En Isère, le maire de Malleval-en-Vercors refuse de retirer son arrêté anti-pesticides

Le 21 août 2019, le maire de Malleval-en-Vercors signait un arrêté interdisant l'utilisation de pesticides sur sa commune. Depuis, le Préfet lui a demandé de revenir sur sa décision. Mais Vincent Bayot persiste et signe. Il nous explique pourquoi. 

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Le 21 août 2019, Vincent Bayot, maire de Malleval-en-Vercors, prenait un arrêté interdisant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques à moins de 150 mètres des habitations et bâtiments professionnels, ainsi qu'autour des chemins de randonnée. 
 
Le 4 septembre, le Préfet de l'Isère lui demandait de bien vouloir retirer cet arrêté "illégal". Dans notre pays, un maire ne pourrait appliquer le principe de précaution que dans son domaine de compétences. Or l'agriculture relève du Ministère, pas du maire.


Un arrêté de protection, et non pas de précaution ?


Mais le maire de Malleval ne l'entend pas de cette oreille, bien au contraire. Dans sa réponse écrite au Préfet, qu'il nous a fait parvenir, Vincent Bayot explique qu'il ne s'agit pas de "précaution", prise "dans le doute", mais de "protection, voire de sauvegarde de la population", parce que, dit-il, "le doute n'est plus!"

Pour ce maire, la dangerosité de ces produits est en effet démontrée, connue de tous. Vincent Bayot écrit : "l’épandage de produits phytosanitaires de synthèse est une menace pour la santé de la population. Si je ne prenais pas de mesures de protection, je pourrais d’ailleurs être accusé de non-assistance à personne en danger."

Avec cet arrêté, le maire de Malleval nous explique vouloir protéger globalement ses concitoyens. Au delà des règlementations spécifiques. Il cite en exemple l'interdiction de l’épandage de produits phytosanitaires autour des écoles. Et pose la question au Préfet : "Les enfants dans le cadre scolaire seraient-ils les seuls à devoir être protégés? Leur sensibilité à ces produits disparaîtrait-elle subitement en dehors des temps scolaires? Les adultes seraient-ils par magie immunisés?"
 


Un combat bien au-delà du village


Vincent Bayot a rejoint le collectif des maires "anti-pesticides". Ils sont près de 50 désormais en France.

Il s'attend maintenant à être convoqué devant le juge administratif. "J'y défendrai l'arrêté qui me paraît nécessaire au vu des risques encourus par la population, de mon village et au-delà." nous a-t-il déclaré.

Malleval abrite 54 habitants, dont une quinzaine d'enfants. Et les quelques agriculteurs du secteur sont en bio ou en élevage extensif. Mais Vincent Bayot voit bien plus loin que son seul village.

Il entend bien alerter l'opinion sur la dangerosité de tels produits, "dans le contexte de la carence actuelle de l'Etat".
 

Le texte de la réponse du maire au Préfet


Voici le texte intégral de la réponse écrite envoyée par le maire de Malleval au Préfet de l'Isère ce 6 septembre 2019 :

"Monsieur le Préfet,

J’ai lu avec beaucoup d’attention votre courrier du 4 septembre qui conclut à l’illégalité de l’arrêté susmentionné.

Votre argumentaire appelle les commentaires suivants et la conclusion qui en découle.

Tout d’abord, vous mentionnez que le maire ne peut invoquer le principe de précaution que dans le cadre de ses compétences. C’est tout à fait exact. Mais, bien que le mot « précaution » apparaisse dans l’arrêté, il n’est pas fait mention explicite du principe de précaution. Et pour cause, le caractère avéré de la dangerosité d’un grand nombre de produits phytosanitaires fait que nous sommes clairement dans le cadre de mesures de prévention des risques, voire de sauvegarde de la population. J’estime donc être complètement dans mon rôle dans la mesure où l’épandage de produits phytosanitaires de synthèse est une menace pour la santé de la population. Si je ne prenais pas de mesures de protection, je pourrais d’ailleurs être accusé de non-assistance à personne en danger. 

Pour appuyer ce raisonnement, je souhaite mettre en exergue l’arrêté préfectoral qui réglemente déjà l’épandage de produits phytosanitaires autour des écoles. Les enfants dans le cadre scolaire seraient-ils les seuls à devoir être protégés? Leur sensibilité à ces produits disparaîtrait-elle subitement en dehors des temps scolaires? Les adultes seraient-ils par magie immunisés? Par ailleurs, les mesures de protection que doivent prendre les agriculteurs pour protéger leur propre personne lors des épandages, et l’obligation de confiner leur matériel, ne peuvent être que le signe d’une dangerosité certaine. Sinon pourquoi leur imposer ces mesures?

Pour finir, je pense que le ministère de l’Agriculture ne doit pas s’inquiéter pour les agriculteurs de Malleval en Vercors. Ils sont en bio, ou pratiquent exclusivement de l’élevage extensif. L’utilisation des produits incriminés n’est donc en aucun cas source de préjudice puisque ces produits sont tout à fait optionnels. Par contre mon arrêté est bien plus large puisqu’il réglemente l’utilisation desdits produits pour les particuliers qui en font un usage « de confort », ce qui, au vu des dangers encourus, est à proscrire.

En conclusion, au vu de ce qui est mentionné ci-dessus, et dans le contexte de la carence actuelle de l’état établie par le Conseil d’État, j’estime être en droit de prendre des mesures de protection de la population dans une optique de sauvegarde de la santé publique. Je ne souhaite donc pas retirer mon arrêté.

Veuillez agréer, Monsieur le Préfet, l’assurance de ma haute considération.

Vincent Bayot
Maire de Malleval en Vercors"







 
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