En Auvergne-Rhône-Alpes, les habitants de la Drôme ou du Vercors sont habitués à sa présence, mais il patrouille aussi ailleurs dans la région. La réintroduction réussie du vautour réjouit les défenseurs de cette espèce protégée. Pourtant, pour certains agriculteurs, son ombre est menaçante.
« On a peur que ça se reproduise » : à Saint-Beauzire, près de Brioude (Haute-Loire), Justine Fournier, agricultrice, crie sa détresse. Elle en est convaincue, un veau de son cheptel, d’une vingtaine de mères, a été attaqué par des vautours : « Il y a 15 jours de ça, mercredi (NDLR : le 29 septembre), on était partis pour charger le troupeau. Normalement, on a 12 veaux qui viennent avec les vaches. Après avoir recompté plusieurs fois, il nous en manque un à l’appel. On fait le tour de la parcelle et on trouve le squelette du veau. On s’est posé pas mal de questions », affirme l’éleveuse.
En inspectant les lieux avec son conjoint, ils désignent alors un coupable : « En y regardant de plus près on a trouvé beaucoup de fientes et des plumes. Toute l’herbe était écrasée autour de la carcasse. Pour moi, il a été attaqué directement. La veille, le veau allait très bien, c’est quand même très peu probable qu’il soit mort avant. C’est très inquiétant. C’est assez difficile comme ça. Un broutard, on met 9 mois avant de pouvoir le vendre. C’est déjà très difficile, le marché de la viande en ce moment, si sur ce peu de revenu qu’on a, on a encore des prédateurs qui se mettent dessus, ça nous fait une perte. On n’a pas de moyen de lutter contre ça. On aimerait que les gens aient plus conscience que le vautour peut attaquer », alerte Justine Fournier.
En Haute-Loire, en juin 2020, dans le village de Saugues, une des vaches du troupeau du Gaec de Pruneloux avait déjà été retrouvée morte. Une centaine de vautours se trouvaient sur elle. L'agricultrice avait alors pointé du doigt les oiseaux, qui se seraient selon elle attaqué à la bête encore en vie : "On ne dit pas qu'ils ont tué notre vache, elle devait être en train de vêler et ils ont dû profiter de ce moment pour s'attaquer à elle. Il y avait plein de coups de griffes. Elle saignait encore donc elle ne devait pas être morte quand ils se sont attaqués à elle".
L'agricultrice avait reçu le soutien des jeunes agriculteurs de Haute-Loire, qui s'étaient rendus sur place.
Des interventions avant la mort
Ces agriculteurs qui pointent du doigt le vautour ne sont pas des cas isolés. En effet, selon le ministère de l’Ecologie, dans un rapport daté de 2016, on compte « autour de 60 à 70 plaintes par an sur l'hexagone ». Parmi les 170 cas expertisés, 65 (37%) ont fait état d'une intervention ante mortem du vautour fauve. Plus d’un tiers donc, mais le rapport nuance : « Dans 84% de ces 65 cas, le vautour est intervenu sur des animaux condamnés ou des bêtes vulnérables en incapacité à se mouvoir – conséquence de blessures, complications post-partum ou encore pathologies –, dont l'état préoccupant nécessitait une intervention humaine urgente. Dans ces conditions, les vautours vont alors faire preuve d'opportunisme, et consommer l'animal encore vif. »
Le rapport se veut rassurant envers les agriculteurs : « En l'état actuel des connaissances, on peut estimer à une vingtaine le nombre de cas d'interactions ante-mortem par an sur le territoire français. S'il ne faut pas négliger les conséquences de ces quelques cas à l'échelle des exploitations touchées, l'espèce ne peut être qualifiée de facteur de détérioration économique pour la profession, au regard notamment de la mortalité naturelle au sein des élevages. »
Le nombre d'individus en augmentation
Tiphaine Lyon, chargé d’études rapaces à la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux), constate une présence renforcée de ces oiseaux sur la région : « En Auvergne, depuis une dizaine d’années, on a une augmentation des observations de vautours. On ne peut pas parler de surpopulation. Il y a des oiseaux immatures mais aussi des adultes qui viennent patrouiller jusqu’en Auvergne. C’est une terre où il y a énormément d’élevage et donc ils vont pouvoir trouver des cadavres en quantité. Chaque année, les groupes sont un peu plus importants mais en Auvergne, ils ne sont pas nicheurs, seulement patrouilleurs. » Si en Auvergne, aucune espèce de vautour ne niche, il y a bien une présence liée à la ressource alimentaire. En revanche, en Auvergne-Rhône-Alpes, le vautour s’est établi dans d’autres territoires. La LPO liste une colonie dans la Drôme d’environ 300 couples et une colonie dans le Vercors d’environ 150 couples.
