Le pape catholique François est arrivé jeudi matin à Genève pour promouvoir le dialogue et l'unité avec ses "frères" protestants et orthodoxes, une priorité de son pontificat nourrie par les violences ciblant sans distinction des chrétiens dans certaines régions du monde.
Dans l'avion qui le menait à Genève, le souverain pontife a dit: "ceci est un voyage vers l'unité".
Le chef des 1,3 milliard de catholiques, le plus célèbre porte-voix des chrétiens, a accepté une invitation du Conseil oecuménique des Eglises (COE), qui fête ses 70 ans et représente avec 350 églises membres quelque 500 millions de protestants et d'orthodoxes.
A Genève, terre du théologien et réformateur français Jean Calvin, le pape embrassera donc au sein du COE la galaxie mondiale chrétienne actuelle, dont des luthériens, des anglicans ou encore l'importante mouvance évangélique.
Pour Olav Fykse Tveit, un pasteur luthérien norvégien qui préside le COE, la venue du pape constitue "un espoir" car elle montre "que même des divisions et des conflits profonds peuvent être surmontés à travers le dialogue".
Certes, "il n'est pas difficile de trouver des sujets qui divisent toujours les chrétiens", comme des questions sur la sexualité, a-t-il confié à l'AFP avant l'arrivée du pape. Mais "beaucoup de chrétiens, qu'ils soient catholiques ou non, le voient comme une voix forte qui exprime ce que nous voulons dire", a-t-il souligné.
Le pape François a incontestablement voulu focaliser son 23ème voyage à l'étranger sur l'unité des chrétiens, même s'il se trouvera non loin d'organisations dédiées à certains de ses thèmes phares, tel le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ou encore l'Organisation internationale du travail.
Le rapprochement entre chrétiens est inscrit dans les préoccupations de l'Eglise catholique depuis seulement une soixantaine d'années et son fameux concile Vatican II (1962-1965), qui avait appelé au respect mutuel entre religions et renoncé à proclamer l'Eglise catholique comme seule détentrice de la façon de vivre le christianisme. Une goutte d'eau dans une histoire bi-millénaire marquée par des schismes, de sanglantes guerres de religions en Europe et des haines tenaces.
Rapports apaisés
Les rapports désormais plus apaisés avec les orthodoxes et les protestants s'inscrivent dans le contexte d'une déchristianisation galopante en Europe ainsi que des persécutions ou attaques terroristes à l'encontre des chrétiens notamment au Moyen-Orient.Le pape François a employé à plusieurs reprises l'expression "oecuménisme du sang", en déplorant l'assassinat sans distinction de catholiques, orthodoxes ou protestants.
"Si l'ennemi nous unit dans la mort, qui sommes-nous pour nous diviser dans la vie?", a-t-il dit.
François doit prendre part notamment jeudi matin à Genève, au côté de 230 participants, à une "prière oecuménique", accompagné dans la chapelle du Centre oecuménique de Genève par une femme, l'évêque méthodiste américaine Mary Ann Swenson.
C'est sur le terrain de la paix que le COE s'est montré le plus actif au cours de ses 70 ans d'existence. Et jeudi, le pape devrait rencontrer des délégations des deux Corées présentes cette semaine au comité central du COE.
L'Eglise catholique-romaine ne souhaite pas être adhérente du COE, qui représente des églises nationales parfois très locales ne reconnaissant pas la primauté du pape et aux visions doctrinales très différentes. Elle a néanmoins entamé avec l'organisation une collaboration active depuis une cinquantaine d'années, dans l'aide humanitaire ou l'éducation.
Clin d'oeil à la Suisse, le pape a été accueilli à sa descente d'avion par deux anciens gardes suisses, les stoïques soldats du pape qui jurent de se sacrifier si besoin pour leur souverain pontife. La plus ancienne armée du monde -née en 1506 avec le recrutement de mercenaires helvètes, réputés invincibles, par Jules II, le pape de Michel-Ange- exige encore aujourd'hui d'être Suisse, catholique-romain pratiquant et jeune célibataire.
Le souverain pontife terminera son voyage-éclair en célébrant une messe, en français et latin, devant 41.000 catholiques majoritairement francophones dont des frontaliers français.
Sur environ huit millions d'habitants de la Suisse, 41% se disent catholiques et un quart protestants.