Elles vous paraissent vieillottes, c'est pire: elles sont obsolètes. Les consignes indiquant la systématisation du bouche à bouche et la proscription du massage cardiaque n'existent plus depuis des années. Autrement dit, si quelqu'un s'électrocute, ces schémas ne vous permettront pas de le sauver.
"Ces consignes sont totalement obsolètes"
Patrick Pelloux, médecin et président de l'Association des médecins urgentistes de France (Amuf), confirme: "Ces consignes sont totalement obsolètes. On ne craint rien à faire un massage cardiaque, même mal fait. Pratiquer ce massage est capital, il conditionne la vie de la personne." En effet, on remarque que chaque fois, dans les consignes dictées par la Croix-Rouge, le Samu, dans les formations de secourisme, le massage est essentiel. Il est préconisé à raison de 30 compressions pour deux ventilations.Des vidéos montrent même comment procéder:
Des méthodes abandonnées dans les années 80
Les affiches conseillent, elles, d'appliquer la méthode Sylvester (p.18-19) qui consiste à bouger les bras de la victime pour faire varier la taille de sa cage thoracique et reproduire ainsi les mouvement d'inspiration et d'expiration. Une méthode née en 1858 qui n'est plus enseignée depuis des décennies. Le professeur Jean-Philippe Baguet, cardiologue au Groupe hospitalier mutualiste de Grenoble, se rappelle: "J'étais étudiant en 1982, et on ne nous enseignait déjà plus cette méthode. Elle n'est pas très efficace. On ne s'assure même pas que le patient ait la bouche ouverte pour que la ventilation fonctionne. De plus, il y a un risque que la langue parte en arrière et que le patient s'étouffe."Autre erreur de ces affiches: la ventilation justement. " La systématisation du bouche à bouche indiquée sur les affiches EDF n'est plus préconisée de nos jours", observe Patrick Pelloux. En effet, depuis une dizaine d'années, la fréquence conseillée est seulement de deux ventilations pour 30 compressions. Le professeur Baguet renchérit: "Pratiqué trop fréquemment, le bouche à bouche augmente la pression intrathoracique ce qui n'est pas bon. En plus, il est pratiqué au détriment du massage, donc c'est néfaste pour la victime." Henri évoque également l'absence d'une quelconque allusion au défibrillateur, pourtant essentiel de nos jours. Patrick Pelloux avoue qu'il préférerait que ces plaquettes soient retirées: "Il vaut mieux pas d'informations, qu'une fausse information. Les gens ont un portable, ils ont le réflexe d'appeler les secours, et c'est préférable!"
Henri n'est revient pas et prend des photos de ces affiches un peu partout, en Isère, en Savoie, dans le Vaucluse... elles sont devenues sa bête noire. On aperçoit ainsi que sur certaines, les numéros de téléphone inscrits comportent seulement six chiffres (photo 2 du diaporama), une numérotation abandonnée en France depuis 1985. Heureusement, les numéros des secours, eux, n'ont pas changé. D'autres sont devenues illisibles (photo 4 du diaporama) ou inaccessibles. "Une fois, j'ai vu un transformateur flambant neuf ouvert. Les consignes n'étaient plus sur la porte mais à l'intérieur. C'est n'importe quoi ", s'insurge le retraité.
Reportage de Joëlle Ceroni, Didier Albrand et Azzedine Kebabti