Michel Neyret a dû s'expliquer lundi sur les "avantages" qu'il a reçus de ses amis escrocs et de ses "indics". Ici une montre de 15000 euros, là un séjour mais plus embarrassant encore,l'ouverture d'un compte en Suisse ouvert par l'un des ses "amis" à sa femme.Il conteste toute compromission.
Séjours, invitations, montres de valeur: l'ex-star de la police Michel Neyret a dû s'expliquer lundi sur les cadeaux de certains de ses indics, et a persisté
à nier qu'ils aient été la contrepartie d'interventions en leur faveur.L'ancien numéro 2 de la PJ de Lyon comparaît aux côté de six prévenus pour "corruption et trafic d'influence passifs", accusé d'avoir fourni des informations à des indics dont Gilles Benichou et Stéphane Alzraa, en échange de cadeaux.
Si l'ex-commissaire a lâché du lest depuis le début du procès, reconnaissant s'être "un peu laissé manipuler", ou de "ne pas avoir fait preuve de prudence", vis-à-vis de ses indics, il a en revanche tenu bon sur le terrain de l'honnêteté, contestant toute contrepartie financière."Si certaines de mes méthodes de contact avec mes informateurs apparaissent aujourd'hui répréhensibles, j'ai toujours agi pour obtenir des résultats", a persisté lundi
l'ex-grand flic avant que le tribunal n'examine dans le détail les cadeaux et avantages dont il a bénéficié.
Il y a d'abord les séjours, une demi-douzaine au Maroc, en Corse ou sur la côte d'Azur évalués par le président à 30.000 euros.Selon les écoutes, l'un des voyages à Marrakech aurait été réglé par Yannick Dacheville,un voyou recherché par la police. Benichou parlait à ce propos "d'un investissement
sur l'avenir". "Pour moi, c'est Benichou qui m'avait invité pour mon anniversaire. (...) Je n'ai pas cherché à en savoir plus", plaide Neyret. Il dit avoir
mis ces invitations "sur le compte de l'amitié" ou "avoir été mis devant le fait accompli". "Ils voulaient me faire plaisir", assure-t-il.
- "Rolls et Ferrari" -
Il y a ensuite les invitations dans la somptueuse maison cannoise de Stéphane Alzraa, soupçonné d'avoir fait fortune dans la fraude à la taxe carbone, avec mise à disposition de masseuses et de voitures de luxe: Rolls et Ferrari."Je ne cache pas que j'ai été séduit par le mode de vie qu'il affichait", a concédé Neyret. "Il savait que j'aimais la vitesse".Il y a aussi les cadeaux, vêtements, bouteilles de vin et surtout deux montres de luxe.Michel Neyret a reçu une montre "Pacha" de Cartier estimée à 30.000 euros, de la part de Gilles Benichou, en remerciement, selon ce dernier, de sa participation au film "Le gang des Lyonnais" d'Olivier Marchal où Neyret était conseiller et où l'indic a fait une figuration."C'est beaucoup pour une figuration", s'étonne le président. "Je vous accorde que c'était démesuré, mais pour lui c'était un rêve d'enfant", justifie l'ex-flic.
L'autre montre, une Chopart évaluée à 4.500 euros, lui a été offerte "pour un anniversaire" par le frère de Gilles, Albert Benichou. Problème: le bijou avait
été volé dans le coffre familial. Neyret est également soupçonné d'avoir reçu de l'argent liquide mais il ne reconnaît que le versement de 1.000 euros de Gilles Benichou, toujours pour "un anniversaire".
Des témoignages lus à l'audience décrivent un policier flambeur claquant des liasses de billets pour du champagne en boîte de nuit. "Avoir des billets de 500 dans sa poche, il adorait", a lâché son épouse."Je n'ai jamais touché le moindre centime de Benichou", a juré Neyret.S'il dépense largement en argent liquide, comment se fait-il que les enquêteurs aient constaté "des retraits d'espèces en très nette diminution" sur son compte bancaire en 2011 par rapport aux années précédentes? Neyret explique avoir touché du liquide en gagnant au casino.
Dernier sujet d'interrogation, la création en Suisse par Benichou et Nicole Neyret d'une société panaméenne dotée d'un compte à Dubaï qui, selon le dossier bancaire, était censée recevoir des commissions... "pour remercier l'ex-commissaire de ses services", avait assuré Benichou.
"Généralement, on paye un indic pour des informations. Mais dans cette histoire,c'est lui qui est de sa poche", s'est étonné le président."Je ne peux pas dire le contraire. Ma relation avec Benichou a entraîné une amitié qui a entraîné des cadeaux. J'ai été d'une imprudence totale à ce sujet", concède
l'ancien flic.
Le compte rendu d'audience de Paul Satis :