Yusuf S., jugé devant la cour d'assises de l'Isère pour avoir poignardé à mort Redouane Fellague en 2019, a été condamné à 15 ans de prison vendredi. La qualification d'homicide volontaire n'a pas été retenue, provoquant l'indignation de la famille de la victime.
Quelques dizaines de personnes étaient massées devant les portes de la cour d'assises de l'Isère vendredi 16 septembre, à quelques minutes du verdict. Des amis, des proches de Redouane Fellague mais aussi des habitants du quartier des Floralies, à Fontaine, venus soutenir la famille de la victime.
Le verdict a été prononcé aux environs de 20 heures. Yusuf S., accusé d'avoir mortellement poignardé Redouane Fellague, est condamné à 15 années de réclusion criminelle sans sursis pour "violences volontaires avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner". La cour et le jury n'ont pas retenu l'intention homicide, jugeant que l'accusé avait tué la victime involontairement.
La famille est restée digne dans une salle bondée, sous tension. Mais à la sortie de la salle d'audience, l'émotion submerge Hadjira Fellague, la sœur de la victime. "On m'a tuée une deuxième fois. On a tué mon frère une deuxième fois. Cette qualification ne veut rien dire. Voilà ce que la justice a répondu à cet acte gratuit", a-t-elle regretté, ajoutant : "On ne rend pas justice à mon frère."
Une peine inférieure aux réquisitions
La famille de Redouane espérait une réquisition de 30 ans de réclusion criminelle, la peine maximale encourue pour un homicide volontaire. Le ministère public a toutefois requis 18 ans de réclusion à l'encontre de l'accusé, retenant l'intention homicide mais soulignant que Yusuf S., 27 ans, serait capable d’empathie et se comporterait de manière exemplaire en prison.
Au cours de l'audience, l'accusé a reconnu avoir poignardé à mort Redouane Fellague, un ami d'enfance, car ce dernier l’avait "mal salué". Le 6 août 2019, la victime, alors âgée de 23 ans, aurait tendu le coude, et non la main, pour saluer Yusuf.
Une dispute éclate entre les deux hommes, suivie d'une bagarre. Et quelques minutes plus tard, Redouane reçoit un coup de couteau en plein cœur. Lorsqu'il meurt une heure plus tard au CHU de Grenoble, sa fille Mélia a tout juste deux mois.
"Il a conscience de la gravité de son geste"
Immédiatement après l’altercation, Yusuf S. se rend au commissariat et se présente comme l’auteur des faits, avant d'être placé en garde à vue. Les avocats de la défense se contentent de la peine prononcée vendredi soir à l'encontre de leur client. L'homicide volontaire, pour lequel ce dernier comparaissait, a été écarté.
"Pour la première fois dans ce dossier, la cour a considéré que l'auteur n'avait pas d'intention homicide, qu'il n'a pas voulu tuer lorsqu'il a porté ce coup de couteau. Symboliquement, pour notre client, c'est très important, souligne Me Arnaud Levy-Soussan, l'avocat de Yusuf S. Il a conscience de la gravité de son geste et il s'est toujours battu pour expliquer qu'il n'avait jamais voulu la mort de la victime. En ce sens, la décision est satisfaisante."
La défense a indiqué ne pas souhaiter faire appel de cette décision, la considérant "à la hauteur de la gravité des faits". Restent des interrogations dans cette affaire, notamment sur la personnalité de l'accusé. L'omerta dans le quartier et le manque de témoins dans ce procès n'auront pas permis d'en savoir plus.
