Une semaine après son sauvetage dans des conditions extrêmes et son rapatriement, Elisabeth Revol revient, lors d’une conférence de presse à Chamonix, sur les épreuves douloureuses qu’elle a traversées dans l’Himalaya et notamment la disparition de son compagnon de cordée, Tomasz Mackiewicz.
Elisabeth Revol se remet tout doucement de ses épreuves. L’alpiniste rescapée de l’Himalaya s’est exprimée ce mercredi soir lors d’une conférence de presse à Chamonix. Pour elle, c’est à cause de la lenteur des secours, difficiles à organiser au Pakistan, que son compagnon de cordée, le Polonais Tomasz Mackiewicz, n’a pas pu être sauvé.
"J'ai beaucoup de colère, on aurait pu sauver Tomek si ça avait été un réel secours, pris à temps et organisé", a expliqué l’alpiniste qui a été évacuée du Nanga Parbat, la montagne tueuse qui culmine à 8126 mètres d’altitude.
Un calvaire de 63 heures
La rescapée est revenue sur les conditions extrêmement périlleuses de son sauvetage, véritable "course contre la montre" et les 63 heures de calvaire qui ont séparé son appel de détresse de son retour au camp de base. Le 25 janvier au soir, l’alpiniste réalise qu’elle est réellement en danger et envoie un message de SOS à Ludovic Giambiasi, le routeur qui suit sa progression, à son mari et à l’épouse de Tomek, Anna.Une centaine de messages seront échangés mais tous n’arriveront pas à leur destinataire. L’alpiniste ne reçoit que l’essentiel, notamment les consignes pour la préserver du froid.
Pour son routeur, basé à Gap, il faut organiser les secours pakistanais et coordonner les équipes. Celui qui a suivi le sauvetage depuis sa régie française dénonce notamment des mensonges de certains Pakistanais sur la "disponibilité, la réservation et les capacités des hélicoptères", notamment pour sauver Tomek, immobilisé à 7000 mètres d’altitude.
Pour convaincre les secours héliportés, il a fallu mettre beaucoup d’argent sur la table. Le prix de départ pour réquisitionner l’hélicoptère aurait été de 15 000 dollars mais il serait monté à 40 000 et les autorités auraient exigé un paiement en cash. D’autres freins ont retardé le décollage, notamment la lenteur de préparation des engins, "jamais prêts à décoller au lever du soleil", les "refus d'autorisations" et la météo.
L'ambassade de Pologne a avancé une grande partie de la somme pour organiser le sauvetage
Côté diplomatique, les ambassades de France et de Pologne se sont activées en coulisse pour mobiliser rapidement les sommes demandées. Mais c’est l’ambassade de Pologne qui a réuni l’essentiel de la somme, car l’ambassade de France n’avait pas de liquide dans son coffre. Les employés ont complété la somme qui manquait, explique Masha Gordon, alpiniste russo-britannique.En parallèle, une campagne de "crowdfunding" a été lancée pour financer l’opération de sauvetage et 158 000 euros ont été récoltés, de la part de 6459 donateurs. Après avoir remboursé la part avancée par la France, le reliquat de 130 000 euros ira aux trois jeunes enfants de l’alpiniste polonais resté sur le montagne. L’ambassade de Pologne a quant à elle offert sa participation.
La gratitude de la veuve de Tomek Mackiewicz
La veuve de Tomasz Mackiewicz, Anna a exprimé à Elisabeth Revol sa profonde gratitude pour avoir guidé son mari jusqu'à la crevasse où elle l'a laissé à l'abri, persuadée qu'un hélicoptère viendrait le chercher. "J'espère que tu te sentiras mieux bientôt", lui a-t-elle dit.L’alpiniste française a aussi exprimé son émotion et ses regrets au sujet de son compagnon qui n’a pu être sauvé. Elle regrette notamment de ne pas avoir insisté pour qu’il mette ses lunettes durant la dernière partie de l’ascension. Le Polonais aurait été selon elle touché de cécité, ce qui aurait été l’élément déclencheur des difficultés qui ont suivi.
Elisabeth Revol est actuellement soignée à l'hôpital de Sallanches en Haute-Savoie, pour soigner de graves engelures au niveau des mains et du pied gauche.