Alors que l'instruction est toujours en cours, une audience s'est ouverte ce matin dans l'affaire du docteur V, chirurgien grenoblois visé par plus de 70 plaintes. L’accusé demande la nullité de sa mise en examen dans plus d'une moitié de ces plaintes.
Un nouvel épisode dans une affaire qui dure depuis 2013... Le docteur V, chirurgien orthopédiste, est accusé d'avoir multiplié les opérations non justifiées ou mal réalisées. Deux de ses patients sont décédés, et certains présentent aujourd'hui des séquelles très lourdes. Ce mardi 23 mars, son avocat a déposé, devant la chambre de l'instruction, une demande de nullité de sa mise en examen dans plus de la moitié des 70 dossiers pour lesquels il est accusé.
Selon maître Bernard Boulloud, "il faut faire le ménage dans les constitutions de parties civiles" : "Certaines ont été apportées par le procureur de la République, alors qu'elles n'avaient rien demandé à la justice", s'indigne-t-il. Si bien que les dossiers médicaux de ces personnes ont été transmis aux diverses parties. "Au moins une personne concernée se demande si elle ne va pas déposée plainte elle-même pour violation du secret médial", soutient l'avocat.
"Avancer un peu plus vite"
Pour la défense, il s'agit d'écarter certains dossiers qu'elle considère "pas sérieux", parce que le délai de prescription d'action publique aurait été dépassé, ou qu'ils présentent "une absence d'indices graves ou concordants" :
Il y a une trentaine de dossiers où il n'y a aucun indice, où des rapports d'expertise viennent dire que le docteur V a été dédouané de toute responsabilité.
Au total, une quarantaine de dossiers sont concernés par cette requête. Des dossiers dans lesquels, si la chambre de l'instruction accède à la demande de la défense, le docteur V passerait du statut de mis en examen à celui de témoin assisté... sans changer les accusations qui pèsent contre lui dans les dossiers restants. "Il est toujours condamnable, si on arrive à démontrer quelque chose contre lui", concède maître Boulloud.
Mais alors, à quoi sert ce "ménage" ? Officiellement, à en croire l'avocat de la défense, il s'agit de "déblayer le travail de la justice" pour éviter "les constitutions de parties civiles fantaisistes et inutiles". Sans cela, maître Boulloud considère qu'il "suffit de dire "j'ai mal" pour se constituer partie civile". De plus, il assure vouloir "alléger son dossier" pour que la justice aille "plus vite pour lui, mais aussi pour les victimes qui ont un dossier sérieux" .
Un "travail trompeur" pour les parties civiles
Une preuve de bonne foi qui ne convainc pas les parties civiles. Leur avocat, maître Edouard Bourgin, estime que cette requête est mal intentionnée vis à vis des victimes :
Ce travail est un amoncellement de propos disparates, partiels, partiaux la plupart du temps. Nous pouvons montrer, dossier par dossier, que les moyens utilisés pour réclamer la nullité de sa mise en examen ne tiennent pas du tout. Ce travail nous apparait trompeur, mal fondé.
L'avocat explique ainsi que "les recours effectués contre toutes les décisions défavorables intervenues contre lui ont tous échoué", à l'instar de plaintes en diffamation déposées contre quatre de ses clients et contre des journalistes. "Le comportement judiciaire de ce chirurgien, outre qu’il est extremement agressif, ne releve pas du comportement éthique que l’on peut attendre d’un médecin", estime-t-il.
L'audience s'est achevée ce mardi matin. Pour connaître la décision de la chambre d'instruction concernant cette requête, censée accélérer le travail de la justice, il faudra attendre le 27 avril.