La SNCF réclame 1,1 million d’euros au village de Couville, dans la Manche, pour des travaux de rénovation d'un ouvrage supportant une voie ferrée. Une charge que la mairie conteste fermement.
Le village de Couville (Manche) sera peut-être bientôt soulagé d'une épineuse affaire. Depuis 2021, la SNCF réclame 1,1 million d'euros à cette commune de 1 250 habitants située à 10 kilomètres au sud de Cherbourg-en-Cotentin. Jeudi 19 décembre, le rapporteur public a préconisé le rejet de cette demande de la société ferroviaire devant le tribunal administratif de Nantes (Loire-Atlantique). Le verdict sera rendu en janvier.
La SNCF demande cette somme pour le remboursement des travaux qu'elle a menés entre 2017 et 2018 à Couville pour la rénovation d'un aqueduc supportant une portion de voie ferrée reliant Paris à Cherbourg. L'aqueduc du Trotte-Bœuf, au nord du village, permet au ruisseau éponyme de passer sous les rails qui traversent Couville.
La responsabilité de l’entretien en question
Selon SNCF Réseau, qui a constaté un affaissement de l'aqueduc dès 2011, la réparation du tunnel qui permet de faire passer l'eau à travers un remblai en terre soutenant les rails, devait être à la charge de la municipalité. Selon l'entreprise, il appartient à la commune de le maintenir en état au titre de l'entretien du cours d'eau. Mais d'après la mairie de Couville, au contraire, la canalisation est indissociable de la structure de l'aqueduc, qui appartient au domaine ferroviaire et doit donc être réparé par la SNCF.
"Elle ne sert pas à la commune, elle ne sert pas aux agriculteurs, elle ne sert pas aux habitants. Elle ne sert qu'à la SNCF pour faire passer ses trains et pourtant on nous demande de payer", s'agace Sédrick Gourdin, le maire depuis 2020. "Si demain SNCF Réseau décide de contourner la commune et de ne plus passer par Couville, cette buse-là ne servira absolument à personne". Les Couvillais ne bénéficient pas non plus directement de l'usage des rails puisque le village ne possède pas de gare.
En novembre 2023, la justice administrative avait donné raison à la mairie en rejetant la demande de remboursement en première instance, mais la SNCF avait fait appel. "La SNCF ne lâchera rien. Le but est de ne pas faire de future jurisprudence, si la SNCF était condamnée et que ça arrive dans une autre commune", estime Sédrick Gourdin.
Une facture qui dépasse le budget communal
La somme réclamée par la société ferroviaire dépasse le budget annuel de la municipalité de Couville, qui s'élève à 820 000 euros. "Ce serait un endettement de 25 ans de la commune, c'est irréel. Une somme pareille, une petite commune ne pourra jamais payer ça", avance l'élu. À cause de cette épée de Damoclès, le maire doit réduire ses investissements depuis plusieurs années. "Cette somme, si la commune était amenée à la payer, empêcherait toute construction pendant quelques années. Aucune banque ne suivra une commune qui a une dette de 1,1 million d'euros".
Dans le village, ce litige qui dure depuis des années agace. "La commune de Couville ne peut pas engendrer ces frais et si ça impacte l'école, d'autres projets, c'est complètement fou", lance une habitante.