Des peines d'amendes de 1000 à 2000 euros ont été requises, ce mardi 28 mai, à l'encontre de six activistes du mouvement ANV-COP 21. En mars dernier, ils avaient décroché un portrait d'Emmanuel Macron dans la mairie de Jassans-Riottier (Ain). L'affaire a été mise en délibéré au 12 juin.
Les six militants sont de la région de Villefranche-sur-Saône pour l'essentiel, ils adhèrent au mouvement Alternatiba qui cherche des solutions locales pour lutter contre le déréglement climatique. Depuis quelques mois, ils ont décidé de passer à la vitesse supérieure en rejoignant les activistes d'ANV-COP 21.
Ce mardi après-midi, ils étaient appelés à comparaître devant le tribunal correctionnal de Bourg-en-Bresse pour une action menée le 2 mars dernier en mairie de Jassans-Riottier. Comme dans une cinquantaine d'hôtels de ville en France, ces militants ont décroché le portrait du président de la République. Il s'agissait de "dénoncer symboliquement l'inaction climatique de la France".
Dans la salle des mariages
Les faits se sont déroulés dans la salle du conseil municipal qui sert aussi pour les mariages. Des militants ont invoqué la célébration d'une union prochaine pour entrer dans la pièce. Tout ceci n'était qu'un prétexte, pour permettre à 13 membres du groupe de pénétrer dans la mairie afin de décrocher le portrait présidentiel. Le maire a déposé plainte.Après l'enquête de gendarmerie, six activistes ont donc été envoyés au tribunal pour "vol en réunion et par ruse". Cinq sur 6 ont refusé les prélèvements ADN auxquels ils devaient être soumis.
Reportage Franck Grassaud et Maryne Zammit
Une journée contre l'inaction climatique
Ce premier procès dans l'hexagone alors que 8 autres sont programmés, s'est transformé en tribune pour le climat avec, en marge, un rassemblement à 500m du tribunal. Là, conférences et débats ont ponctué la journée, des concerts étaient même prévus.Vidéo - extrait 12/13 France 3 Rhône-Alpes
A la mi-journée, les participants étaient près de 400 à rejoindre le tribunal, chacun avait une pancarte pour pointer du doigt l'inaction gouvernementale face au climat. Arrivés devant le Palais de justice, ils ont célébré en héros les 6 personnes inquiétées.
"La cause, je ne la juge pas"
Les six prévenus ont été entendus longuement par le président du tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse, Hervé Blanchard. "La cause, je ne la juge pas", a-t-il expliqué d'emblée, paraissant lui aussi conscient du problème climatique. Mais les militants étaient jugés pour un vol.
Malgré tout, ils ont réussi à expliquer "que personne ne bouge" et que les actes "de désobéissance civile" s'imposent. "Il faut qu'on arrête le blabla, il faut passer à l'acte", dira l'un d'eux. "On en est à prendre des risques pour défendre la cause de tout le monde", ajoutera Nicolas Guerrini, l'un des prévenus, "mes enfants sont très fiers de leur papa."
Des personnes à la barre qui assument mais ne pensaient pas "se retrouver devant un tribunal pour une photo, en raison de l'absence de préjudice". Le maire de Jassans a lui demandé qu'on lui rende sa photo.
"Avez-vous l'intention de rendre cette photo?", interrogera le procureur. "Déjà il faut que le gouvernement respecte ses engagements...", répondra l'un d'eux.
"L'inaction climatique est plus forte qu'une photo"
"Nous avons tout à fait conscience d'avoir touché un symbole, mais l'inaction climatique est plus forte qu'une photo au milieu d'un cadre", détaillera une enseignante également poursuivie. "J'ose espérer que l'autorité publique ne se limite pas à une photo dans une mairie", a renchéri un retraité. "Il y a une nécessité d'agir au-delà de ce qu'on a déjà fait." Et d'insister sur l'urgence avant la catastrophe climatique.
"En décrochant ce portrait, je n'avais pas l'impression de manquer de respect ni aux institutions ni au président, mais d'agir pour tous", dira un cadre supérieur également engagé dans l'action.
Le procureur a, de son côté, reproché aux prévenus de transformer ce procès "en tribune politique au sens large". "C'est là où ça me gêne, on n'utilise pas une enceinte de justice pour faire passer un message, y'a d'autres lieux pour ça", expliquera-t-il, répétant être là "pour faire du droit". Il a donc requis 1000 euros d'amende pour le prévenu qui avait accepté de se soumettre à des prélèvements ADN durant l'enquête, et 2000 euros pour les autres.
Le délibéré sera rendu le 12 juin.
Faire respecter les Accord de Paris
ANV-COP 21 estime que la réponse d'Emmanuel Macron à "l'Affaire du Siècle", -action en justice contre l'Etat français soutenue par plus de 2 millions de personnes-, est insuffisante. La France ne ferait pas assez d'efforts pour respecter l'Accord de Paris, qui doit limiter l'augmentation moyenne des températures à 1,5°C d'ici 2100.Vidéo