Sonnés par la chute du gouvernement Barnier et la conclusion de l'accord de libre-échange du Mercosur, les syndicats agricoles se mobilisent de nouveau. Dans la région, ils se sentent déstabilisés et craignent de devoir reprendre les discussions à zéro. Rencontre avec Victor et Perrine qui ont repris une exploitation laitière dans le Vercors.
C'est la fin de l'après-midi sur les hauteurs de Saint-Martin-en-Vercors (Isère). Victor et Perrine produisent du Bleu du Vercors et du Saint-Marcellin en vente directe. Pour eux, c’est l’heure de venir soigner leurs 35 vaches laitières. Et la fatigue commence à se faire sentir. "Le réveil a sonné ce matin à 5h15, explique Victor, on va faire une petite sieste après manger entre midi et deux et après, on est prêt à rattaquer." Un rythme qu’ils doivent tenir 7 jours sur 7 et 365 jours dans l’année.
Déboussolés par la chute du gouvernement
Si Victor et Perrine se sentent protégés par les appellations d'origine contrôlées qui leur permettent aujourd’hui de bien vendre leurs fromages, ils sont déboussolés par l'abandon des négociations agricoles avec la chute du gouvernement de Michel Barnier.
On a l’impression d’avoir loupé une marche et de repartir à zéro, on va avoir d’autres interlocuteurs en face de nous qui vont avoir envie de reprendre les choses à la base.
Victor Schimmel, agriculteur
La signature du traité Mercosur par la présidente de la Commission européenne, Ursula Van der Layen, est pour ces jeunes agriculteurs une injustice supplémentaire. Le traité, qui vise à supprimer la quasi-totalité des droits de douane appliqués aux échanges commerciaux entre l’UE et le Mercosur (le marché commun qui réunit le Brésil, l’Argentine, le Paraguay, l’Uruguay et la Bolivie) est pour eux, l’ouverture à une concurrence déloyale.
"On a des normes qui sont réglées, qui sont notifiées, qui sont vérifiées et qui garantissent une traçabilité de nos produits. C’est tout le contraire qui se passe dans les autres pays qui n'ont aucune exigence et donc il y a clairement une concurrence déloyale", déplore Victor.
"J’ai envie d’avoir un impact sur notre territoire"
Pour autant, Victor et Perrine ont le sentiment de respecter le sens premier de l'agriculture.
"Le fait de savoir qu’il y a également des crèches et des écoles qui achètent et qui nous passent des commandes de fromage, c’est quelque chose qui me tient à cœur de pouvoir développer ça. C’est une part de l’éducation des jeunes enfants", se réjouit Perrine Albertone, agricultrice, avant d'ajouter : "J’ai envie d’avoir un impact sur notre territoire, être acteur, pouvoir apporter l’alimentation aux habitants de notre village et un peu plus loin dans le département. C’est vraiment quelque chose qui me plaît et je ne me verrais pas être dans une structure pour nourrir je ne sais pas qui, je ne sais pas où."
Un investissement indéfectible, avec l'énergie de la jeunesse, dans la reprise de cette exploitation bio, qui a su résister aux tempêtes depuis déjà 20 ans.