La fracture sociale se creuse dans le Genevois avec la montée en puissance du franc suisse qui s'installe au-dessus de l'euro. Une aubaine pour les travailleurs frontaliers de Haute-Savoie, mais pas pour les résidents travaillant côté français.
Si le pouvoir d'achat est l'une des grandes préoccupations des Français en cette rentrée, le Genevois haut-savoyard cristallise cette problématique. Les inégalités sociales s'accroissent entre les travailleurs frontaliers et les autres à la faveur de la dépréciation de l'euro.
Le franc suisse devient de plus en plus fort face à la monnaie européenne, s'installant durablement au-dessus de cette dernière : un euro s'échange désormais contre 0,97 franc. Christophe Chevassus, courtier en ligne dans la zone frontalière de Genève, suit quotidiennement les fluctuations des deux monnaies.
Il constate une flambée du franc suisse depuis quelques années, et plus encore depuis février. Une aubaine pour les travailleurs frontaliers vivant en Haute-Savoie. "Avec un salaire moyen de 6 000 francs, en 2018, on avait 5 200 euros. Et en 2022, on a 6 200 euros. Donc on a 1 000 euros de revenus supplémentaires pour vivre en France", résume Christophe Chevassus.
En 4 ans, le pouvoir d'achat des frontaliers a augmenté de 20 %. Mais pour les habitants de la zone frontalière qui travaillent côté français, c'est plutôt l'inverse. "Le problème, c'est pour les gens qui n'ont pas ces revenus en franc suisse, c'est-à-dire les salariés sur la zone euro, la zone frontalière, confirme le courtier. On parle des fonctionnaires, de tous les gens qui travaillent dans les entreprises locales qui, eux, sont payés en euros chaque mois avec des salaires français. Pour eux, la situation devient compliquée."
Fracture sociale accrue
A Annemasse, la fracture sociale est plus sensible qu'ailleurs. On y compte à la fois de très hauts salaires et le nombre le plus important de bénéficiaires du RSA en France. Les élus de l'agglomération plaident depuis longtemps en faveur d'une prime à la vie chère pour les fonctionnaires, mais pas seulement.
"On a une volonté supplémentaire sur l'agglomération d'Annemasse, c'est d'aller vers un encadrement des loyers parce qu'on constate beaucoup d'excès avec un certain nombre de logements qui ne sont pas de bonne qualité et qui sont loués à des prix prohibitifs, remarque Gabriel Doublet, président d'Annemasse Agglo. Il faut absolument qu'on se batte pour celles et ceux qui sont salariés en euro sur ce territoire et qui vont bientôt ne plus pouvoir y vivre si on continue dans cette logique d'inflation."
Une situation comparable à la région parisienne et qui risque de durer tant Genève est à la fois une locomotive économique et un aspirateur à emploi transfrontalier.