Un animal, qui pourrait bien être un loup, a été percuté par un train reliant Aurillac à Clermont-Ferrand vendredi 10 décembre dans le Cantal. Il est examiné à l’Office Français de la Biodiversité pour déterminer s’il s’agit ou non du prédateur. Cet accident relance le débat sur la présence du loup dans le Cantal.
Un animal qui pourrait bien être un loup a été percuté par un train Aurillac – Clermont-Ferrand le vendredi 10 décembre vers 21 heures, sur la commune de Ferrières-Saint-Mary, dans le Cantal. Pour l’heure, des analyses sont en cours pour savoir s’il s’agit bien d’un loup : « Le service départemental de l’Office français de la biodiversité (OFB) a procédé à la récupération du cadavre d’un grand canidé mâle, au passage à niveau SNCF. Selon toute vraisemblance, cet animal a fait l’objet d’une collision par un train. Les vérifications habituelles sont en cours (nécroscopie et recherche toxicologique). Cet animal a le morphotype d’un loup européen type « Abruse », espèce classiquement observée sur le territoire national. Des analyses génétiques, réalisées à partir des prélèvements, permettront de confirmer le statut de l’espèce et de fournir d’éventuelle information sur l’origine de cet animal », indique la préfecture dans un communiqué.
"C’est rare car c’est un animal agile"
La présence du loup dans le Cantal, en particulier dans les Monts du Cantal, est attestée depuis 2008, mais cela ne suffit pas pour affirmer avec certitude que l’animal sauvage percuté est bien l’un de ces loups : « On ne peut pas affirmer à 100% que c’est un loup, même si c’est probable. On arrive à tracer ces animaux donc le cas échéant, on saura d’où il vient. Vers l’Alagnon, on en a des traces, mais le loup bouge et se déplace beaucoup. Il n’est pas extraordinaire qu’on le retrouve dans la vallée en-dessous », explique Franck Bousquet, membre de la direction départementale des territoires du Cantal. Il s’explique difficilement cet accident : « Il a pu être ébloui par les phares. C’est rare car c’est un animal agile. Le train ne va pas aussi vite qu’une voiture, mais quand il roule à 60 km/h, dans un tournant, ça peut aller très vite. Peut-être qu’il a été surpris, peut-être qu’il était affaibli… Avec les analyses, on pourra sûrement dire ce qu’il en est. »
"C’est une belle bête de 44 kilos"
Surpris, le maire de cette petite commune Franck de Magalhaes l’est aussi. Il est convaincu qu’il s’agit bien d’un loup : « C’est une belle bête de 44 kilos, ce n’est pas vraiment la taille d’un chien. Le loup revient petit à petite dans le Massif Central et particulièrement dans le Cantal. Visiblement, ils se servent des voies de chemin de fer, ils suivent ces lignes pour agrandir leur territoire. Ce sont des animaux intelligents. Le pauvre diable s’est fait percuter de plein fouet ». Pas de présence connue sur la commune selon lui, il pense qu’il s’agit d’un loup venu en reconnaissance : « C’était peut-être un loup venu en reconnaissance. Je ne suis pas un spécialiste du loup mais je pense qu’ils agrandissent leur territoire. Ils essaiment comme des abeilles, je pense qu’ils cherchent de nouveaux territoires. Ça a permis de mettre en évidence la présence d’un animal bien précis. Après, il n’y a aucun danger. Le loup a peur de l’homme, il n’y a pas eu d’attaques chez nous… Ce sont des loups solitaires qui cherchent de nouveaux territoires. »
Des attaques recensées dans le secteur
Chez les agriculteurs, cette présence est bien connue, comme le rapporte le président de la Fédération départementale des exploitants agricoles Joël Piganiol : « On sait que dans le Cantal on a des loups présents. Ce sont des animaux très mobiles. Leur territoire n’est pas clairement identifié, malheureusement on le localise grâce aux attaques subies par les élevages ovins en particulier. On a eu des attaques sur Allanche, sur la vallée de l’Alagnon, donc le loup était déjà potentiellement présent sur le secteur. » Voici où se sont déroulées les attaques où la présence du loup n'a pas été exclue, recensées en 2021:
Pour lui, cet accident relance le débat sur le comptage des loups du Cantal : « On a la perception qu’il y a beaucoup plus de loups présents sur les territoires identifiés que ce que les comptages officiels nous donnent. Ce loup confirme qu’on a une légitimité à demander un comptage plus précis pour savoir à quel niveau on se situe. Notre rôle est de défendre les éleveurs qui peuvent être prédatés, ça engage derrière un niveau de prélèvement. Celui-là a été prélevé sans qu’on l’ait choisi mais on essaye de travailler sur la protection des troupeaux. »
"On se dit que c’est peut-être le loup qui a occasionné les attaques subies"
Pour Joël Piganiol, il faut pouvoir chasser les loups, qui représentent un danger : « Pour ceux qui ont pu subir des attaques sur ce secteur, j’imagine que ça peut être une forme de soulagement. On se dit que c’est peut-être le loup qui a occasionné les attaques subies. Ça fait un risque de moins pour les élevages concernés mais ça ne règle pas le problème de fond d’une présence avérée sur le Cantal. Il n’y a pas de satisfaction particulière, même si on estime qu’il y a trop de loups. » Il l’affirme, cet accident est le marqueur d’une montée en puissance de ce prédateur : « C’est déjà arrivé ailleurs, pas avec des trains je ne crois pas, mais avec des véhicules sur la route. Le loup n’a pas de limites en termes de cheminement. On le voit dans les zones où il y a des quantités de loups très importantes. Aujourd’hui, ils traversent les villages, ils passent à proximité des maisons sans peur. Le fait de trouver un loup auprès d’une voie ferrée ne me surprend pas, il ne se cantonne pas aux zones les plus reculées. »
Près d'une trentaine d'attaques
Il fait état de 2 loups identifiés dans le Cantal, un chiffre en-dessous de la réalité selon Joël Piganiol : « Nous, on est convaincus qu’il y en a plus que 2, ça peut être des animaux qui sont passés dans le Cantal et repartis. On a ce cas de figure, d’un loup qui a été identifié dans le Cantal puis repéré beaucoup plus loin dans les Alpes. » Il souhaiterait pouvoir réaliser un comptage partagé entre l’OFB, les chasseurs et le monde agricole pour obtenir l’autorisation de « prélever » des loups. En 2021, quelque 29 cas d’attaques où le loup n’est pas exclu ont été recensés par la préfecture du Cantal : 74 animaux ont été tués lors de ces attaques et 31 blessés.