À Moulins, dans l'Allier, les commerces du centre-ville se lancent dans la vente en ligne sur une plateforme internet commune pour continuer de vendre malgré le confinement lié au coronavirus. De nombreux dispositifs se mettent également en place pour éviter les faillites.
Pendant la crise sanitaire du coronavirus COVID 19 et le confinement, sur la plateforme de commerce en ligne mavillemonshopping.fr, déjà 45 magasins de Moulins, dans l'Allier, affichent tout ce qu’ils ont à vendre. Cyril Martin, manager du centre-ville employé par la Ville, ne cache pas sa fierté : « C’est vraiment très bien pour un démarrage, nous sommes très contents, et d’autres magasins vont les rejoindre ». En surfant d’une boutique virtuelle à l’autre, on croise ici des chemisiers, là des fleurs, plus loin des skate boards. Voici même 5 kg de viande de volaille ! C’est l’une des boucheries historiques de Moulins qui passe au numérique !
Une plateforme internet pour faire des achats
Depuis le 6 avril dernier, les commerces de la cité bourbonnaise sont appelés par la municipalité à rejoindre cette plateforme internet créée par La Poste. Les clients commandent et se font ensuite livrer. « C’est un projet que nous avions dans les tuyaux, mais que nous avons volontairement accéléré avec la crise du coronavirus », explique Pierre-André Périssol, le maire de la ville. « Je veux donner la possibilité aux habitants de notre territoire de faire des achats quand ils ont envie de se faire plaisir et je souhaite que les commerces puissent avoir malgré tout une activité ».Perte de 80 000 euros depuis le 17 mars pour les commerces de deuxième nécessité
Véronique Lamotte possède deux boutiques à Moulins, une maroquinerie et un magasin de chaussures. Fermés depuis le 17 mars comme tous les commerces de deuxième nécessité. Perte sèche cumulée jusqu’à ce jour : près de 80 000 euros. Cette commerçante a tout de suite adhéré à la plateforme de vente en ligne qui ne prend aucune commission le temps du confinement : « Pour sauver les meubles, il fallait trouver une solution », annonce-t-elle. Son magasin de sacs rencontre peu de succès : « Les gens ont besoin de toucher, de voir », analyse-t-elle. Mais les ventes de chaussures de son autre commerce lui redonnent le sourire : « J’ai déjà vendu six paires, pour moi, c’est un bon début ! Ce n’est pas énorme, mais je fais quand même travailler un peu mon compte. Et vis-à-vis de ma banque, je suis plus crédible. Je montre que j’essaye de vendre ».Même satisfaction, même détermination pour une autre boutique, placée elle aussi en plein cœur de Moulins. Damien Deschaintres vend des jeux vidéo d’occasion et des produits dérivés de la culture geek. « Sur la plateforme, j’ai fait 150 euros de vente en une semaine » se réjouit-il. « Cela peut paraître dérisoire, mais c’est mieux que rien. Et puis c’est sans avoir fait de publicité. Avec les semaines qui vont passer, les gens vont connaître et ça va permettre de développer une clientèle que je n’ai peut-être pas actuellement ».
3 000 visites
En dix jours d’existence, la page du site mavillemonshopping.fr qui rassemble les commerces de Moulins a déjà reçu près de 3 000 visites et généré plusieurs milliers d’euros de chiffre d’affaires.Pour la Ville de Moulins, donner de l’oxygène à ses commerces est un enjeu stratégique. La municipalité s’est lancée il y a 3 ans dans la reconquête de son centre-ville historique, à l’époque de plus en plus déserté par les enseignes. « Depuis 2015, le taux de vacance des commerces est passé de 15 % à 9,5 % », témoigne Cyril Martin, le manager du centre-ville. Des efforts qu’un minuscule virus pourrait anéantir. « Oui bien sûr que cela m’inquiète », reconnaît Pierre-André Périssol, le maire de Moulins. « Mais nous réfléchissons avec la Région à un dispositif d’accompagnement pour les commerces qui seraient en difficulté ». Il réfléchit aussi à un plan de relance, notamment dans le tourisme pour accroître l’attractivité de Moulins : « Nous aurons probablement un tourisme très franco-français », continue Pierre-André Périssol. « Et j’essaye de voir comment nous pourrions attirer les Parisiens ou les Lyonnais qui ne pourront plus partir à l’étranger ». Des touristes qui viendraient consommer à Moulins et qui aideraient les commerces à se refaire une santé.
Vers une faillite des commerces ?
Combien de commerces à Moulins ne pourront survivre à la crise ?Impossible encore à estimer. Au niveau national, le GNI (Groupement national indépendant- hôtellerie et restauration), syndicat hôtelier, prévoit une disparition de 20 à 25 % des bars et restaurants. « Mais il y a quand même des aides importantes qui ont été mises en place et au fil des jours, les mesures sont ajustées, complétées », rassure Richard Bruyat, conseiller entreprises à la CCI de l’Allier. Ce dernier se veut résolument optimiste : « Les commerçants qui nous contactent sont évidemment très inquiets. Mais les entrepreneurs ont dans l’ensemble une culture d’initiative, ils savent prendre des risques, ils savent rebondir quand ça va mal. Le dirigeant, même d’une entreprise de petite taille, est aujourd’hui dans une posture de combat, de résistance ».
Damien Deschaintres, vendeur de jeux vidéo à Moulins, affiche effectivement une confiance absolue dans sa capacité à rouvrir son magasin à la sortie du confinement : « Du moment que mes charges fixes ont été bloquées ! Et le ministre de l'Économie vient de demander aux bailleurs l’annulation des loyers des petites entreprises pendant trois mois ! Pour moi, ce serait un bon bol d’air ! Je suis de plus en plus partisan du principe que même les mauvaises expériences permettent d’avancer ».
Véronique Lamotte, propriétaire d’un magasin de chaussures et d’une maroquinerie, se projette aussi déjà dans l’avenir : « Il faudra qu’on travaille autrement. Qu’on ouvre plus : entre midi et deux et le lundi après-midi me concernant ». Et tous espèrent que les clients reviendront très vite dès la fin du confinement.