Le 31 mai 2021 prenait fin la trêve hivernale et les associations craignent également la période. De nombreuses procédures sont encore en cours du fait du peu d’expulsion en 2020 et les nouvelles directives gouvernementales ne sont font pas encore l'objet d'un plan d'action claire.
« On y pense tous les jours. C’est que du stress et de la tension », explique Pascal*, habitant de Montanay dans le Rhône. Depuis plusieurs, sa compagne, son enfant et lui sont sous le coup d’une menace d’expulsion suite à des loyers impayés. L’engrenage s’est engagé lorsque Pascal accumules des dettes, une « erreur » selon ses mots, atteignant 10 000 euros.
En avril 2021, Pascal a perd son emploi suite son emploi suite à un accident du travail. Licencié pour incapacité, ses indemnités lui permettent de rembourser une grande partie de ses dettes et de proposer une solution d’étalement à son bailleurs sur quatre mois pour rembourser le reste de sa dette. Pascal garde espoir car il estime « avoir été honnête » et espère pouvoir rapidement sortir de cette situation. Malgré cela, son foyer risque potentiellement tous les jours de voir un huissier arriver leur pour leur ordonner de quitter leur domicile.
2020, année quasi blanche
La situation de Pascal et sa famille est loin d’être isolée. Elles sont même de plus en plus nombreuses. Du fait de la crise sanitaire actuelle, « 41 expulsions ont été actées en 2020 sur 734 concours de la force public (décision judiciaire d’expulsion ndlr . Cela signifie qu’il existe un stock de procédures en court très élevé », explique Dalida Boukacem, chargée de mission à l’Alpil, une association d’aide au logement qui œuvre directement au contact des personnes.
A cela s’ajoute un autre élément préoccupant pour les associations. Avec nouvelle la nouvelle directive gouvernementale du 26 avril 2021, des plans d'action doivent être mis en place par les collectivités locales pour éviter toute expulsions sans solution de relogement ou d'hébergement.
« Le souci c’est que pour la mise en oeuvre, rien n'est encore claire. Les différents acteurs, que ce soit l'état, les collectivités locales, les bailleurs sociaux et privés doivent encore définir clairement leur plan d'action. Cela complique grandement notre travail »
D’autant plus que la loi est déjà non respecté : « il y a déjà eu une expulsion sans solution d’hébergement depuis la fin de la trêve », dénonce-t-elle.
Des chiffres en hausse
Une situation que relève également la Fondation Abbé Pierre, qui lutte également contre le mal-logement. « Si on note qu’il y a moins d’assignation au tribunal, il y a un plus grand taux de décision d’expulsion », relève Véronique Gilet, directrice de l’agence Rhône-Alpes. « Cela s’explique en parti car il y a moins de représentation au tribunal. Les foyers étant en situation de plus en plus précaire, ils ne peuvent pas toujours se libérer pour se défendre face au juge. »
Autre raison : l’explosion des prix de location dans le parc privé. « Il est de plus en plus compliqué de trouver des solutions de relogement. Il y a encore deux ans, sur Lyon et Villeurbanne il existait encore des surfaces de location privés aux même prix que le parc social, maintenant c’est fini, le
privé est trop cher », déplore Véronique Gilet. Conséquence : le ratio du nombre demande de logement sociaux/ proposition d’une offre est passé e 1 pour 5 à 1 pour 7, allongeant le délai d’attente avant de se voir proposer quelque chose.
Vigilance accrue
La directrice de l’agence Auvergne-Rhône-Alpes tire même la sonnette d’alarme. « Entre les stocks de procédure, les difficultés pour se reloger l’augmentation de la précarité, les conséquences de la crise actuelle ne sont certes pas encore quantifiables, mais seront bien là », avance Véronique Gilet. « Cette année va être particulière, on va devoir être très vigilants », prévient-elle.
A Montanay, si Pascal a bon espoir de voir sa situation se décanter, l’envie de changer d’air est bien là. « J’ai fait une demande pour avoir un nouveau logement. Déjà, je ne suis pas sûr que mon bailleur m’autorise à prolonger mon bail actuel même si j’ai réglé toute ma dette mais aussi parce que j’ai envie de changer d’environnement. » L’heure pour lui et sa famille de prendre un nouveau départ.