En 2023, 95 cas de féminicides ont été comptabilisés en France, femmes et enfants continuent de mourir sous les coups. Depuis trois ans, une association basée à Évian-les-Bains accompagne des victimes dans leur difficile reconstruction. En trois ans, 130 femmes et 20 enfants ont été accompagnés par les bénévoles de l'association.
Quand les femmes franchissent la porte de l’association Women & Safe and children, elles ont déjà parcouru un chemin douloureux, celui de la honte pour certaines, du mépris, de l’isolement et de la violence pour d’autres. Quand elles arrivent ici elles viennent se confier, en cachette souvent, d’un homme devenu leur bourreau : "Pour moi, c’est le moment de partir, c’est la raison pour laquelle je suis ici, quand j’ai parlé de séparation, il m’a menacée de mort", confie une plaignante. En face d’elle, Juliette, elle est juriste bénévole et vient donner de son temps pour écouter, conseiller et accompagner ces victimes.
Un accompagnement global
Comme Juliette, la plupart des femmes de l’association sont des bénévoles : "Malheureusement, il y a de plus en plus de femmes qui viennent frapper à la porte. On a une grosse demande de consultation et de prise en charge, donc ça devient difficile de répondre à tout le monde, c’est pour cela que l’on aurait besoin de moyens supplémentaires pour recruter des psychologues, des infirmiers," relate Catherine Di Gleria Garnero, la co-présidente de l'association Women Safe & Children en Haute-Savoie.
Au sein de l’association, l’accompagnement est global, "on est une belle équipe, il y a de la solidarité entre nous, les gens sont là depuis le début de l’aventure, il y a des rires, des moments, des pique-nique au bord du lac l’été, il y a une vie en dehors de ce local qui est chargé d’émotion. C’est une vraie famille. On essaye de recréer ce que certaines femmes n’ont pas à la maison," ajoute la co-présidente.
Prendre un peu de temps pour se faire un masque sur le visage, on sait que ça peut engendrer des remarques puis beaucoup de choses, alors on essaye d’être le plus discret possible, on se met en sourdine. On s’efface pour limiter la casse.
Julie*, bénéficiaire
Ce jour-là, une jeune bénévole, en école d’esthétisme est venue maquiller et faire des soins à un petit groupe de femmes : "C’est une jolie collaboration avec une dimension psychique, car la réparation passe aussi par le corps. On a sélectionné un petit groupe de femmes qui avaient le plus besoin de passer par une réparation corporelle et travailler l’estime d’elle-même."
Parmi elles, Julie*, victime de violences psychologiques pendant plusieurs années :
"Je suis au paradis, confie la bénéficiaire, c’est quelque chose que je n’ai plus fait depuis des années et qui fait un bien fou, il faut dire que l’on est dans un environnement où on se laisse porter ici. Je ne m’occupais plus du tout de moi, car j’étais en sur vigilance de mon environnement. Prendre un peu de temps pour se faire un masque sur le visage, on sait que ça peut engendrer des remarques puis beaucoup de choses, alors on essaye d’être le plus discret possible, on se met en sourdine. On s’efface pour limiter la casse."
Aujourd’hui, grâce à l’association, elle est sortie de sa relation d’emprise et retrouve peu à peu un quotidien tranquille et apaisé.
130 femmes accompagnées
Comme Julie, en trois ans, près de 130 femmes ont franchi la porte de l'association.
"72% des plaintes déposées auprès de la police ne sont pas traitées, elles sont classées sans suite, et certaines fois les femmes quand elles viennent ici elles ont porté plainte plusieurs fois et aucun suivi de fait donc la difficulté de ces femmes, c’est de faire confiance, refaire confiance," explique Elisabeth Giguelay, la directrice de l'association Women Safe & Children en Haute-Savoie.
L'association haut-savoyarde accompagne les femmes mais aussi les enfants victimes de violences physiques et psychologiques. L'association possède deux autres antennes en France, une dans les Yvelines et une autre en Corse du Sud.
*le prénom a été modifié.