TEMOIGNAGE. Coronavirus : "C'est bien beau de dire qu'on est des héros, encore faut-il nous en donner les moyens !"

Le coup de gueule d'un infirmier libéral du Voironnais face aux mesures prises pour lutter contre la propagation du coronavirus. Les annonces d'Emmanuel Macron hier soir ne l'ont pas rassuré. Il demande, en urgence, des moyens et des livraisons massives de matériel pour les soignants. 

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Masque artisanal sur le visage, Valentin Baetz ne cache pas son indignation et sa colère. 

En première ligne dans le cadre de la crise du Covid-19, cet infirmier libéral du Voironnais déplore un manque de moyens sur le terrain.

"On est extrêmement dubitatif malgré les annonces. On n'a toujours pas de matériel livré. On nous a fait des promesses jeudi et encore hier soir, sauf que les pharmacies n'ont toujours pas été livrées. On est servi en même temps que le grand public, alors qu'on devrait avoir du matériel réservé. On en est réduit à fabriquer nos masques nous-mêmes, en suivant les recommandations du CHU" de Grenoble, nous a-t-il confié lors d'une interview réalisée par visioconférence.
 


Toujours pas de matériel

L'Isère fait partie des 25 départements les plus touchés par la propagation du virus. Les pharmacies devraient donc être livrées rapidement, comme l'a annoncé Emmanuel Macron dans son allocution hier soir.

Bientôt, les infirmiers libéraux devront également assurer le suivi de patients atteints ou suspectés d'être atteints par le coronavirus. Le recensement des personnels disponibles "vient seulement de débuter", déplore Valentin Baetz. Les infirmiers seront alors contactés par les médecins généralistes et non par les patients eux-mêmes, d'où un risque de "compérage médical", déplore le soignant.
 


Soigner, mais pas à n'importe quel prix

Outre le matériel, c'est aussi la rémunération des actes qui pose problème.

18,27 euros bruts pour un déplacement chez un patient suivi pour le coronavirus, 15 euros bruts pour les actes de téléconsultation (aide à la mise en relation avec un médecin ou surveillance par téléconsultation des patients depuis leur domicile).

"Un scandale", s'insurge Valentin Baetz qui estime que les autorités proposent aux infirmiers libéraux des "rémunérations au rabais", alors qu'ils sont "en première ligne".
 


"On a fait un très beau discours en disant qu'on était les héros du quotidien et qu'il fallait nous revaloriser, faut vraiment que ce soit suivi d'actes et de gestes".

Un syndicat infirmier estime ainsi que la prise en charge des patients atteints par le Covid-19 ne peut pas se faire à n'importe quel prix. Dans un communiqué, l'Organisation nationale des syndicats d'infirmiers libéraux demande "une majoration de 50€ par passage, qui s’ajoutera à la cotation habituelle des actes", ainsi que "la défiscalisation complète de cette rémunération exonérée de charges sociales".

Par ailleurs, ce mardi matin, l'infirmier explique que "le gel des cotisations sociales et retraites qui coûtent aux infirmiers 50% de leurs charges brutes par mois", n'était toujours pas entré en vigueur, "malgré les annonces du gouvernement".


Des problèmes de garde pour leurs enfants

Autre écueil : la garde des enfants des personnels soignants. Là encore, il y a une différence entre l'annonce et la réalité de terrain, nous confie Valentin Baetz.

"On n'a pas de moyens de garde pour nos enfants. Les mairies sont censées être réquisitionnées et proposer des moyens de garde, mais très peu le font, ou alors sur des horaires classiques, alors que nous commençons souvent vers 6h le matin et finissons très régulièrement aux alentours de 21h. On n'est vraiment pas épaulé".
 


Masques volés, voitures fracturées

A cela s'ajoutent des actes d'incivilité à leur égard. Plusieurs d'entre eux ont vu leurs voitures cassées, tout comme des infirmiers hospitaliers qui ont un caducée sur leur voiture. "Pas plus tard qu'hier soir, un de mes collègues s'est fait fracturer sa voiture parce qu'il avait un masque posé sur son siège passager"

Le syndicat infirmier Onsil a ainsi recommandé à ses adhérents de ne plus afficher leur caducée sur leur pare-brise.
 
Valentin Baetz rappelle enfin que, contrairement aux kinésithérapeutes, aux médecins ou encore aux dentistes, les infirmiers ne peuvent pas fermer leur cabinet. "Nous avons une obligation légale de continuité de soins".

Il demande donc au plus vite au gouvernement une "distribution massive de masques, de blouses, de gants, de gels hydroalcooliques et de quoi éliminer les déchets. On ne comprend pas pourquoi on doit passer par un circuit normal, on devrait avoir des kits distribués directement par l'Agence Régionale de Santé", conclut-il.

 
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