Depuis plus de 30 ans Jean-Louis Gaby refuse le passage des camions-poubelles devant sa maison de Tortezais dans l’Allier. Il fait son tri lui-même pour diminuer le gaspillage et s’assurer que les déchets soient recyclés.
« Si tout le monde faisait son tri et allait jeter les déchets directement aux différents points relais comme les conteneurs mis à disposition par la commune, il y aurait beaucoup moins de gaspillage et la plupart seraient recyclés. » Pour Jean-Louis Gaby, un habitant de Tortezais dans l’Allier, en plus de polluer, le système de ramassage des ordures instauré par la mairie ne responsabilise pas assez les citoyens. En 2018 il a refusé les poubelles recyclables et non recyclables pour le ramassage par la commune, pour réaliser son tri lui-même : « Ma propre poubelle de déchets recyclables ne fait que 8 litres pour un mois et pour les déchets ménagers ils finissent dans mon jardin avec mes moutons et mes poules » explique-t-il fièrement en alimentant ses moutons de pelures de carottes. Et pour les déchets non comestibles qu’il ne peut incinérer dans son poêle ou ceux destinés à être recyclés, il les trie minutieusement dans son garage pour qu’ils aient une seconde vie.
Un garage pour recycler
Dans son petit garage Jean-Louis possède une cinquantaine de boîtes où sont triés précisément les matériaux potentiellement recyclables. Après s’être assuré que l’objet en fin de vie est hors d’usage, le bricoleur le désosse entièrement pour en extraire ses composants qu’il dispose dans ses boîtes. « Certains objets peuvent contenir du fer, du mercure ou encore de l’étain. Ce sont des matériaux très recherchés par les ferrailleurs qu’il serait stupide d’enterrer et qui peuvent avoir une seconde vie. » Et tant qu’il ne trouve pas des repreneurs les composants restent chez-lui. Lorsqu’il n’a d’autre choix que de jeter les objets qu’il ne peut entasser, Jean-Louis se rend lui-même à pieds aux points propres de sa commune (conteneurs installés par la mairie pour le tri) et à la déchetterie la plus proche avec sa voiture électrique. Un moyen de s’assurer de leur devenir jusqu’au bout : « J’emmène uniquement les déchets que je ne peux conserver pour qu’ils soient incinérés ou recyclés. Si la déchetterie me propose de les enterrer, je refuse catégoriquement et les garde chez moi en attendant de trouver un endroit qui pourra le faire. »Changer les habitudes
Pour le retraité la France a beaucoup de retard en matière de tri des déchets par rapport à l’Allemagne ou l’Autriche par exemple « qui ne mettent plus aucun déchet ménager en décharge depuis des années. » Pour lui il faut changer les habitudes pour éviter le gaspillage et la pollution : « La totalité du contenu non recyclable des poubelles de la mairie va en décharge. Les déchets biodégradables représentent 29% de la poubelle et pourraient être donnés à des animaux ou servir d’engrais au lieu d’être enterrés. » Et en ce qui concerne les déchets recyclables il pense que les personnes devraient s’intéresser davantage à leur devenir en faisant l’effort de les emmener eux-mêmes aux conteneurs de la mairie ou à la déchetterie : «Je suis allé à la déchetterie la plus proche ce matin pour y déposer du polystyrène et de la moquette, si je ne m’étais pas renseigné, ils auraient été enterrés. Tant que je ne trouverais pas un incinérateur ou une déchetterie qui accepte de les brûler ou de les recycler je garderai ces déchets chez moi. »Réduire le passage des camions-poubelles
Pour le retraité la prise de conscience passe d’abord par l’arrêt du ramassage des ordures : « Depuis que les camions-poubelles ne passent plus dans une des communautés de communes du Lot-et-Garonne dans une stratégie de tri collectif, 40 % des personnes font davantage le tri qu’avant et les sac noirs jetés ont diminués de 50 %. Alors pourquoi pas ici ? » se questionne Jean-Louis en s’appuyant d’un article de France 3 Nouvelle Aquitaine. Mais si Jean-Jacques Perret le Maire de Tortezais salue l’initiative, pour lui elle reste utopiste à appliquer dans sa commune : « Tout le monde ne peut se déplacer à la déchetterie ou aux points propres que nous avons installés pour trier ses déchets. La population est vieillissante. Et puis la plupart se déplacerait avec leur voiture ce qui polluerait autant que les camions-poubelles.»Pour lui les deux poubelles mises à disposition par la commune responsabilisent les citoyens : « Depuis que nous avons mis en place ce dispositif la quantité des déchets ménagers enfouis diminue. Alors bien sûr nous aimerions ne plus enterrer du tout mais il faut y aller crescendo ». Si pour lui arrêter le ramassage des poubelles est difficilement envisageable et risquerait de provoquer des excès de comportement car « tout le monde ne possède pas des poules ou des moutons pour se débarrasser des déchets alimentaires », il reconnaît qu’il serait judicieux de restreindre le passage des camions-poubelles. « Nos camions poubelles ont déjà espacé le ramassage et n’interviennent que tous les 15 jours pour responsabiliser les individus. Ils pourraient passer une fois par mois ça ne poserait aucun problème pour les déchets ménagers mais pour les déchets recyclables ça serait plus problématique, le tri demande du temps. Et puis il risquerait aussi d’avoir un problème d’odeurs. » ajoute le maire. Alors en attendant un changement qu’il espère imminent, Jean-Louis continue de limiter sa consommation au strict minimum et d’acheter ses aliments sur le marché « sans emballage ». Pour lui tous les moyens sont bons pour prouver qu’il est possible de limiter ses déchets et contribuer à sauver la planète.Il faut y aller crescendo