"Quand vous êtes éleveur, tout est remis en cause avec la présence du vautour"
De plus en plus d’interactions éloignées des colonies sont recensées, selon Laurine Rousset, présidente des JA (Jeunes Agriculteurs) de Haute-Loire : « L’an dernier, on ne sait pas si c’est à cause du COVID ou des placettes qui n’ont pas été alimentées, on a recensé bon nombre d’interactions entre les troupeaux ovins, bovins et les vautours. C’est quelque chose qui nous a rapidement interpellés et inquiétés. Pour un souci de bien-être animal, on sort les troupeaux, on fait agneler et vêler dehors parce que c’est plus confortable. Quand vous êtes éleveur, tout est remis en cause avec la présence du vautour. Il y a un veau qui a été mangé, un éleveur qui a sauvé in extremis un agneau pendant que la brebis était en train d’agneler. Ce sont des phénomènes qui ne sont pas normaux ». Ces interactions sont apparues, selon elle, très récemment : « C’était quelque chose qui était inconnu il y a un an ou un an et demi. On n’avait pas connaissance d’interactions possibles entre les élevages et les vautours. Il est vrai que sur Saugues, étant donné que c’est à proximité de la Lozère et qu’ils ont des placettes mises en place pour les vautours, il arrivait qu’on en voie quelques-uns qui planaient mais on n’avait jamais recensé d’interactions. » En Haute-Loire, les JA ont recensé 5 interactions en 2020, et une en 2021. Le Puy-de-Dôme et le Cantal sont également concernés.
Le vautour vecteur de maladies ?
Dans le Puy-de-Dôme, le retour du vautour inquiète pour d'autres raisons les agriculteurs, selon la présidente de la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d'Exploitants Agricoles) du Puy-de-Dôme, Sabine Tholoniat. Dans le département, elle a connaissance d'une interaction ante-mortem avec une vache en train de vêler l'an dernier. Pour autant, la crainte principale ne vient pas des attaques mais plutôt des maladies : "Le questionnement est de savoir s'il ne pourrait pas emmener des toxines ou des maladies sur ses pattes ou sur ses plumes dans des endroits où il pourrait éventuellement se poser et les déposer plus loin. Nous on a les AOP du secteur en lait cru, il faut qu'on soit vigilants sur les questions sanitaires." A cela s'ajoutent d'autres craintes pour la santé du bétail : " L'inquiétude que l'on a, c'est qu'ils font peur aux troupeaux. Ils les effarouchent et peuvent provoquer des blessures ou des stress cardiaques qui peuvent conduire à des attaques. Aujourd'hui, on n'a aucune étude sur ces phénomènes-là". Pourtant, pour la LPO, le vautour est un bouc-émissaire et ne transmet pas de maladies, comme le rappelait début septembre Anthony Marque, chargé de mission LPO du Cantal à propos de la maladie du charbon : "Le vautour ne bouge pas le cadavre. Ses sucs gastriques sont les plus puissants au monde et ils sont capables d’éliminer toute bactérie et toute maladie. En consommant les cadavres sur place, le vautour est un allié pour la disparition de ce charbon symptomatique. C’est en fait un coup de pouce. De nombreuses revues scientifiques l’attestent. "
" Il y a peu de chance qu’il niche en Auvergne"
A la LPO, Tiphaine Lyon connait bien le comportement des vautours : « Le vautour fauve est un oiseau grégaire. Il vit en colonie et fait absolument tout en colonie. Les vautours forment des dortoirs, à plusieurs dizaines d’individus. Ils nichent dans les falaises avec parfois des nids qui sont très proches, à seulement 1 mètre de distance. Ils recherchent la nourriture en groupe. Ils patrouillent un secteur. Un vautour fauve est capable de voir un objet de 30 cm à 3 km. Imaginez qu’un congénère de 3 mètres, il le voit de très loin. Ils patrouillent en étant éloignés de quelques kilomètres. Lorsqu’un oiseau va trouver une carcasse et va commencer à descendre pour aller la consommer, les autres vont voir son comportement de descente et petit à petit arriver sur la carcasse les uns après les autres. On peut se retrouver avec des groupes assez importants. » Ainsi, peu de chance de voir un jour naître des colonies, car le secteur n’est pas adapté : « Il y a peu de chance qu’il niche en Auvergne. Ça pourrait arriver mais ce ne serait pas des centaines de couples ».
