"Les gens ne sont plus soignés" : l'hôpital psychiatrique public de Haute-Savoie a fermé la moitié de ses lits

L’établissement public de santé mentale de la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie) ne compte plus qu'une centaine de lits sur 208. La moitié a fermé en un an, faute de médecins psychiatres. Une résultante de nombreux facteurs et qui dégrade la situation de ce milieu, au grand dam des patients et de leur santé.

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Une centaine de lits fermés en un an sur une capacité de 208. C’est le constat réalisé à l’établissement public de santé mentale (EPSM) de la Roche-sur-Foron (Haute-Savoie), la faute à un manque de médecins psychiatres. Le seul établissement public du département, spécialisé dans le domaine, a dû fermer 60 % de ses lits.

Conséquence : les patients et leurs proches se retrouvent dans des situations inextricables, comme Rosette, mère d’une patiente. Sa fille Sandy, 36 ans, atteinte de psychose infantile, a été hospitalisée en septembre dernier. Mais après seulement deux semaines, Rosette a été recontactée pour récupérer sa fille prématurément.

Elle explique : "Ils pensent qu’elle est stabilisée alors que pas du tout. Ils les sortent parce qu’ils n’ont pas de place. Quand on est arrivé pour la récupérer, elle était dans un état lamentable. Comateuse, elle marchait à peine etc. Quand je l’ai vu, j’ai fait un malaise. Donc ils ont dit : ‘on va la garder'."

Les gens ne sont plus soignés.

Christophe Cézard, délégué départemental de l’Unafam

Les malades peuvent patienter pendant plusieurs jours aux urgences en attendant qu’une place se libère à l'EPSM ou avant d’être réorientés vers d’autres hôpitaux de la région. L’Unafam, l’association de proches de malades psychiques, dénonce cette dégradation de prise en charge. "En fermant des lits, on ne peut recevoir que les gens qui sont en état de crise. Donc, ceux qui arrivent sont dans un état beaucoup plus critique que par le passé", souligne Christophe Cézard, délégué départemental de l’Unafam. "C’est quelques fois un peu la roulette, un coup de chance. Une place s’est libérée, on peut y aller." Pour lui, "les gens ne sont plus soignés" en Haute-Savoie, alerte-t-il.

En mai dernier, dans un communiqué envoyé aux élus du département, l’association pointait les différentes fermetures dans le service public de psychiatrie de la Haute-Savoie. Il n’y avait alors plus que "13 lits d’hospitalisation complète", dans les hôpitaux du Léman, situés à Thonon-les-Bains, avec seulement quatre infirmiers présents sur 13 théoriques et sans psychiatre permanent. 

Une problématique nationale, accentuée en Haute-Savoie

Contactée par téléphone, la direction de l’établissement n’a pas souhaité s’exprimer. Mais, elle reconnaît des difficultés de recrutement. La spécialité psychiatrique attire de moins en moins les futurs médecins. L’EPSM tente de compenser le manque par des intérimaires. Mais depuis la loi RIST, mise en place au printemps dernier, ces derniers voient leurs indemnités plafonnées dans le service public. "Vingt psychiatres intérimaires se sont succédé dans le service durant l’année 2022", rapporte l'Unafam dans son courrier envoyé aux élus.

La problématique est présente sur l'ensemble du territoire national. Mais en Haute-Savoie, elle s'ajoute à d’autres points critiques spécifiques au département, décrit Julie Cuenot, représentante du personnel CGT EPSM. "La vie est chère donc un certain nombre de personnels part pour la Suisse ou change de régions. Et là, ce qu’on voit, ce sont nos collègues épuisés, qui ont des abandons de poste. C’est-à-dire qu’ils ne peuvent plus venir au travail et changent de métier."

Un ou deux médecins sont en cours de recrutement à l’EPSM. Mais c’est insuffisant pour rouvrir la totalité des lits. La direction estime qu’il faudrait six médecins pour remettre une cinquantaine de places en fonctionnement. Pourtant, le besoin en soins psychiatriques n’a jamais été aussi important dans un département où la population augmente de 10 % par an. À e jour, l'EPSM ne compte plus que 25 places disponibles pour des nouveaux venus.

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