Inondations : la protection naturelle des zones humides de la région pour limiter les effets des crues

Le 2 février est la date annuelle de la journée mondiale des zones humides. En Auvergne Rhône Alpes, on en compte énormément. Des secteurs entretenus et protégés par les Conservatoires d'espaces naturels, car ils présentent de multiples intérêts, notamment pour limiter les inondations. 

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En 1992, la loi sur l’eau de 1992 a donné une définition des zones humides. Il s’agit des « terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles (qui aiment l’humidité) pendant au moins une partie de l’année. ». Ces zones jouent un rôle de premier plan dans le cycle de l’eau. Elles stockent l'eau en période d'inondation et la restitue en période de sécheresse. La présence de zones humides et leurs nombres permettent de bénéficier d’une eau de qualité au robinet. Au total, ces zones représentent 8,5% de l'eau douce présente sur terre. 

Un moyen naturel de limiter les inondations

Si l'homme se dote parfois d'équipements ou d'ouvrages pour lutter contre les inondations, il ne faut jamais oublier que la nature reste un moyen efficace d'y participer. En effet, comme des éponges, les zones humides peuvent accumuler les eaux de pluie et de fonte des neiges de printemps, pour restituer peu à peu les volumes stockés. Cette capacité de rétention est intéressante pour réguler les inondations et atténuer leurs effets (inondations moins brusques ou moins hautes).

D'après le CNE, par exemple, entre Mâcon et Villefranche-sur-Saône, le Val de Saône joue un rôle de zone d’expansion des crues de la Saône en amont de Lyon. Pour remplacer cette infrastructure naturelle par un barrage d’écrêtement des crues, il faudrait dépenser plusieurs centaines de millions d’euros.

Les effets "éponge" et "étalement" des zones humides 

Les mécanismes de régulation des crues sont différents selon que l’on se situe en montagne ou en plaine : lorsque les zones humides sont situées en pente, elles permettent de ralentir le ruissellement et faciliter l’infiltration de l’eau dans le sol. C’est l’effet “éponge”, grâce auquel l’eau ne s’écoule pas directement des terres dans les cours d’eau, évitant ainsi des inondations trop brusques ou catastrophiques en aval.

Dans les plaines alluviales, les zones humides annexes des fleuves et rivières (prairies humides, forêts alluviales, bras morts) stockent les débits de crue de part et d’autre du cours d’eau, permettant à l’excès d’eau de se répandre, ce qui réduit la hauteur des inondations. C’est l’effet d’étalement. De plus, en fonction de la végétation de la zone humide, la vitesse de la crue sera modifiée : plus la quantité d’obstacles opposant une résistance à l’écoulement est importante, plus la vitesse sera ralentie.

Indispensable pour lutter contre la sécheresse

En outre, les zones humides jouent un rôle capital dans la lutte contre les effets des périodes de sécheresse. Elles permettent de stocker naturellement l'eau, et la restituent peu à peu dans ces périodes. Ce qui contribue à limiter le tarissement des cours d'eau. Ce n'est pas tout : avec leur sol gorgé d’eau, leur végétation reste verte quasi toute l’année. Elles offrent ainsi un fourrage particulièrement apprécié en période sèche, alors que les autres pâtures sont généralement desséchées. On estime que 50,66% des milieux humides en France ont un usage agricole. 

Les zones humides présentent un autre avantage non-négligeable : elles sont un véritable réservoir de biodiversité. Ces zones abritent en effet 40% des espèces de la planète, dont elles dépendent. Et, plus étonnant, près de 200 nouvelles espèces de poissons sont découvertes chaque année dans les zones humides d’eau douce. 

Des sites en cours de restauration dans toute la région Auvergne Rhône-Alpes

Dans l’Ain, perché à 760 mètres d’altitude sur la commune Plateau d’Hauteville, le Marais de Vaux constitue un site naturel unique.

Avec ses 132 hectares, il s’agit de la plus grande zone humide de la montagne du Bugey et deuxième plus grande du département. Une diversité de milieux naturels la compose : bas-marais, eau libre, prairies, roselières ou encore boisements humides. De nombreuses espèces végétales et animales y ont élus domicile, dont des spécimens rares et remarquables. Le marais est également un lieu de pêche, de chasse et de promenade pour les habitants et les touristes. Il rend également des services à la collectivité en servant de zone d’expansion des crues et de soutien d’étiage en période de sécheresse. Enfin, il filtre l’eau qui autrefois alimentait des puits de captage, aujourd’hui mis hors service. Mais avec le développement de la végétation et la présence de nombreux drains asséchant le marais, le site se trouvait en péril et risquait de perdre tous ses atouts. Aussi d’importants travaux ont été menés : débroussaillage, bouchage des drains et reméandrage du ruisseau. Le chantier s’est achevé fin 2020. Avec les premières pluies, on constate déjà les résultats attendus. L’eau affleure en surface, inonde les prairies humides et s’écoule progressivement dans le marais.

