C’est une ambulance parmi tant d’autres détruite en Ukraine, lors des combats menés contre la Russie. Visée lors d’une intervention en 2022, elle a depuis été exposée dans plusieurs pays d’Europe pour récolter des fonds et sauver des civils en Ukraine. Devenue un symbole, elle sera de passage à Besançon du 12 au 14 novembre.
Septembre 2022. Village de Stary Saltiv, oblast de Kharkiv, Ukraine. Une ambulance intervient dans un quartier résidentiel où un homme se trouve blessé, dans un sous-sol. L’équipe de médecins lui prodigue alors les premiers soins. Avant même de pourvoir l’évacuer, une explosion retentit.
En sortant, les secouristes font face à une nouvelle scène de guerre. Éclats de verre, matériel éparpillé, c’est un obus qui a explosé à proximité de l’ambulance, déjà criblée de balles durant ses nombreuses interventions dans cette zone libérée des Russes depuis mai 2022, mais constamment bombardée.
Reportage d'une chaîne de télévision ukrainienne, en octobre 2022.
Une ambulance devenue symbole
Cette ambulance, détruite par l’armée russe comme des centaines d’autres, va pourtant connaître un destin tout autre que ses consœurs, promises à la casse, loin de leur glorieuse mission. Numérotée 1804, la camionnette Citroën blanche à bandeaux rouges va devenir un symbole de mémoire. Repérée puis rapatriée par l’association luxembourgeoise LUkraine, l’ambulance mitraillée va permettre le lancement du projet Ukraine is Calling, une campagne mondiale de collecte de fonds primée par le Parlement Européen en 2023.
L’objectif : financer et livrer 112 véhicules de secours à l’Ukraine, partiellement atteint puisque 72 véhicules ont d’ores-et-déjà été envoyés depuis la genèse du projet. Pour ce faire, une ambassadrice du front va entamer un tour d’Europe : l’ambulance 1804. Tractée sur un véhicule-plateau, puisqu'inutilisable, elle a déjà été exposée dans une cinquantaine de villes de sept pays d’Europe.
L’ambulance avait déjà fait un passage en France en février 2023, à Metz et devant le Conseil de l'Europe à Strasbourg. Après avoir été exposée à Londres, en Belgique, à Vienne, en Slovaquie, elle va connaître une notoriété grandissante en Italie, où 45 villes l’ont accueillie d’avril à octobre 2024.
C’est par la ville de Nice qu’elle est revenue en France, le 10 octobre dernier, entamant un périple dans une cinquantaine de villes, dans le cadre du projet “Ambulance Mitraillée France”, qui fédère de nombreuses associations franco-ukrainiennes. Dans chaque ville, des bénévoles se relaient pour convoyer, exposer l’ambulance et sensibiliser le public.
Parcours de l'ambulance en France, Google Maps.
L’ambulance mitraillée à Besançon
Arrivée de Grenoble, puis Annecy, l’ambulance va donc faire étape à Besançon du 12 au 14 novembre, avant de prendre la direction de Lyon puis Toulouse. “Visuellement, c'est très impactant. Dans chaque ville il y a des gens qui acceptent de faire un don”, se réjouit Sophie Muraccioli, bénévole pour l’association bisontine UKRaide, qui se mobilise depuis 2022 pour envoyer vivres et matériel sur le front Ukrainien. “Ça donne une force que tout seuls, on n’aurait pas.”
On essaie de parler régulièrement du conflit pour inciter au don. Il y a d’autres conflits mais ça gomme ce qui se passe en Ukraine. C'est rappeler aux gens que ce n'est pas fini
Sophie Muraccioli, bénévole pour l’association UKRaide
L’ambulance mitraillée sera exposée le 12 novembre place du 8 septembre, le 13 novembre place de la Révolution, et le 14 novembre devant le CHU. Des concerts de chants ukrainiens seront organisés, et des bénévoles se relayeront pour expliquer projet et rappeler les missions d’UKRaide. Le programme détaillé est disponible sur leur site.
Pour Daria Cadalen, membre d'UKRaide et d’origine ukrainienne, voir l’arrivée de l'ambulance "va être un choc”. “J'appréhende de la voir en vrai.” Arrivée en France en 2002 pour un échange universitaire, Daria a encore une partie de sa famille et ses amis dans la région de Kiev. Elle se dit bouleversée par de tels actes sur des équipes de secours. “Ça nous remet toutes les idées en place. On ne peut pas imaginer que ça existe, qu’il y a des êtres humains capables de faire ça.” Pour Daria, il est primordial de continuer à sensibiliser, à soutenir son peuple.
C’est quelque chose d’horrible. Ça veut dire qu’il y a quelqu’un qui a eu l’idée de mitrailler [une ambulance]. Il y a aucune humanité.
Daria Cadalen, bénévole pour l'association UKRaide
L'ambulance devrait terminer son passage en France en avril 2025, après avoir marqué les esprits, et, espèrent les associations, récolté suffisamment de fonds (via, en parallèle, une cagnotte en ligne) pour financer et acheminer 30 nouvelles ambulances pour l’Ukraine.
Matériel médical, fournitures scolaires, chaque don compte
Dans chaque ville, c’est tout un réseau qui se met en place pour participer à l’élan solidaire, explique Daria Cadalen. “On cherche aussi une ambulance neuve ou d’occasion, ou des équipements.” Du matériel médical crucial pour fabriquer de toute pièce ou pour rénover des véhicules de secours d’occasion. UKRaide lance à ce propos un appel aux entreprises d’ambulance.
À l’issue de sa tournée dans l’Hexagone, la vénérable camionnette ukrainienne pourrait poursuivre sa tournée européenne, avant, un jour, de rentrer au pays. “On doit quand même la restituer en Ukraine, c’est une preuve de crime de guerre”, appuie Daria Cadalen.
Si l’ambulance va permettre de mettre un coup de projecteur sur le conflit, et, avec l’aide fournie, sauver la vie de civils en Ukraine, la mission de chaque association reprendra son quotidien. Pour UKRaide, le prochain objectif est d’envoyer un nouveau semi-remorque de matériel médical, après le dernier, qui avait été convoyé en aout.
On prend aussi tout ce qui est outils pour reconstruire, tout ce qui permet d’aider à rénover.
Sophie Muraccioli, bénévole pour l’association UKRaide
Chaque don compte, soutient Sophie Muraccioli. “À Noël, on essaie d’envoyer des jouets, des produits alimentaires qui se conservent, des fournitures scolaires, du matériel de couchage ou des produits d’hygiène, car l’accès à l’eau est compliqué.”
"On est déjà allés plusieurs fois, pour Noël, témoigne Daria Cadalen. Ou amener des ambulances données par la ville de Bâle. C’est notre part de ce qu’on peut faire pour notre pays."