Les réactions et les hommages des grands chefs continuent d'affluer après le décès hier samedi 20 janvier, de Paul Bocuse, à son domicile de Collonges-au-Mont d'Or, à l'âge de 91 ans.
"Il était un leader naturel, sur la photo il était toujours au milieu, mais ça se faisait naturellement. Et il avait une capacité unique à se renouveler, c'est un vrai rassembleur, il a fédéré la cuisine autour de lui, il aimait les cuisiniers", a ajouté le chef âgé de 67 ans.
"Lorsqu'il sortait, il mettait une casquette, prenait un panier. Il faisait lui-même la quête pour le personnel. Il aimait les jeunes, il aimait la vie, le contact avec les autres tout en étant très distant, toujours un peu à l'écart. Il était très dur à saisir."
"Il a fait sortir le chef de ses cuisines pour prendre la lumière"
Arnaud Lallement, chef triplement étoilé pour l'Assiette champenoise à Tinqueux (près de Reims) à l'AFP: "Dans la gastronomie française, il y a un avant Paul Bocuse et il y a un après Paul Bocuse. Il a tout révolutionné : il a fait sortir le chef de la cuisine pour aller vers les convives. Avant M. Paul, dans les années 1950, le cuisinier était au sous-sol et c'était le service qui avait tous les honneurs. M. Paul a inversé la tendance: le chef de cuisine est devenu LA personnalité du restaurant.
Il était d'une générosité extrême, il était passionné, avec son franc-parler, jamais avare d'une bonne anecdote. Il était vif".
" Monsieur Paul à l'origine du big bang de la cuisine "
Côme de Chérisey, président du guide gastronomique Gault & Millau ne tarie pas d'éloges : "Je salue celui avec qui Henri Gault et Christian Millau ont lancé la Nouvelle cuisine. Il a été à l'origine de ce big bang dans la gastronomie
française et mondiale". Philippe Etchebest, qui dirige la brasserie Le quatrième mur au sein du Grand théâtre de Bordeaux se sent orphelin. " On pensait que Paul Bocuse était éternel et on s'aperçoit que non. Paul Bocuse fait partie du patrimoine de la gastronomie, il fait partie des grands inventeurs et son empreinte restera indélébile. Il est une référence. Paul Bocuse, c'était un peu notre père à tous, notre référent : il a fait connaître la gastronomie à travers le monde. Donc merci. Merci pour votre engagement, merci pour votre professionnalisme, merci pour ce que vous avez donné aux autres. Merci Monsieur Paul".
Cyril Lignac, chef du restaurant Le Quinzième (1 étoile au Michelin), sur Twitter: "Merci Monsieur Paul pour tous ces bons moments passés ensemble, nos rigolades, tes conseils, ta bienveillance et les lettres de noblesse que tu as données à notre métier".
" Une cuisine de copain, compréhensible par tous, abordable"
François Simon, critique gastronomique compare Paul Bocuse au fondateur dela cinquième république. "C'était le général de Gaulle de la gastronomie. Lui -et Fernand Point- ont vraiment fait sortir les cuisiniers de la cuisine. Sa révolution fut de reprendre le pouvoir à la salle, de ne plus rester comme les faire valoir des restaurateurs.
Alors que les maîtres d'hôtel triomphaient, ramassaient les lauriers et les pourboires et leurs propres fiancées, lui et sa génération ont inversé le courant, en partant à la conquête du monde. Et ce, non seulement pour faire connaître la cuisine française, mais rapporter des idées, rameuter une nouvelle clientèle et découvrir aussi le statut de notables. Ils en épousèrent le style de vie, les moeurs, et les mêmes automobiles. Il n'y avait rien de moderne alors dans la cuisine de Paul Bocuse, à part sa salade de haricots verts qui déclencha la nouvelle cuisine de Gault & Millau, mais c'était surtout une cuisine de copain, compréhensible par tous, abordable; des plats que l'on dévorait (maintenant on les déguste) et qui renforça l'idée d'une communauté, du vivre ensemble".