Antoine Sibuet veut rentrer en France avec ses deux enfants, emmenés par leur mère dans son pays d'origine, le Kazakhstan. Cet habitant de l'agglomération roannaise s'est envolé pour Almaty le 7 novembre dernier. Il a vu ses enfants et une audience devant la justice kazakhe était prévue ce mercredi 15 novembre, à midi heure locale (7h, heure de Paris). L'audience a été renvoyée à une date ultérieure, indique Antoine Sibuet, sans plus de précisions.
Ses deux enfants vont-ils pouvoir monter dans l'avion et rentrer en France avec leur père ce jeudi 16 novembre ? Antoine Sibuet l'espère, c'est la raison pour laquelle il a fait le déplacement jusqu'à Almaty, au Kazakhstan. Originaire de la Loire, le père de famille espère obtenir gain de cause auprès des autorités kazakhes et pouvoir revenir à Roanne avec ses enfants. Un retour suspendu à un laissez-passer délivré par les autorités consulaires françaises au Kazakhstan et à une audience devant la justice de cette République d'Asie Centrale.
Des retrouvailles
Depuis plus de quatre mois, il n'avait pas vu son petit garçon Aristide et sa grande sœur Elsa. Il a pu enfin les serrer dans ses bras cette semaine. La directrice de l'école dans laquelle sont scolarisés les deux enfants d'Antoine Sibuet leur a même permis de partager un déjeuner ensemble. Un moment d'intimité familiale. "Les enfants vont bien. J’ai pu revoir les deux petits seulement à l’école," confie le papa, contacté ce mardi 14 novembre, à Almaty.
Les retrouvailles ont été un peu compliquées au début car la mère souhaite rompre le lien père - enfants. Mais après quelques minutes, les choses se sont arrangées et les enfants étaient vraiment heureux de me voir. Ils m’ont demandé de rentrer à la maison de papa.
Antoine Sibuet
"J'ai pu voir mes enfants ce midi et hier midi à l'école, grâce à une directrice formidable qui a compris la situation. Le seul moyen de les voir, c'était à l'école", ajoute le père, très ému. "Quand elle m'a vu, ma petite fille m'a demandé des cookies aux pépites de chocolat et une Barbie".
"Pour le grand, âgé de 17 ans, c’est plus compliqué, car il est sous l’emprise et la manipulation de sa mère et il refuse de me rencontrer", ajoute Antoine Sibuet.
"Nous ne reviendrons plus jamais en France"
Cet habitant du Coteau, près de Roanne, n'avait pas vu ses enfants depuis le 29 juin 2023. Antoine Sibuet avait peu de nouvelles et même plus de contact avec eux depuis le 23 juillet. Ce jour-là, il devait les récupérer pour les vacances d'été. Sa femme, avec laquelle il était en instance de divorce, a quitté le domicile familial de Roanne sans prévenir. Un départ avec Emilserda, âgé alors de 17 ans, et les deux enfants biologiques du couple, Elsa, 4 ans, et Aristide, seulement 3 ans.
La mère et ses trois enfants ont pris la direction d'Almaty, capitale économique du Kazakhstan, son pays d'origine. Seule explication, un message laconique en anglais envoyé par téléphone. 'Nous ne reviendrons plus jamais en France. Les enfants sont inscrits à l'école ici au Kazakhstan. Ce n'est pas la peine de porter plainte, nous ne reviendrons pas en France," avait-elle écrit dans un texto. En septembre, l'aîné devait entrer en Terminale, le plus jeune devait faire sa première rentrée des classes. Le couple, en instance de divorce, était déjà séparé, mais des modalités de garde partagée avaient déjà été mises en place par un juge pour enfant.
Partis sans prévenir... Le père se démène
Ce jour de juillet, le père a trouvé les volets fermés et les placards vidés. Il réalise alors immédiatement que l'absence de sa famille n'est pas temporaire. "Si vous partez en vacances, vous ne videz pas vos placards et vous ne coupez pas vos abonnements de fourniture d'énergie. Là, on se dit qu'ils sont vraiment partis pour toujours", avait déclaré Antoine Sibuet en constatant la disparition de ses enfants. Le père de famille n'a pas compris ce départ soudain et inattendu. "Je ne sais pas ce qui lui est passé par la tête à ce moment-là, parce que l'été dernier, elle était partie tout le mois de juillet en vacances au Kazakhstan. Et elle était revenue. Je ne m'attendais pas du tout à un départ comme ça."
Après cette subite fuite à l'étranger, le père a porté plainte au commissariat de Roanne. Le 8 août, le procureur de la République, Abdelkrim Grini, avait ouvert une information judiciaire confiée à une juge d'instruction pour "soustraction d'enfants par ascendant hors du territoire national", afin qu'une enquête judiciaire puisse se dérouler dans le cadre d'une commission rogatoire internationale.
De son côté, le père se démène comme un beau diable depuis cet été : Antoine Sibuet multiplie les courriers, jusqu'au sommet de l'État. Le cabinet de la Première ministre Élisabeth Borne a indiqué au père de famille que sa situation a été "signalée à Madame Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères". Antoine Sibuet, qui a frappé à la porte des élus locaux, s'est également rendu à l'Assemblée nationale pour rencontrer le député de sa circonscription, Antoine Vermorel-Marques. Enfin, il a même engagé une procédure au Kazakhstan et s'est adjoint les services d'un avocat d'Almaty. Une procédure destinée à demander l'application de la Convention de La Haye. Notamment pour les deux enfants mineurs. "L'aîné sera majeur en mai. Il ne peut donc plus faire partie d’une demande de la Convention de la Haye," précise Antoine Sibuet.
