. Surtout, cette aventure a été semée d'embûches, d'anomalies relevées sur les soudures notamment. Rien de rassurant pour les antinucléaires.Les voisins suisses se ralient à leur cause et envisage d'attaquer cette éventuelle implantation dans l'Ain, à 60km à vol d'oiseau de Genève. Antonio Hodgers, le président du Conseil d'Etat du canton explique dans un journal helvète : "Voir qu'en 2020, à l'heure de la transition écologique, des alternatives au nucléaire ne sont pas sérieusement discutées, est intrigant." La Ville de Genève devrait le rejoindre.
Reportage Franck Grassaud et Maryne Zammit