Dans la Drôme, c'est la saison de récolte. Première passe pour les fruits abîmés et éclatés chez Wilson Feschet. Depuis une dizaine d'années, la grenade se plaît dans le sud du département et la production est en pleine croissance.
Une grenade bien mûre, au jus écarlate qui coule dans la gorge tandis que les petits grains noirs craquent sous la dent. Un plaisir... et un peu de culpabilité quand on sait que celles que l'on achète proviennent de Turquie, d'Israël et d’Espagne. Mais la France et la Drôme ont une carte à jouer. Culture de diversification pour les viticulteurs et les arboriculteurs, sa production est en hausse dans le département.
Une culture ancienne
En France, on estime qu'il y aurait environ 600 hectares plantés dans le grand sud (Provence Alpes Côte d’Azur, Occitanie et Nouvelle Aquitaine). 80 % sont bio. L'arbre y est pourtant présent depuis l'époque romaine, surtout la Punica granatum Provence qui tolère les températures basses jusqu'à - 12°C.
C'est seulement depuis une dizaine d'années que sa culture a été relancée dans un objectif de diversification des cultures (autres arbres fruitiers et vigne) et pour faire face au réchauffement climatique.
On lui prête de nombreuses vertus antioxydantes, anti-inflammatoires, antibactériennes, antidiabétiques et anti-âge. Sa culture est économique en eau.
Le climat de la Drôme est adapté
Wilson Feschet produit de la grenade depuis six ans. Vigneron d'origine, il a diversifié son activité pour avoir plus de débouchés. Le ramassage et la taille en gobelet sont similaires à la vigne. Installé à Bouchet, dans le sud de la Drôme, il profite de bonnes conditions météo. "L'idéal pour faire pousser le la grenade, c'est d'avoir du soleil, un climat qui n'est pas trop changeant. Il ne faut pas trop de vent, ni trop d'humidité pour les fleurs. Il faut surtout un équilibre toute l'année" explique-t-il.
En cette fin septembre, la récolte commence. Il faut éclaircir les arbres, les fruits abîmés sont prélevés et seront destinés au jus et aux produits transformés. Les fruits intacts vont encore grossir, mais Il faut être vigilant, l'excès d'eau fait éclater le fruit.
Wilson constate une appétence grandissante pour le fruit tant au niveau du consommateur qu'au niveau de la cosmétique. Il vend ses fruits et ses jus aux épiceries et l'huile de pépins à la parapharmacie, un secteur qu'il souhaite développer.
Un produit zéro déchet, mais qui reste cher
Une grenade coûte en moyenne 2 à 3 € pièce en magasin. Ce qui correspond au prix auquel le grossiste paie le kilo au producteur. Les marges du circuit de distribution du fruit sont responsables de cet écart de prix. "Une grenade coûte cher aussi parce qu'une grenade qui est acceptable par le consommateur doit être jolie. Dans un verger, on a une grosse majorité des fruits qui ne sont plutôt pas très esthétiques, et néanmoins très bons" déplore Alexandre Bameule, membre fondateur du Syndicat France Grenade. Cette exigence réduit considérablement le volume de fruits disponible à la vente.
Dans la grenade, on récupère tout. Les grains, les pépins, la peau intérieure et extérieure.
Alexandre Bameule,Syndicat France Grenade
Les fruits moches ou hors calibre représentent soit 80 % de la production. Ils ne sont pas perdus pour autant. Ils sont transformés en jus et en produits dérivés. Il faut au moins 9 fruits pour 1 litre de jus. Avant, tout le fruit était pressé, aujourd'hui, on ne presse que les grains. "La peau de grenade, le péricarpe à l'extérieur et endocarpe à l'intérieur, est destinée aux cosmétiques. Avec les pépins, on fait de l'huile (utilisée également en cosmétique)" détaille Alexandre Bameule. La peau sert aussi de teinture naturelle. Les déchets sont revalorisés en tourteaux pour l’alimentation animale.
Un fruit d'avenir
La production française s'étend aujourd'hui sur 5 à 600 hectares et représente 3 000 tonnes de grenades. "On s'attend à ce que les vergers soient en pleine production en 2026, avec un potentiel de 6 000 tonnes" annonce la plateforme mondiale d'informations sur les produits frais Fresh Plaza.