C’était un rapport prémonitoire. Le député de l’Ain Charles de la Verpillière (LR) et son co-rapporteur Jean-Charles Larsonneur (LREM) avaient pour mission d’écrire un rapport sur la situation stratégique en Europe de l’Est. Très tôt, ils informent de la menace d’un conflit armé. L’Europe aurait pu et dû se montrer plus ferme dès le début.
Dès le mois de novembre 2021, ils «reçoivent l’alerte». Alors qu’ils sont missionnés par la commission de la Défense nationale, Charles de la Verpillière, député de l’Ain et Jean-Charles Larsonneur rencontrent un à un les chefs militaires et les services de renseignement des pays baltes.
"Un conflit inéluctable"
A cette époque, le spectre de la guerre en Ukraine est encore assez lointain. «Mais nos interlocuteurs à Tallinn nous ont tout de suite dit, et de manière assez catégorique, que la Russie allait attaquer en février. Cela nous a refroidit, et cela nous a posé question… Nous avons tout de suite rendu compte de cette menace», raconte Charles de la Verpillière.
Les deux députés s’intéressent donc de plus prêt à l’Ukraine et au fur et à mesure que le ton se durcit du côté russe, l’éventualité d’un conflit armé en Europe se confirme.
Si l’on n’avait au début aucune certitude, on a toujours gardé en mémoire cet avertissement donné en Estonie, et on a donc décidé d’être assez alarmistes dans le rapport.
ajoute le député
Un rapport est prêt dès le début du mois de février, même s’il n’est publié que la veille de l’invasion russe. Un rapport prémonitoire dont les conclusions et les recommandations sont sans appel. «C’était inéluctable, sauf à tout céder à la Russie dès le début», résume Charles de la Verpillière.
Selon les rapporteurs,
L'invasion de l’Ukraine (…) s’inscrit dans une stratégie globale de la Russie pour étendre son influence et retrouver le prestige et la puissance qu’elle estime avoir perdus depuis la chute de l’URSS
Et la Russie est prête à violer le droit international pour y arriver. «On a compris assez vite que Poutine n’hésiterait pas à utiliser les armes et qu’il était prêt à aller au bout, que ce n’était pas juste une gesticulation», explique le député de l’Ain.
"Il aurait fallu agir avant"
Conclusion ? La France et l’Europe auraient pu agir avant.
Les Européens demeurent encore trop divisés quant aux réponses à apporter aux provocations de la Russie et à la nature du soutien à l’Ukraine
écrivent les rapporteurs.
Et, corroboré par les multiples alertes lancées par les renseignements américains, "il aurait fallu être plus ferme dès le début, dans les mois qui ont précédé l’attaque russe. Il aurait fallu donner des signaux en terme de mobilisation militaire, montrer que nous aussi nous étions prêts à affronter une menace militaire et donner à l’Ukraine la capacité de résister", affirme Charles de la Verpillière.
S’ils reconnaissent qu’il est plus facile de donner des leçons après coup, les deux rapporteurs assurent que «les indices étaient incontestables». En conséquence de quoi, «la livraison d’armes à l’Ukraine aurait pu se faire plus tôt, il fallait montrer aux Russes qu’on savait ce qu’ils manigançaient». Le député de l’Ain ajoute également que le renforcement des forces de l’OTAN en Roumanie a été trop tardif.
Et accepter l’Ukraine dans l’OTAN ? "On aurait dû et on aurait pu le faire avant, s’il y avait eu la volonté politique de le faire", conclut Charles de la Verpillière.