JO d'hiver 2030. "Fuite en avant", "roulette russe" ou chance "incroyable" : la candidature des Alpes divise

Les Alpes françaises seront candidates pour accueillir les Jeux olympiques d'hiver de 2030. Laurent Wauquiez a promis des "jeux sobres" tandis que certaines voix s'élèvent pour questionner la tenue d'un tel événement face au manque de neige.

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"Fuite en avant" pour certains, opportunité de lancer les "premiers JO durables" pour d'autres. La candidature annoncée des Alpes françaises aux Jeux olympiques d'hiver de 2030, portée conjointement par les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte-d'Azur, divise.

Laurent Wauquiez et Renaud Muselier, les présidents des deux régions le promettent : ce seront des "jeux sobres", "respectueux de l'environnement" et surtout une "opportunité incroyable" pour les territoires concernés.

Leur dossier de candidature doit être déposé le 7 novembre avant un grand oral devant le Comité international olympique (CIO) le 21 novembre. La décision est attendue courant 2024, la Suède et la Suisse sont également candidates.

"C'est quand même un peu la roulette russe" pour la neige, ose, dubitative, Catherine Dufour, une habitante de Chamonix née dans une famille très liée aux JO d'hiver puisque son grand-père, son frère et son cousin y ont tour à tour participé.

"On avait le village le plus enneigé de France dans le fond de la vallée de Chamonix. Mais aujourd'hui, l'enneigement est piètre. Un jour, ça va s'arrêter", dit cette retraitée de 61 ans, inquiète de la possible "gabegie financière" et "bétonisation" liée à la construction des infrastructures.

"Réutiliser l'existant"

Le maire de Chamonix, Eric Fournier, est catégorique : "Si on reste sur le modèle à l'ancienne, résolument, il n'y a pas la place". Mais les Jeux sont possibles si "on travaille avec des sites existants, qui vont avoir un réel avenir et une économie de ressources".

Laurent Wauquiez a justement promis de "s'appuyer sur des infrastructures existantes" pour de "premiers JO durables". Car la région a une riche histoire olympique : les tout premiers Jeux d'hiver ont été accueillis par Chamonix, il y a près de 100 ans, puis par Grenoble en 1968 et Albertville en 1992.

La Plagne, station perchée à 1 400 mètres d'altitude espère réutiliser sa piste de bobsleigh, l'équipement le plus coûteux des JO d'Albertville. "C'est l'exemple à suivre", explique le maire Jean-Luc Boch, très enthousiaste sur la candidature des Alpes.

"La France a fait le choix du tourisme", explique-t-il. "Si on arrête toute activité économique, est-ce que ça va changer le réchauffement climatique ?". Une vision que partage Benjamin Sauze, gérant de société lyonnais en vacances à Chamonix : "Forcément, c'est énergivore mais il faut quand même continuer d'organiser des événements sportifs sur le territoire".

L'enjeu est crucial dans les Alpes, en pleine interrogation sur l'avenir de leur modèle économique. Selon Domaines skiables de France, 120 000 emplois dépendent des sports d'hiver, un premier sommet "pour une montagne durable" a été organisé cette semaine à Chamonix pour penser l'adaptation au changement climatique.

"Sommet de l'iceberg"

Renaud Muselier, président de la région Paca, est confiant : "Selon les études, on a de la neige jusqu'en 2050 au moins", a-t-il dit à la presse cette semaine. La "neige va être de moins en moins disponible", corrige Thierry Lebel, hydroclimatologue.

En décembre dernier, la station du Grand-Bornand (Haute-Savoie), à 1 300 mètres d'altitude, avait ainsi dû acheminer 12 000 m3 de neige de stockage par camions pour pouvoir accueillir une étape de la Coupe du monde de biathlon.

>> Lire aussi : Les critiques se succèdent autour de la piste de biathlon du Grand-Bornand couverte de neige artificielle

Sans recours à la neige artificielle, 53 % des stations européennes feraient face à un risque "très élevé" de manque de neige si la hausse des températures mondiales était de 2°C, selon une étude parue en août dans la revue Nature Climate Change.

Or, la neige artificielle est de la "mal adaptation" pour Thierry Lebel car "pour faire face aux conséquences du changement climatique, on émet une quantité encore supplémentaire de gaz à effet de serre".

Le projet JO 2030, "c'est le sommet de l'iceberg par rapport à tous les problèmes qu'on rencontre à l'heure actuelle" lié au "tout tourisme" et au "tout ski alpin", estime Vincent Neirinck, de l'association Mountain Wilderness. Et "ça participe à une fuite en avant qui n'est pas acceptable."

"Quoi qu'on nous promette à chaque édition, les JO n'ont jamais fait la preuve de leur innocuité", souligne le militant, en pointant le tout-neige artificielle des Jeux de Pékin qui ont, selon lui, contribué "à banaliser le serpent de neige au milieu du désert".

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