C'est un record ! 32 jours sans pluies en France et un hiver particulièrement sec. Le manque de pluie inquiète les agriculteurs. Dans la Drôme, le déficit atteint par endroit 80 % au mois de janvier. Conséquence : certains exploitants sont déjà obligés d'irriguer.
A Montélimar, l’exploitation de Gilles Boerekamp, la terre est crevassée comme en plein été. En cette fin d'hiver, le sol argileux est fissuré par le manque d'eau. L'agriculteur doit irriguer ses cultures d'hiver pour ne pas perdre sa production de céleris branche, de brocolis et de salades. D'ordinaire, l'irrigation débute au mois d'avril sur son exploitation.
Irrigation, paillage, pose de bâches...
A la ferme du Pré Atout, le maraicher bio a développé des astuces. "On essaie d'installer du paillis entre les rangées pour garder l'humidité du sol. On installe aussi des bâches en toile pour garder une humidité sous les cultures. On essaie de mettre des solutions en place pour pouvoir garder l'humidité au maximum proche du sol et limiter l'apport d'eau", explique le jeune agriculteur drômois.
A quelques mètres des serres, dans ce champ, même problème. "Là, on peut essayer d'enfoncer son doigt, il n'y a pas possibilité de planter quoique ce soit", constate Gilles Boerekamp.
Cet épisode de sécheresse est d'autant plus inquiétant qu'il survient en hiver. Absence de pluies, hiver très sec, ces deux facteurs ont mis en péril le rechargement des nappes phréatiques, déjà épuisées par la sécheresse historique de 2022. A ce déficit de pluie s'ajoute une chaleur au-dessus de la "norme en France depuis douze mois d'affilée", selon Météo France. Le mois de février pourrait "être le treizième de cette série inédite" depuis les premières données fiables de 1947, ajoute Météo-France.
Tensions sur l'eau : vers des restrictions précoces ?
Si la pluie ne tombe pas assez d'ici le mois d'avril, Gilles Boerekamp devra également arroser son champ pour y planter des salades, des oignons et des courges. Irrigation précoce, pertes de récoltes à cause d'une chaleur excessive conjuguée à la sécheresse... les prix des produits pourraient en subir les effets. "Avec en plus les températures élevées de l'année dernière, si cela se reproduit, il y aura moins de rendement donc les prix plus élevés", prédit l'agriculteur.
Mais c'est sans compter sur les restrictions d'usage de l'eau qui pourraient intervenir très tôt dans l'année. Dès lundi prochain, Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique doit réunir des préfets afin de "prendre des mesures de restriction qui soient +soft+, dès le mois de mars, pour éviter de se retrouver dans des situations catastrophiques d'arbitrage" à l'approche de l'été.
Projets expérimentaux
Face aux sécheresses à répétition, la chambre d'agriculture de la Drôme pilote plusieurs projets expérimentaux visant notamment à économiser les ressources en eau. Dans le verger de la ferme expérimentale d'Etoile-sur-Rhône, un appareil permet par exemple d'apporter la bonne quantité d'eau, au bon moment.
"En fonction des besoins en eau, la plante va se gorger d'eau, gonfler ou se rétracter lors de stress hydriques. Ces appareils permettent de mesurer ces micro-variations de diamètre des arbres et d'apporter l'eau au plus près des besoins physiologiques des arbres. Ce qui nous permet d'économiser de l'eau sur nos systèmes", explique Clément Bardon, Docteur en Ecologie et Responsable de cette ferme expérimentale.
Autre expérience en plein champ, des plantations de haies et d'arbres qui ont vocation à protéger les cultures du vent et du soleil.
Autant de solutions qui devraient petit à petit se développer face aux épisodes de sécheresse, de plus en plus précoces et intenses.
Avec G.Chaine et M.Redortier