En octobre dernier, une mortalité anormale d'écrevisses à pattes blanches a été constatée sur la rivière Veyruègne, au niveau de Saint-Pierreville en Ardèche. A l'origine de cette hécatombe, une autre écrevisse, importée.
Espèce autochtone et protégée, l'écrevisse à pattes blanches connaît une mortalité inhabituelle dans certains cours d'eux de la vallée de l'Eyrieux. Les premiers cadavres ont été découverts en octobre 2021 dans un cours d'eau relativement bien préservé.
Ce phénomène est lié à une pathologie transmise par d'autres écrevisses dites américaines qui auraient été introduites illégalement dans ces ruisseaux.
Des zones habituelles désertées
"Ces écrevisses d'origine américaine sont porteurs sains, elles hébergent l'agent pathogène sans en souffrir. Par contre, ce pathogène est léthal à 100% pour les écrevisses autochtones en Europe. Le jour où il se retrouve dans la population, c'est 100% d'individus qui meurent" explique Théo Duperray.
Cet expert astacicole connait bien l'endroit en question. Il y avait réalisé un suivi en 2019 et avait répertorié une population allant jusqu'à 10 spécimens au mètre carré. Cette portion du cours d'eau représentant l'habitat idéal avec des pierres de toutes les tailles et des zones d'alimentation. Il n'avait pas détecté de cas de peste.
Aujourd'hui, il estime le périmètre d'éradication de la crevette à pattes blanches à 13 km de rivière (sur les 43 km concernés du bassin versant de l'Ardèche) soit un bon tiers de la population pointée deux ans auparavant.
Eviter les transfuges
L'écrevisse à pattes blanches fait partie de la liste rouge des espèces menacées en France. En Auvergne-Rhône-Alpes, on estime avoir perdu 60% de la population.
Tous les 15 jours, des spécialistes recensent les effectifs touchés et misent sur la prévention pour endiguer cette pandémie.
"On a caractérisé une zone qui définit la zone contaminée de la zone non contaminée en mettant des panneaux de manière à informer les pêcheurs qui viendraient sur le cours d'eau pour éviter qu'ils passent d'une zone à une autre et qu'un transfert de l'agent pathogène se fasse" rapporte Guillaume Chevalier, chargé de mission Natura 2000 - Parc naturel des Monts d'Ardèche.
Maintenir l'écosystème
La présence de l'écrevisse à pattes blanches témoigne de la bonne santé des rivières. Son extinction pourrait perturber l'ensemble de l'écosystème. "Sa disparition serait bien sûr une perte mais dans ce contexte-là, elle serait remplacée par une autre espèce qui, clairement si elle colonise ce milieu, risque de créer des déséquilibres biologiques importants et de le perturber fortement". Ce nouveau prédateur pourrait décimer d'autres espèces.
Les protecteurs de la nature poursuivent leurs investigations pour déterminer l'ampleur exacte du déclin de l'écrevisse à pattes blanches mais aussi l'origine de l'introduction de l'espèce exotique vectrice de cette peste. L'ordre de grandeur des pertes est aux environs de 80 000.