Lactalis vient d’inaugurer une station d’épuration à Saint-Just-de-Claix sur le site de l'Etoile du Vercors, l’une de ses fromageries, qui rejetait ses eaux usées directement dans l’Isère. Après de longues années de contentieux, tous les élus locaux ont refusé d'y assister.
Ce mardi 15 décembre, le groupe Lactalis a inauguré sa toute nouvelle station d’épuration autonome à Saint-Just-de-Claix, située près de sa fromagerie L’Etoile du Vercors.
Mais cette installation n’est pas au goût de tout le monde : les élus locaux, dont le maire de la commune, ont brillé par leur absence après avoir refusé l’invitation.
Retour sur les sources du conflit
Il faut dire que les relations entre le groupe laitier et les élus n’ont jamais été au beau fixe. Depuis de nombreuses années, la fromagerie est accusée de rejeter l’équivalent d’une ville de 10 000 habitants en eaux usée dans l’Isère qui se trouve en contrebas de l’usine. Dans les effluents rejetés se trouvent notamment des résidus de lait mais aussi des substances chimiques issues de produits de nettoyages et de désinfectants.
Les relations ont commencé à se tendre lorsque la multinationale, qui a racheté L’Etoile du Vercors en 2011, a refusé de se raccorder au réseau d’assainissement pour lequel l’intercommunalité avait investi 22 millions d’euros.
À la place, Lactalis a déposé des demandes de permis de construire auprès de Joël O'Baton, le maire de Saint-Just-de-Claix, pour construire une station d’épuration autonome. Ces demandes ont été refusées à plusieurs reprises par l’élu, qui souhaitait préserver la zone agricole autour de l’usine ainsi que les riverains.
La fin du bras de fer
Finalement, après plus de dix ans de bras de fer, Joël O’Baton a fini par céder en mars 2019 face à la "pression des services de l’Etat" qui lui demandaient depuis des mois d’autoriser Lactalis à construire sa propre station d’épuration.
On a l'impression qu'ils viennent nous narguer
Pas étonnant donc que, neuf mois plus tard, le premier magistrat de la commune ait refusé de se rendre à son inauguration. "Aujourd'hui, être invité à l'inauguration d'une station qu’on ne voulait pas et en pleine crise du Covid, ça me parait vraiment déplacé. On a l’impression qu’ils viennent nous narguer, a-t-il répondu ce 15 décembre au micro de France 3 Alpes. Moi ça ne me convient pas. C’est pour ça aussi que je ne suis pas présent à l’inauguration. On ne s’est pas inquiété de nous au moment où on avait besoin de discuter et maintenant que tout est fait, on vient se montrer à Saint-Just-de-Claix".
Leur absence aujourd'hui ne se justifie pas
Du côté de Lactalis, c'est silence radio. L'équipe de journalistes de France 3 Alpes présente sur place n'a pas été autorisée à assister à l'inauguration et aucun membre de la direction n'a souhaité répondre à nos demandes d'interview.
Seul le préfet de l'Isère, Lionel Beffre, a accepté de commenter la réaction des élus locaux : "Ils ont été partie prenante de toutes les discussions qui ont eu lieu. Le maire de la commune a accordé le permis de construire donc il avait acté que c’était la seule solution possible. Leur absence aujourd’hui ne se justifie pas. Il faut passer à une autre phase".
Désormais, le préfet estime que cet épisode judiciaire et environnemental appartient au passé, tout comme "les conflits" qui sont "nés sur le territoire". "Aujourd’hui, il devrait y avoir une satisfaction dans toutes les têtes, conclut-il. L’amertume on peut la comprendre mais elle n’est pas bonne conseillère pour l’avenir".
Le maire de Saint-Just-de-Claix promet tout de même de garder un oeil sur le groupe laitier, afin de vérifier si la station d'épuration fonctionne de manière durable et si "rien d'autre ne sera caché comme cela se passe depuis des années".