"Les mots aussi peuvent tuer" : procès d'un internaute pour "provocation à commettre un crime" contre un proviseur

En février dernier, un internaute de l'Ain s'est lâché sur les réseaux sociaux. Dans un message, il s'en prenait à un proviseur de lycée en écrivant : "il faut aller lui en mettre deux à ce fils de lâche". Une phrase qui a précipité le départ anticipé à la retraite du fonctionnaire. L'audience pour "provocation à commettre un crime" se déroulait ce jeudi 7 novembre.

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Lors de l'audience, ce jeudi 7 novembre, à Bourg-en-Bresse, la Procureure de la République s'est adressée au prévenu avec cette phrase : "il n'y a pas que les couteaux et les Kalachnikovs qui tuent, il y a aussi les mots". Une phrase qui résume la teneur des débats.

"Commettre un crime"

D'un côté, un proviseur, aujourd'hui à la retraite après avoir subi des menaces sur les réseaux sociaux. De l'autre, un homme de 45 ans, habitant dans l'Ain. Il comparait pour "provocation à commettre un crime".

Nous sommes en février dernier. Sami B (nom d'emprunt), réagit à l'emballement suscité à l'époque, dans un lycée parisien. Un proviseur avait rappelé à l’ordre une élève qui voulait mettre son voile dans la cour. L’affaire a été montée en épingle, transformée sur les réseaux sociaux et devenue virale. Le proviseur était soupçonné d’avoir frappé l’élève, ce qui n'avait pas été le cas.

"Un appel à la guerre"

En écrivant sur un réseau social : "Il faut aller lui en mettre deux à ce fils de lâche", l'auteur de la phrase encourt une peine de cinq ans d'emprisonnement.

"C'est un appel à la guerre ça !", lui fait remarquer le président du tribunal. "Vous savez, ça peut exciter les fous, les assassins", ajoute-t-il, évoquant les assassinats des enseignants Samuel Paty en 2020 et Dominique Bernard en 2023.

Si vous avez un fou, au fin fond de la Tchétchénie ou ailleurs et qui lit ça, il s'arme et il vient exécuter mon client. Ces menaces sont très graves, ce ne sont pas de simples messages. Après l'affaire Samuel Paty, il y en a d'autres maintenant.

Francis Lec, avocat du syndicat des personnels de direction

"Ses mots ont dépassé sa pensée"

À la barre, le prévenu, un père de famille au casier judiciaire vierge, s'est dit "honteux" de ses propos qu'il "regrette amèrement". "Je ne mesurais pas la conséquence de ce que j'écrivais" a-t-il ajouté.

Son avocat relativise en décrivant "un homme normal, sans antécédent judiciaire et qui n'a jamais fait parler de lui avant".

Il s'est retrouvé dans une conjonction d'événements qui l'ont amené à "péter les plombs" et qui l'ont amené à utiliser les réseaux sociaux comme un exutoire. Il voulait parler de gifle, pas de balle. Il n'a rien à voir avec les milieux extrémistes.

Jérémie Brill, avocat du prévenu

Son avocat explique même que son client "n'est plus sur les réseaux sociaux, ses mots ont dépassé sa pensée".

Dix mois de prison avec sursis ont été requis contre le prévenu.

Des faits similaires ailleurs

Pour des faits similaires, un premier homme a été jugé en septembre puis condamné par la cour d'appel de Caen (Calvados) à du travail d'intérêt général. Un deuxième, âgé de 27 ans, a lui été jugé en correctionnelle mi-octobre à Paris et le délibéré est attendu courant novembre.

À Bourg-en-Bresse, le tribunal a mis sa décision en délibéré, elle sera rendue le 28 novembre prochain.

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