Crayons bien affûtés, une dizaine de dessinateurs français et étrangers répondent à l'appel du musée de l'eau de Pont-en-Royans, le week-end du 29 et 30 juin. Sur fond de musique et de rencontres avec le public, quelque 200 dessins sur le thème de la fragilité de la ressource en eau seront exposés. Un sujet grave, rendu encore plus concret par quelques traits d'humour.
"L'humour, même noir, parfois, il n'y a rien de tel pour faire passer des messages". Depuis plus de 20 ans qu'il existe, le musée de l'eau de Pont-en-Royans a tout fait pour envoyer des "bouteilles à la mer" sur la fragilité de la ressource naturelle qui l'entoure. "Avec la Bourne à côté où coulent les deux tiers de l'eau du massif du Vercors, on est cerné par l'eau ici", explique Jean-Christophe Berrux, le directeur du musée.
Treize dessinateurs se jettent à l'eau
Ce n'est pas la première fois que le musée de la petite ville iséroise s'appuie sur une bande de dessinateurs pour faire passer son message. Elle bénéficie d'un ambassadeur de choix pour les fédérer en la personne de Pierre Ballouhey. Une fine plume originaire de Saint-Marcellin, qui est aussi président de l'association de dessinateurs "France-Cartoons".
"L'idée d'organiser un mini-festival permettant aux dessinateurs de rencontrer leur public vient de loin", explique celui dont la signature "Ballouhey" griffe chacune de ses caricatures, parfois au vitriol. "J'expliquais un jour à un élu de la ville que je revenais d'un festival très sympathique au sud de Bastia (Haute-Corse), où dessinateurs et public se rencontraient sur fond d'exposition de dessins et de musique du monde. Il m'a alors dit : 'mais pourquoi ne le ferais-tu pas ici ?'"
La première édition de "Cartoons sur le pont" était née. Avec, dès samedi 29 juin au matin, le vernissage, sur fond musical, d'une exposition de quelque 200 dessins d'humour et de presse en grand format, signés d'une trentaine de grands auteurs du genre. Des locaux, comme l'Albertvillois Million ou le Grenoblois Cambon, mais aussi des étrangers à l'image des caricaturistes italiens Marinela Nardi et Marco de Angelis. "Tous des copains de France-Cartoons", résume Ballouhey, dont l'association a essaimé jusqu'au-delà des Alpes.
Des copains encore, les 12 dessinateurs et dessinatrices hébergés dans la cité des pieds du Vercors jusqu'à dimanche soir. "Il y aura peu de discours d'élus pendant le vernissage, c'est promis", ajoute sur un ton caustique le dessinateur isérois. "À la place, on proposera des 'battle' de coups de crayon entre dessinateurs. Et puis, sur les grandes feuilles de papier d'un 'paper board', on pourra se lancer des défis de style 'Tac o Tac'", inspirés d'une célèbre émission de télévision des années 1970.
Des dessins à l'eau... mais pas fades
"Accueillir ces dessins et ces dessinateurs, pour nous, c'est un vrai bol d'air frais", s'enthousiasme le directeur du musée, entre deux accrochages de dessins grand format. Une gorgée d'eau fraîche aurait sans doute été plus appropriée pour Jean-Christophe Berrux. Lui qui s'évertue, depuis la création du musée, à "prêcher" à ses 25 000 à 30 000 visiteurs annuels, que l'eau est un patrimoine de l'humanité fragile.
Or, en 200 dessins, tout est dit. La rareté de l'eau, la sécheresse, les inondations, la pollution, le changement climatique, la surpêche, les marées noires... Tout ce qui fait craindre le pire pour l'alimentation de l'humanité est résumé en quelques traits.
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"Avec les nombreux scolaires qui vont visiter l'exposition, on va pouvoir associer à chaque dessin un thème d'étude et former des petits lanceurs d'alerte", se félicite le directeur. Avec efficacité, et humour en prime.
"Le dessin à l'eau, c'est bien plus beau", clame le sous-titre de la manifestation. Mais pour le palet de ces dessinateurs, en bandes dessinées organisées, il ne fait aucun doute que le vin a davantage de goût. "On a la chance que le même week-end, à Pont-en-Royans, une bande de vignerons organise son salon annuel des vins naturels et vivants", explique Pierre Ballouhey, ravi. "On a toutes les raisons de bien s'entendre, chacun sur notre rive de la Bourne."
Deux rives qui n'ont apparemment rien d'infranchissable. L'affiche ci-dessus, signée par le dessinateur isérois, en est la preuve. Un esprit de fête qui résistera jusqu'à dimanche après-midi. "Mais pas trop tard, expliquent les dessinateurs, car il faudra aller voter".