Après son premier stage à la préfecture de l'Isère en 1957, Jacques Chirac a rédigé un mémoire dont il subsiste des copies aux archives départementales de Grenoble. Mais l'original s'est volatilisé, et l'ancien maire Alain Carignon n'y est pas pour rien.
Aux archives départementales de l'Isère, il reste quelques copies du précieux document, mais l'original est aux abonnés absents. Le mémoire de Jacques Chirac, rédigé en 1957 après son stage à la préfecture de l'Isère, a été mis en ligne vendredi 26 septembre par l'administration suite au décès de l'ancien président de la République.
Le document, dont les pages ont été jaunies par le temps, a été soigneusement numérisée. Sur cette copie, toujours consultable en salle de lecture des archives, on peut lire la quarantaine de pages dactylographiée, tapée à la machine à écrire. "Le mémoire fait un présentation globale du département : la population, la partie agricole, les industries, le commerce, le tourisme...", résume Mathilde Le Roc'h Morgère, directrice adjointe des archives départementales de l'Isère.
Mais où est donc passé le document original ? Pour le savoir, il faut demander à Alain Carignon, ancien maire (LR) de Grenoble et délégué à l’Environnement entre 1986 et 1988 sous Jacques Chirac. L'ancien élu, qui vient de se déclarer candidat au siège de maire dans la capitale des Alpes, a remis ce rapport de stage à son auteur il y a 25 ans : "Je me souviens que Bernadette était à ses côtés à ce moment, se rappelle-t-il. Elle m'a pris à part et m'a dit : « C'est là que j'ai compris ». Elle a compris qu'elle verrai bien peu son mari."
"Six longs mois caniculaires et fastidieux"
Comme le raconte Jacques Chirac dans ses Mémoires, c'est à Grenoble qu'il découvre le monde agricole en participant notamment à la foire de Beaucroissant, le plus vieux rassemblement agricole en France. "C'est ici qu'il a commencé à déployer ses grandes enjambées, à parcourir les comices agricoles, à rencontrer les femmes et les hommes, à avoir ce contact qu'il a eu toute sa vie avec les Français", ajoute Alain Carignon.
Âgé de 25 ans à l'époque, le futur chef de l'Etat passera "six longs mois (...) caniculaires et fastidieux" à la préfecture de l'Isère. Une expérience, racontée avec humour dans son ouvrage autobiographique, dont il ne garde pas un très bon souvenir : "Réfugié dans un bureau exigu, oublié de tous, et surtout de mon préfet, qui ne marque aucun intérêt pour ses stagiaires, j'écoute les informations à la radio, avec l'impression qu'autour de moi tout est en train de s'effondrer".
Dans ses écrits, Jacques Chirac décrit des Isérois "qui se caractérisent par une puissance de travail, une opiniâtreté dans la réalisation des buts poursuivis, une ténacité frisant parfois l'entêtement". S'en suit un portrait fidèle de l'Isère des années 1950 où l'énarque remarque "une aptitude remarquable à la réussite des entreprises industrielles et commerciales" expliquée par "des dispositions très prononcées pour la technique moderne".
Finalement, ce rapport de stage lui aura valu la pire note de sa promotion. Songeant à s'engager dans l'armée, le jeune Chirac a failli abandonner l'ENA au terme de cette expérience malheureuse, avant de se retrouver au sommet de l'Etat une trentaine d'années plus tard.