Des ruisseaux de Haute-Savoie font figure de décharges à ciel ouvert. Plusieurs milliers de détritus en tout genre s'y amoncellent depuis des décennies. Malgré de multiples alertes, l'action des pouvoirs publics se fait attendre.
Sacs plastiques, bidons et autre mobilier usager. Le ruisseau du Malatrays, en Haute-Savoie, est jonché de déchets depuis plusieurs dizaines d’années. Une décharge sauvage au cœur d'un site naturel, entre les communes d'Allonzier-la-Caille et de Choisy, qui désespère les défenseurs de l'environnement.
"Celui-là a été déposé il y a moins d'une semaine", relève Nicolas Jean Pricaz, qui découvre avec effarement de nouveaux détritus à chacune de ses incursions. Ses balades se transforment en de bien tristes chasses aux déchets dans le lit du ruisseau.
"On trouve des déchets liés à des anciennes carcasses de voitures, liste-t-il, tendant une vieille plaque d'immatriculation. On trouve aussi des grilles, pas mal de ferraille, des déchets qui viennent de chantiers." D'autres ordures sont jetées par des automobilistes depuis la route, alors qu’une déchetterie se trouve à moins de 7 km.
Des plastiques jusque dans les racines
"Il faut absolument nettoyer ce site, alerte Nicolas qui a lancé l'alerte grâce son association Usses et Merveilles. On ne peut pas laisser ça comme ça. On a remarqué qu'une fois qu'un site était nettoyé, les gens ne venaient plus le polluer. Par contre, sur un site où il y a encore des déchets, les gens viennent en rajouter."
Grâce à cette association citoyenne, la maire a décidé d’agir pour mettre fin aux incivilités. "On a un site naturel relativement beau, donc on fait ce qu'on peut. Est-ce qu'il faudrait mettre des caméras ? C'est de l'argent pour des petites communes comme la nôtre, donc on va mettre une barrière", assure la maire d'Allonzier-la-Caille, Brigitte Nanche.
Le Malatrays n’est malheureusement pas le seul cours d’eau de Haute-Savoie à être souillé par des déchets. A Seyssel, à l’abri des regards, le ruisseau du Raffarey est infesté par des milliers de morceaux de plastique. Les fragments se sont même immiscés jusque dans les racines.
C'est un endroit compliqué d'accès, donc ça coûte vite de l'argent pour enlever les déchets.
Guillaume Gourdy, chargé d'études à la Fédération de pêche et de protection des milieux aquatiques de Haute-Savoieà France 3 Alpes
"Cet arbre se trouve dans le lit majeur de la rivière, donc quelques mètres à côté de la rivière, explique Guillaume Gourdy, chargé d'études à la Fédération de pêche et de protection des milieux aquatiques de Haute-Savoie, désignant un arbre arraché. On voit que les plastiques ancrés dans le sol se trouvaient dans ses racines."
Enjeu environnemental à grande échelle
Tout ce plastique provient d’une ancienne décharge communale qui surplombait le ruisseau. Lors de sa fermeture, en 1989, les déchets ont été laissés sur place. Des associations avaient tiré la sonnette d’alarme au début des années 2000. Mais depuis, rien n'a changé. Les défenseurs de l’environnement se sentent démunis.
"C'est un endroit compliqué d'accès, donc ça coûte vite de l'argent pour enlever les déchets", ajoute Guillaume Gourdy. Les décharges dans les cours d’eau posent un vrai problème environnemental qui risque de s’aggraver.
"L'un des grands enjeux avec le changement climatique, c'est que les cours d'eau vont être de plus en plus concernés par des périodes d'assec où il n'y a pas d'eau ou très peu. Donc le cours d'eau va être très sensible à toute forme de pollution. Sa capacité d'autoépuration va être très amoindrie à ce moment-là", complète Corentin Mele, chargé de mission Eau et Veille pour l'association France nature environnement.
Les microplastiques transportés par ces ruisseaux ont un impact négatif sur la biodiversité locale. Ils se retrouvent aussi dans le Rhône et terminent leur course dans la mer Méditerranée, participant ainsi à la pollution des océans.