Autre exemple en Ardèche : la préservation des zones humides de la Source du Vernet Prades. En 2020, le Conservatoire d’espaces naturels Rhône-Alpes, la Société générale des eaux de sources minérales (SGESM) et le Parc naturel régional des Monts d’Ardèche ont signé un partenariat pour 3 ans. Objectif : assurer à la fois la qualité de la ressource en eau et la préservation des boisements et zones humides qui entourent la source du Vernet. Ce travail s’intègre dans une collaboration mise en place à l’échelle nationale entre le pôle Agromousquetaires et le réseau des CEN.

Dans la Drôme, aux portes de Montélimar, près de Châteauneuf-du-Rhône, se trouve une zone humide, les étangs des Îles du Rhône. Subsistants au cœur d’un paysage modelé par les aménagements, ces milieux jouent un rôle essentiel pour le développement durable du territoire : ilot de fraîcheur, réserve de biodiversité, aire de promenade, de pêche, etc. En effet, ces zones humides nous rendent de nombreux services, une meilleure qualité de vie et ce gratuitement ! Mais ces étangs s’appauvrissent et se dégradent. Aussi un ambitieux projet de restauration s’est monté pour préserver ces espaces naturels, associant acteurs et élus locaux. Pilotés par le Conservatoire, les travaux débuteront au printemps 2021 et vont porter sur la reconnexion des étangs entre eux et au fleuve Rhône. D’une part, pour favoriser les flux d’eau et nutriments nécessaires au développement de la biodiversité. D’autre part, pour créer des zones refuges et d’intérêt pour la faune (brochet, vairon, martin pêcheur, castor, etc.). Les berges aujourd’hui abruptes seront également reprofilées et végétalisées pour laisser place à des roselières et des boisements humides. L’objectif ? Favoriser la diversité des milieux et l’accueil de la faune.

Dans la Loire, les Monts du Forez constituent un véritable château d’eau pour le département de la Loire. La révision de « l’inventaire départemental des tourbières de la Loire »  a montré que 52 tourbières pour environ 850 hectares sont actuellement recensées côté Loire du massif. Ceci fait de cette zone l’un des plus grands massifs de tourbières en France. Ces zones humides remarquables constituent les sources de nombreux ruisseaux qui alimentent la plaine du Forez avant de se jeter dans la Loire.

Sur le sud Forez, ces zones humides de tête de bassin versant se caractérisent par leur importante concentration et leur diversité. On y retrouve des zones tourbeuses, des tourbières boisées et beaucoup de prairies humides. Ces milieux sont pour la plupart alimentés par les eaux de pluie et de sources, alimentant à leur tour les ruisseaux en aval. En concertation avec les propriétaires et les élus locaux, le Conservatoire d ’espaces naturels préserve cinq sites sur ce secteur. Notamment une prairie humide de 2,4 hectares sur la commune de Saint-Jean-Soleymieux. Pâturée une partie de l’année par des vaches, une solution a été trouvée pour préserver la qualité de l ’eau du ruisseau qui parcours la parcelle et permettre l’abreuvement du troupeau dans le même temps. C’est ainsi que le Conservatoire a installé des clôtures le long du cours d ’eau et deux abreuvoirs. Ces derniers sont reliés au ruisseau : ils sont alimentés par lui et le réalimente par l ’eau non-consommée.

Le marais de Morlin se situe dans le sud du département du Rhône (commune de Taluyers), sur le plateau mornantais. Par ses mares et sa végétation, le marais de Morlin stocke et purifie les eaux qui le traversent. Il joue ainsi un rôle important de régulation des inondations : en cas de fortes pluies, l’eau est absorbée dans le marais (on constate un pic au niveau des piézomètres, chargés de mesurer le niveau d’eau). Cela fait autant d’eau en moins aux alentours ! Depuis 1998, le marais de Morlin est pâturé par des charolaises d’un éleveur local. Cette reprise de l’exploitation a été très bénéfique : elle a freiné la dynamique de la végétation et permis aux plantes herbacées de se maintenir. Sans cela, il n’y aurait que des bois de saules et des fourrés ! Le site fait la joie des nombreux promeneurs et habitants qui viennent découvrir le marais et ses curiosités naturelles, à l’occasion de sorties organisées.

 

 

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