Pédophilie : Bruno, cousin et victime du père Ribes, raconte son calvaire

Depuis plusieurs jours, des témoignages accusent le père Louis Ribes, mort en 1994, d’agressions sexuelles sur mineurs. Bruno est l’une des victimes… Il est aussi le petit cousin du prêtre.

Deux jours après la réunion publique organisée par l’évêque de Saint Etienne, le village de Grammond est encore sous le choc des révélations…
Devant un parterre d’une centaine de riverains, les unes après les autres, les victimes se sont levées pour témoigner d'abus sexuels perpétrés par le père Ribes dans les années 70-90.. Face au nombre, même les plus sceptiques n’ont pu qu’admettre les faits, eux qui, comme tous à l’époque, vénéraient cet artiste prêtre charismatique.

Ce jeudi 20 janvier, le brouillard recouvre Grammond. Dans les cuisines autour d’un verre, au hasard des visites, les habitants se retrouvent et toutes les conversations tournent autour de cette affaire. C’est dans l’une de ces maisons autrefois paisibles que nous retrouvons Bruno. Ce père de famille de 48 ans est bouleversé. Jamais il n’avait parlé, jamais il n’avait avoué à sa «petite femme» ce lourd secret enfoui au plus profond de lui «pour pouvoir continuer à vivre et construire une famille tout de même».

L'effacer de la famille

Bruno nous confie son calvaire mais ses priorités sont aujourd’hui très concrètes : démonter l’œuvre du père Ribes qui orne le choeur de l’église du village, «comme une insulte à toutes les victimes» et enlever la dépouille et l’inscription du prêtre gravée sur le caveau familial du cimetière communal : «j’ai une tante, ma marraine, qui était religieuse et qui est enterrée-là. Je ne me vois plus aller me recueillir sur sa tombe maintenant».
Son oncle, cousin germain de Louis Ribes est le propriétaire de la concession. Ensemble, ils vont tout faire pour transférer le cercueil dans un autre cimetière réservé aux prêtres et effacer la moindre trace sur la pierre tombale.

Les oeuvres du père ont été déposées

Les tableaux de l’église, eux, ont été enlevés dans l’après-midi même avec l’aide du maire et d’un employé communal, dans un geste libérateur. L’artiste n’existe plus non plus.

Je ne me rendais pas compte

Bruno

Bruno est un enfant du village. C’est un petit bonhomme de 10 ans quand il perd sa mère en 1983. L’année suivante, alors que le père Ribes, lui aussi originaire de Grammond, vit et enseigne au séminaire de Vienne, il y est envoyé avec deux camarades par son père pendant les vacances. A l’époque le père Ribes est âgé et malade. Il fait croire aux habitants du village qu’il a besoin de l’aide de ces enfants. Les villageois ne se méfient pas. D’autant que sur place, il y a tout pour appâter les jeunes. «C’est vrai que quand on arrivait là-bas, c’était des vacances. Nous, on avait une télévision avec trois chaînes et là-bas il y avait tout ce qui fallait pour regarder la télé, des films, des cassettes-vidéo comme jamais j’ai vu… Un synthétiseur, de la musique, il y avait tout. Sauf qu’il n’y avait pas que ça… Il nous faisait poser, il nous le proposait, mais il savait tellement bien le proposer qu’on ne le refusait pas. On posait nus, et il nous faisait mettre dans des positions pas toujours très délicates…»

Il me disait que c’était le cadeau du ciel

A 11 ans on ne comprend pas ce qui se passe… «Non, on ne comprend pas et puis il savait tellement bien tourner les choses. Il me disait que c’était le cadeau du ciel, ma mère était décédée, c’était une compensation, un geste de l’église. Après il nous attirait sur ces genoux, il nous faisait voir son œuvre, et puis après de temps en temps il fallait aller jusqu’à son lit…».
Des choses que Bruno pensait avoir oubliées et qui resurgissent, des choses que Bruno a vécues sans en réaliser la gravité : «Moi, vu que j’y allais avec d’autres, je me disais il n’y a pas que moi, les autres faisaient pareil finalement. Quand on est enfant on ne se rend pas compte».

Les vacances se sont succédées puis le prêtre est décédé en 1994. Depuis Bruno a construit sa vie et sa famille dans le silence et l’oubli. «A part ceux qui étaient avec moi, personne ne savait».

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