VIDÉO. "J'ai la sensation d'être à moitié libre" : Coline Fay retrouve ses proches et son comité de soutien à Grenoble

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Photo de famille place Felix Poulat à Grenoble pour le retour de Coline Fay
Emprisonnée pendant deux mois au Sénégal, Coline Fay est rentrée, chez elle, à Claix. Ce samedi 20 janvier son comité de soutien l'a accueillie à Grenoble ©France 3 Alpes / JC. Solari - G. Lespinasse - G. Mahieu

Arrêtée le 17 novembre dernier au Sénégal, Coline Fay a été libérée et expulsée ce jeudi 18 janvier. Vingt-quatre heures après son retour sur le sol français, la jeune femme, originaire de Claix en Isère, a retrouvé ses proches à Grenoble, lors d'un ultime rassemblement pour demander la libération des prisonniers politiques au Sénégal.

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"On t'attendait...." lui glissent des cousins, des amis. "Un bisou, ma nièce ?", demande sa tante. Les sourires sont sur tous les visages, certains retiennent une larme. Coline Fay passe de l'un à l'autre, embrasse chaleureusement tous ces proches qui se sont mobilisés pour sa libération.

"C'est gentil d'être venu, ça me touche", dit-elle doucement à l'oreille d'une amie.

Sa filleule, haute comme trois pommes, brandit une banderole remplie de cœurs sur laquelle elle a dessiné des mots pleins d'amour et ce message : "Bienvenue à la maison marraine". Emy ne quitte pas les bras de celle "qui n'avait rien fait de mal mais qui était en prison". 

La tête et le cœur toujours au Sénégal

Vingt-quatre heures après son arrivée en France, à Paris, sa famille peut enfin respirer. Tous sont venus, une dernière fois, place Felix Poulat à Grenoble pour l'accueillir chaleureusement, là même où ils ont manifesté à trois reprises depuis son arrestation.

"Nous aussi, on est libérés d'un poids. Cela nous a appris des choses, sur nous, sur elle, sur le Sénégal, sur la détention arbitraire, sur plein de choses. On ne sort pas indemne d'une épreuve comme ça, ni elle ni nous. On va essayer de le transformer en quelque chose de positif", déclare Véronique, la mère de Coline Fay. 

La jeune femme de 26 ans est bien de retour, en chair et en os, à Grenoble. Mais sa tête et son cœur sont restés là-bas, au Sénégal, dans la cellule qu'elle a partagée avec ses compagnons de lutte. Tous ont été arrêtés lors d'une manifestation pacifique en soutien à Ousmane Sonko, l'opposant au président sortant Maki Sal. 

J'ai la sensation d'être à moitié libre parce que j'ai laissé mes grandes sœurs là-bas

Coline Fay

"Mes sœurs, mes frères sont là-bas encore, on est plus de 1000 prisonniers politiques au Sénégal, c'est très grave et si je suis sortie, moi, ils doivent sortir demain. Ils n'ont pas commis de crime, ils sont en prison pour leurs idées, c'est tout", déclare la jeune femme qui s'était installée au Sénégal pour y être kinésithérapeute dans un centre pour femmes enceintes. 

Comme elle le confiait déjà à France 3 la veille lors de son arrivée sur le sol français, "c'est pour ça que j'ai la sensation d'être à moitié libre", confie-t-elle "parce que j'ai laissé mes grandes sœurs là-bas. On ne se lâche pas les unes les autres et c'est ça qui permet de tenir". 

Une expulsion en douce

Jusqu'au bout, l'attente a été interminable pour les parents de Coline Fay. Pas d'accueil de la diplomatie française à la descente de l'avion à Roissy, pas de communication non plus visiblement avec la police aux frontières. Coline est revenue en France mais à son atterrissage, elle débarque comme une inconnue sans papiers, expulsée du Sénégal.

"Ils l'ont laissée sans papiers, sans argent et sans nourriture, sans rien, sans téléphone", témoigne son père Jean-Yves. "Du coup, quand elle est arrivée au poste frontière en France, ils n'ont pas voulu la laisser passer. Pendant trois heures, on a regardé la porte de débarquement pour voir si elle arrivait et elle n'arrivait pas".

Sans papiers à son arrivée en France, elle est retenue par la police aux frontières

"Avec son accent sénégalais, il la prenait pour quelqu'un de l'Europe de l'Est et du coup c'était niet, ils ne voulaient pas la laisser passer", raconte encore le père de la jeune femme.

Jean-Yves Fay dénonce cette arrivée en catimini et le silence assourdissant des autorités françaises et sénégalaises. Une libération en douce qui interpelle l'ensemble des personnes réunies autour de la jeune kinésithérapeute ce samedi.

"On va être très attentifs à la situation là-bas, observer quelle position va prendre la France, quel candidat va-t-elle soutenir parce qu'on a déjà vu qu'il y a des relations entre le pouvoir français et certains candidats là-bas, proches du régime actuel. Donc on surveillera la situation, en tant que citoyen qui dénonce les injustices, simplement", avertit Coline Fay.

Peu de libérations à un mois de la présidentielle

"Là-bas, chaque manifestant a le même sort. On t'attrape, on t'arrête et si après on voit que tu assumes ton engagement pour M. Sonko, il est fort probable qu'on te laisse en détention provisoire, c'est-à-dire que tu n'es pas encore jugé, mais tu es en détention jusqu'aux élections. C'est ce qu'on constate, car il y a très peu de libérations et les élections sont dans un mois. C'est une détention préventive pour empêcher les gens d'avoir une activité politique pour soutenir M. Sonko", estime-t-elle. 

L'élection présidentielle aura lieu au mois de février au Sénégal. Ousmane Sonko a été emprisonné fin juillet 2023, notamment pour appel à l'insurrection, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et atteinte à la sûreté de l'Etat. Il dénonce un complot pour l'empêcher de participer au scrutin, alors qu'il était l'un des favoris de l'élection.

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