Quatre espèces de vautour
Dans la région, on retrouve 4 espèces de vautour, selon la LPO : le vautour fauve qui s’attaque aux parties tendres, le vautour moine, friand de parties cartilagineuses, le percnoptère, spécialisé dans le nettoyage des interstices et le gypaete qui, lui, se nourrit des os.
Le vautour a un rôle écologique fort. Appelé « éboueur » de la nature, il permet de débarrasser la nature des cadavres et éviter la propagation de maladies. Le fondateur du parc des "Aigles du Léman" Jacques-Olivier Travers, fauconnier, constate : « Dans nos montagnes, on a le vautour fauve, qui vient majoritairement d’Espagne et de France, qui vient passer l’estive chez nous et repart. On a le gypaete barbu qui est réintroduit depuis 40 ans bientôt et qui lui, est sédentaire et vit toute l’année chez nous. On a quelques vautours moines qui sont, eux, en déplacement et qu’on aperçoit de temps en temps. Ce sont les 3 types de vautour qu’on observe dans les Alpes du nord. »
Un "service gratuit et naturel d’équarrissage"
L’oiseau est capable de dépecer un cadavre en quelques heures. Jacques-Olivier Travers insiste sur le rôle clef joué par le vautour dans les écosystèmes : « Il est indispensable. Il offre un service gratuit et naturel d’équarrissage qu’on a été obligés de faire en France pendant des années, où il n’y avait plus de vautour. C’est totalement idiot, ce n’est pas écologique, c’est une perte de temps et d’argent. Le vautour, par son retour, offre ce service-là. Il est au sommet de la chaîne alimentaire. Il évitera toutes les maladies qui peuvent se développer autour d’une carcasse, dans une rivière ou autre. C’est un oiseau très intéressant. »
"On ne veut pas être un département qui héberge ou élève des vautours"
Pourtant, le vautour a mauvaise presse. En Savoie, un arrêté préfectoral autorisant l'effarouchement des vautours a été pris en 2015, à la demande des représentants agricoles locaux sur une période réduite de 4 mois et dans des situations où le comportement du vautour fauve était jugé "inhabituel" ou "déviant". L’éventualité de voir, à long terme, se former des colonies en Auvergne est une perspective inquiétante pour Laurine Rousset, des Jeunes Agriculteurs de Haute-Loire : « Nous, en Haute-Loire, on n’a pas envie d’avoir de placettes, car on ne veut pas être un département qui héberge ou élève des vautours. Mettre des placettes, ça veut dire qu’on les alimente, et ça veut dire que toutes les conditions sont réunies pour qu’ils prolifèrent. On n’est pas contre le vautour mais on ne veut pas faire son élevage non plus. Déjà qu’on n’est pas nombreux en tant qu’éleveurs, si en plus ça devient compliqué pour mettre les animaux dehors, on ne va pas s’en sortir. » Voici où les vautours se situaient en 2014 :
Une mauvaise image liée à la mort
Le fauconnier Jacques-Olivier Travers explique cette défiance par le caractère effrayant de l’animal : « Il y a les images où effectivement, le vautour est l’animal qui tourne autour de la mort. Il l’incarne et donc on l’aime moins. Cette image-là est quand même en train de disparaître. On a bien compris que dans la nature, il y avait des chasseurs, des charognards et que tous avaient une utilité. » Une mauvaise presse que regrette également Tiphaine Lyon de la LPO : « On a l’impression de retourner au XIIème siècle, avec les légendes comme quoi le Gypaete Barbu enlevait les enfants. C’est de la peur, de la méconnaissance, alors que le vautour est un allié pour les éleveurs ».
Le vautour, de charognard à prédateur ?