"Pas d'obstacle" du côté législation de la kazakhe ?
Ses deux enfants, Elsa et Aristide, sont nés en France. Ils ont quitté le territoire sans l'autorisation de leur père, emmenés au-delà des frontières européennes par leur mère. "On se rend compte que c'est facile pour un parent de s'enfuir avec ses enfants, sans forcément informer l'autre", déplore le père de famille qui a créé une association baptisée "Stop enlèvement parental". Depuis une semaine, le Roannais se trouve donc au Kazakhstan pour tenter de les faire revenir en France.
Pourra-t-il récupérer ses deux enfants mineurs et les ramener en toute légalité en France ? Une audience de la justice kazakhe doit se tenir ce mercredi 15 novembre.
L’audience du 15 novembre vise à demander l’application de la Convention de la Haye pour le retour des enfants en France.
Antoine Sibuet
Il n'existe "pas d'obstacle juridique" à la sortie du territoire de ses deux enfants mineurs, "citoyens de France", indique M.Erdzhanov, l'avocat du barreau d'Alamaty consulté par le père français. "Je vous confirme également que vous n'avez pas besoin du consentement ou de l'autorisation d'un tiers, y compris de l'autre parent ou d'une autorité gouvernementale, pour faire sortir les enfants du Kazakhstan", écrit la même source dans un courrier traduit et daté du 2 novembre que nous avons pu consulter.
Le risque : que demain à l'audience, le juge accorde la garde des enfants à la mère et que je ne puisse pas les ramener en France.
Antoine Sibuet
Mais dans les faits, la situation du père de famille n'est pas si simple. "Tant qu'une décision de justice n'est pas prononcée au Kazakhstan, le père et la mère ont les mêmes droits dans le pays. Mais si lors de l'audience de demain, le juge décide de confier la garde des enfants à leur mère, ce ne sera plus légal de les faire sortir du pays", précise Antoine Sibuet. C'est un compte à rebours qui a commencé et qui repose à présent sur une décision venue de Paris.
Laissez-passer : ça bloque ?
Si du côté de la législation kazakhe, rien ne semble faire obstacle, selon son conseil à Almaty, il n'en irait pas de même du côté des autorités consulaires françaises. Antoine Sibuet a un vol retour réservé pour le jeudi 16 novembre. Il espère reprendre l'avion pour Lyon Saint-Exupéry avec les enfants.
À ce jour, le retour en France d'Elsa et Aristide semble suspendu à un document délivré par les autorités françaises. En effet, pas de sortie de la République d'Asie centrale sans un laissez-passer en bonne et due forme délivrée par le Consul de France à Almaty. Pour la fillette, la situation est d'autant plus compliquée que son passeport a expiré, comme le confirme son père.
Pour ce laissez-passer, le Consul de France, sensible à sa situation, a rendu un avis favorable à la délivrance du document pour les deux enfants. Reste que le feu vert de Paris tarde à venir, au grand dam du Ligérien, qui n'a pas hésité à faire appel à son député pour faire avancer la situation.
Le temps presse
"Le Consul de France à Almaty est tout à fait d'accord pour les laissez-passer, c’est sa hiérarchie à Paris qui bloque pour le moment", résume le père de famille depuis la ville kazakhe.
Les autorités françaises auraient, dans un premier temps, avancé un argument : la nécessité de l'accord des deux parents. Or la mère est " la personne qui a enlevé les enfants", s'était ému Antoine Sibuet dans un message adressé à un responsable du Quai d'Orsay. Incompréhensible pour le Ligérien, d'autant que ses deux jeunes enfants sont nés sur le sol français et que sa fille ne dispose même pas d'un titre pour séjourner dans le pays de sa mère. "Ma fille est aujourd’hui sans papiers ni visa ici au Kazakhstan", confirme le papa d'Elsa.
"Le Consul de France à Almaty a tenté d'entrer en contact avec mon épouse, mais il s'est heurté à un mur", confie le Ligérien. La position du Quai d'Orsay semble avoir quelque peu évolué depuis ces dernières heures, mais le temps presse pour le papa et ses enfants. L'audience devant la justice kazakhe a lieu à la mi-journée ce mercredi. Une décision de justice en faveur de la mère pourrait mettre un terme à la sortie des enfants du territoire et la rendre illégale. Ce soir, Antoine Sibuet, même s'il se prépare peut-être à rester sur place plus longtemps que prévu, n'a qu'une hâte : recevoir le précieux laissez-passer et prendre le premier vol pour la France avec Elsa et Aristide. Cette affaire de divorce pourra alors revenir et "être réglée" devant la justice française, comme l'espère Antoine Sibuet.
Ce mercredi matin, c'est la douche froide. L'audience prévue ce jour a été renvoyée à une date ultérieure, indique Antoine Sibuet, sans plus de précisions. Ce dernier pourrait rentrer en France dès jeudi.