Grand débat national. Claude Malhuret : « J’ai entendu plus d’âneries en 6 mois qu’en 30 ans de vie publique »

Le sénateur de l’Allier Claude Malhuret, président du groupe Les Indépendants a prononcé un discours très remarqué, mercredi 10 avril, devant le Premier Ministre. Au Sénat, à l’occasion de la fin du grand débat, il a reconnu avoir « entendu plus d’âneries en 6 mois qu’en 30 ans » de vie publique.

Un grand débat politique sur le Grand débat. Mercredi 10 avril, au Sénat, les présidents de groupe se sont exprimés à la sortie du grand débat, face au Premier Ministre Edouard Philippe. Le sénateur de l’Allier et président du groupe Les Indépendants Claude Malhuret a mis à profit ses 8 minutes de temps de parole pour prononcer un discours qui n’est pas passé inaperçu.

Des "gouverneurs de ronds-points autoproclamés"


«  J’ai l’impression d’avoir plus appris au cours de ces six derniers mois qu’en 30 ans de vie publique. Pour tout dire, j’ai aussi entendu plus d’âneries en six mois qu’en 30 ans. Et pourtant depuis 30 ans nous en avons tous entendu pas mal ». C’est en ces termes que le sénateur de l’Allier a débuté son allocution. Et de poursuivre : « Si, comme disait Talleyrand, la politique est l’art d’agiter les peuples avant de s’en servir, alors nous avons pris une grande leçon de politique de quelques gouverneurs de ronds-points autoproclamés qui ont réussi à transformer en fureur la colère de quelques dizaines de milliers de personnes et à leur faire croire qu’ils sont à eux seuls le peuple français ».
Évoquant les dernières manifestations des gilets jaunes, Claude Malhuret ne mâche pas ses mots : « Il ne reste plus aujourd’hui dans les rues le samedi que quelques acharnés d’un mouvement sans but et sans programme, zigzagant le long des boulevards comme des canards décapités, s’enivrant de selfies sur fond de poubelles en feu en répétant « On ne lâche rien », sans qu’on sache d’ailleurs ce qu’ils tenaient. Le spectacle est navrant et pourtant beaucoup d’inquiétudes sont réelles. L’objectif du grand débat, si j’ai bien compris, est d’y répondre ».

"La conclusion du grand débat, c’est un peu une lettre au Père Noël"


Pour lui, la principale vertu du Grand débat est d’avoir «  remplacé les révoltés des braseros, plus centrés sur eux-mêmes qu’un trou noir et refusant tout dialogue, par des élus locaux et leurs concitoyens dans les mairies ». Selon Claude Malhuret, de nombreuses propositions issues des contributions risquent de conduire à une explosion des dépenses publiques. Et d’insister : « La conclusion du grand débat, c’est un peu une lettre au Père Noël, et si le Président ne veut pas passer pour le Père Fouettard, il va devoir réussir à expliquer que la différence entre le grand débat et le gouvernement, c’est que le gouvernement ne peut s’affranchir du réel. Et le réel, c’est que nous sommes les champions du monde de la dépense publique et des prélèvements obligatoires. »

De l'"indignationnisme"


Dans son discours, le sénateur de l’Allier a également évoqué le populisme et « les nuages qui s’accumulent sur notre démocratie ». « Nul ne ment autant qu’un homme indigné » disait Nietzsche. Et nous sommes aujourd’hui atteints d’indignationnisme", a-t-il déclaré.
S’adressant au Premier Ministre : « Et c’est le moment où certains vous demandent de remplacer la démocratie représentative par la démocratie directe.  Parce qu’on peut aujourd’hui se procurer d’un clic un costume, une voiture d’occasion ou même un partenaire d’un soir, certains pensent qu’on peut faire la loi ou révoquer le Président en un clic. Ils ne voient pas que cette démocratie directe-là, c’est ce que nous avons sous les yeux depuis six mois, la démocratie des réseaux antisociaux, avec, au nombre de followers, FlyRider comme Président. « La foule est traître au peuple » disait Victor Hugo et la démocratie directe proposée par les populistes est le triomphe de la foule. Nous voyons bien déjà que derrière le masque avenant du référendum d’initiative citoyenne se cache le visage plein de ressentiment du référendum révocatoire."

Montesquieu, Tocqueville, Drouet et le boxeur du Pont des Arts


« Je comprends que l’on souhaite une démocratie plus participative, dans cette Vème République si … comment dire … Jupitérienne. Et il va nous falloir trouver un équilibre. Mais ce n’est pas au moment où tout semble glisser, déraper, devenir incontrôlable, qu’il faut affaiblir la démocratie représentative. Entre Montesquieu et Tocqueville d’un côté, Drouet et le boxeur du Pont des Arts de l’autre, je choisis les premiers, même s’ils n’ont pas d’amis sur Facebook ».

En décembre 2018, Claude Malhuret avait déjà prononcé un discours très remarqué à l’occasion du débat sur la crise des gilets jaunes. « La loi se fait au Parlement et pas sur les ronds-points », avait-il rappelé aux parlementaires.
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