Mais les éleveurs ne sont pas de cet avis , selon Laurine Rousset, présidente des Jeunes Agriculteurs de Haute-Loire, qui est convaincue que le vautour peut causer la mort du bétail : « On sait que les vautours, quand ils sont affamés, sont capables d’attaquer. Quand c’est un bovin, comme on n’est pas auprès des bêtes en permanence, c’est dur de déterminer s’il y a eu une attaque », concède-t-elle. Le spécialiste Jacques-Olivier Travers confirme : « Aujourd’hui, le problème se situe dans le retour massif du vautour fauve qui pose des problèmes dans l’activité humaine avec le pastoralisme ou l’élevage d’animaux. On l’accuse depuis quelques années de ne plus se contenter d’un rôle de charognard mais de précipiter la mort pour en faire une charogne, de tuer des proies et de les manger après. Ça déclenche des polémiques, des passions. Moi, je pense qu’il faut rester très mesuré. »
"La nature ne les a pas fait pour attaquer des proies"
Pourtant, à la LPO, Tiphaine Lyon est formel : il n’est pas possible que le vautour s’attaque au vivant. « Anatomiquement, le vautour, que ce soit le fauve ou les 3 autres espèces, n’est pas armé pour attaquer. Déjà il n’attaque pas, il consomme une proie. C’est un abus de langage. Les vautours sont armés pour consommer des cadavres. Un vautour fauve fait 10 kilos, a des espèces de grosses pattes de poule qui ne peuvent pas attraper quoi que ce soit, n’a aucune force dans les pattes… C’est un oiseau extrêmement massif, extrêmement lent, qui a un vol très lourd. Ils ne sont pas armés pour poursuivre des proies en vol. Ils ont un bec relativement puissant pour entailler le cuir des carcasses mais ce n’est pas un aigle. Ils n’ont pas de puissance dans les serres, pas d’agilité en vol, la nature ne les a pas fait pour attaquer des proies ». Un point de vue nuancé par l’expert des « Aigles du Léman » Jacques-Olivier Travers : « Moi je ne suis pas un angéliste. Je pense que les vautours, s’ils ont vraiment très faim, peuvent commettre de temps en temps des actes de « prédation ». Il ne faut pas dire que ça n’existe pas car il y a des éleveurs qui ont vécu ces choses-là et il faut essayer de les comprendre. »
"Il peut changer son comportement"
Il ajoute : « Je pense que tout animal, lorsqu’il a un problème de ressource alimentaire, il peut changer son comportement. On a des ours affamés qui vont faire les poubelles des hommes, ça n’existait pas quand il y avait une ressource alimentaire suffisante dans la nature. Les vautours sont-ils capables d’aller commettre des actes de prédation ? Honnêtement j’ai l’idée que c’est possible mais je n’en ai aucune certitude. Il faudrait que les scientifiques passent du temps sur le terrain. Il faut être modeste, on pense qu’on connaît tout sur ces animaux mais on a vécu pendant ¾ de siècle sans voir ces oiseaux. On ne sait pas comment ils s’adaptent à ce nouvel environnement ». On constate que dans une large majorité des interactions ante-mortem, l’animal était déjà agonisant ou affaibli, selon le ministère de l’Ecologie.
"Le vautour est absolument incapable de faire ça"
Des témoignages confirment que le vautour s'attaque parfois aux animaux vivants. Le spécialiste Jacques-Olivier Travers se souvient : « Il y a très longtemps, je faisais un film en Georgie et j’interviewais une grand-mère qui vivait dans un alpage sans eau, sans électricité. Derrière, il y avait un vautour qui était en train de manger un agneau juste après l'agnelage. Je l’ai vu de mes yeux. On ne peut pas dire que ça n’existe pas aux éleveurs, c’est leur faire insulte. » Des témoignages qui ne convainquent pas Tiphaine Lyon, de la LPO : « On n’a jamais reçu de vidéo de bête en train de courir et tout d’un coup, 100 vautours lui tombent dessus. Cette preuve, on l’attend avec impatience car a priori, le vautour est absolument incapable de faire ça. C’est une méconnaissance du comportement du vautour qui fait que les agriculteurs crient aux attaques. Chez nous, c’est un oiseau qui est revenu tout seul donc les agriculteurs n’ont pas été informés ni accompagnés. Ils ne connaissent pas cet oiseau qui peut être très impressionnant, qui fait un bruit d’épouvante, qui peut faire peur ». Pour lui, d’autres explications sont envisageables : « L’année dernière, il y a eu beaucoup de cas lié au charbon symptomatique, une maladie foudroyante pour l’animal. Elle a tué énormément de bétail l’année dernière et on a collé ça sur le dos du vautour. Notre point de vue ce n’est pas de dire que ce sont des menteurs, mais leur expliquer, faire de la prévention, les accompagner et voir avec eux comment s’est passé le cas litigieux. »
Un protocole en cas d'interaction
Pour en savoir plus sur le comportement des vautours, les interactions sont recensées et expertisées, explique Tiphaine Lyon : « Suite à des plaintes d’éleveurs, il y a eu des constats qui ont été réalisés par des vétérinaires et des ONB (NDLR : Observatoires Nationaux de la Biodiversité). Dans 4 ou 5 cas, sur plus de 200 constats, les vétérinaires ont dit qu’il y avait eu consommation de la bête ante mortem. S’il y a eu une interaction de ce type, c’est une bête qui était perdue et qui était à l’agonie. Un vautour, sur une bête saine, ne peut absolument rien faire du tout ». Cet accompagnement a été réclamé notamment par les éleveurs, comme le raconte la présidente des JA Laurine Rousset : « On fait des réunions avec tous les départements de la région Auvergne-Rhône-Alpes et Occitanie qui sont touchés par ces interactions. On s’est rapprochés aussi de la DDT (Direction Départementale des Territoires) et de l’OFB (Office Français de la Biodiversité). Il y a une convention qui a été faite pour chaque département. Dès lors qu’une interaction est recensée, l’éleveur se rapproche de l’OFB qui doit se déplacer ou recueillir des informations par téléphone auprès de l’éleveur. Il fait ensuite intervenir des vétérinaires agréés pour expertiser les cadavres et voir si l’animal a été attaqué ou pas. »
"On se doit de protéger les animaux"
Pourtant, ce système ne fonctionne pas à tous les coups. L’agricultrice de Saint-Beauzire Justine Fournier, qui a retrouvé le squelette de son veau dans son pré, n’a pas pu en bénéficier : « On a voulu faire expertiser le veau mais personne ne s’est déplacé. On n’a pas été bien écouté. On aurait aimé que quelqu’un se déplace pour constater ça. On nous prend pour des affabulateurs, on n’a aucune raison de mentir là-dessus. On a appelé la DDT qui nous avait dit que quelqu’un de l’OFB allait se déplacer et personne n’est venu car apparemment ils ne pouvaient rien faire, car il ne restait que le squelette. Notre vétérinaire ne s’est pas déplacé non plus. On a fait plusieurs démarches, sans succès ». Pas d’indemnisation non plus pour l’éleveuse car selon elle, le vautour n’est pas considéré comme un nuisible. Sa situation n’est pas un cas isolé et les JA de Haute-Loire, par le biais de leur présidente, réclament des solutions : « Si tout le monde est juste, s’il y a une interaction qui s’avère être une attaque et que c’est prouvé et démontré, la moindre des choses serait quand même que l’éleveur soit indemnisé. Si ça devenait plus fréquent, des tirs d’effarouchement pourraient être mis en place. Si le problème prend de l’ampleur il ne faudra pas traîner à prendre de décision. On se doit de protéger les animaux. » Pour cette espèce, qui fait l'objet d'un plan national d'action, l'effarouchement est très encadré.
Une espèce protégée
La présidente de la FNSEA du Puy-de-Dôme Sabine Tholoniat va plus loin et demande une régulation de l'espèce par la chasse : " Ce que l'on souhaite, c'est que si on voit des animaux qui ont des comportements déviants, par exemple qui s'approchent trop près des animaux en bonne santé, on veut pouvoir tirer ces animaux. On a un développement de population d'un animal qui n'a pas de prédateur. La LPO nous dit qu'il faut que les troupeaux s'habituent mais d'ici là combien de bêtes seront blessées ou apeurées ? On ne peut pas toujours vivre avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête". Le ministère de l’Ecologie reconnaît quant à lui certaines difficultés : « L'impact d'une intervention de vautour fauve sur un animal vivant est réel pour l'éleveur, tant sur le plan psychologique que financier. La perte d'un ou plusieurs animaux est à la fois synonyme d'échec dans la protection du troupeau et de perte financière (coût intrinsèque de l'animal et éventuelle perte d'un reproducteur sélectionné), qui peut être équivalente à plusieurs mois de salaire dans le cas d'un bovin. » Pour rappel, les 4 espèces de vautour sont protégées au niveau national par l'arrêté du 29 octobre 2009, fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection.