Profession, directrice de prison : Célia Pouget ouvre, un peu, les portes de son quotidien derrière les murs à Roanne

Une femme "formidable", directrice du centre pénitentiaire à Roanne (Loire) se livre sur sa profession. Entre gestion du personnel, de l'établissement et des personnes détenues, Célia Pouget trouve un équilibre entre sécurité et social. Découverte inédite sur le plateau de "Vous êtes formidables".

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A Millau, dans l’Aveyron, où est née Célia Pouget, il existe un beffroi et une tour carrée qui servait autrefois de prison. Elle ne l'a pas oublié. Mais en réalité, ce n’est pas la raison pour laquelle elle exerce sa profession aujourd’hui.

Directrice du centre de détention de Roanne depuis plus de deux ans, Célia Pouget a adopté ce métier presque par hasard. « C’est au détour d’une formation que j’ai découvert le concours et l’administration pénitentiaire. Ce n’était donc pas une vocation » avoue-t-elle. « Auparavant, j’ai fait une première carrière comme assistante sociale, et j’ai toujours été attirée par l’humain en général. »

Au moment de s’interroger sur son avenir, et la suite de sa carrière, elle a utilisé un congé-formation. « Je n’ai pas quitté mon métier précédent parce que je ne l’aimais plus. Mais je ne projetais pas forcément 40 ans dans cet univers » précise Célia. Il n’empêche que sa fibre sociale a été utile. « Par rapport à la connaissance du public, des personnes incarcérées, sans doute. »

Aujourd'hui, avec cette expérience, elle conseillerait plutôt aux détenus de « tenter de mettre à profit le temps passé en prison. Ce qui est difficile pour ces personnes, c’est de se projeter, avec parfois des dates de libération très lointaines. Je crois qu’il faut utiliser le temps dès le début, soit pour préparer la suite, soit pour découvrir des activités, des actions culturelles…»

De Marseille à Roanne, en passant par Angers

Direction Marseille. Après son concours, Célia Pouget devient directrice adjointe des célèbres « Beaumettes ». Une profession de cadre pénitentiaire que l’on imagine essentiellement masculin. A tort.

Il y a, en fait, davantage de candidates que l’inverse, en France. « Oui, mais c’est le cas dans à peu près tous les concours de la haute fonction publique » rectifie-t-elle. « On raconte que les femmes seraient un peu plus rigoureuses sur les exigences des concours. C’est en tout cas la légende…» sourit  Célia.

Pas spécialement militante féministe, elle opte pour un équilibre. « Moi je dirais plutôt que l’important, c’est que les deux soient représentés. La société est faite d’hommes et de femmes. Et, pour gérer les prisons, il faut aussi les deux, pour varier les références. »

Autre changement, direction Angers. A nouveau, Célia y exerce le rôle de directrice-adjointe. Installée sur place, elle y découvre un lien… personnel. « La maison d’arrêt d’Angers date de 1856. En prenant mes fonctions dans ces lieux, j’ai appris que le grand frère de mon grand-père y avait été incarcéré pendant la seconde guerre mondiale, en tant que résistant. J’ai même retrouvé des récits de son incarcération, où il décrit des lieux conformes à ce que je découvrais plusieurs décennies plus tard. »

Au-delà l’anecdote personnelle, notre interlocutrice y voit un signe fédérateur. « C’est révélateur de l’administration pénitentiaire, qui reconnaît aussi son histoire et qui l’assume. On peut voir une plaque sur la porte d’entrée qui évoque cette période... Et puis... C’est l’occasion, aussi, de travailler sur cette période-là avec les personnes qui y sont incarcérées aujourd’hui » résume-t-elle.

Je pense qu’il faut être adaptable et dynamique

Depuis plus de deux années, elle est donc directrice de l’établissement basé à Roanne. Ses missions sont très diverses : « C’est à la fois la gestion de la structure, l’immobilier, le budget, les ressources humaines. Mais aussi la gestion des personnes détenues, tant sur le volet sécurité que la préparation à la sortie et la réinsertion » énumère-t-elle. « Je dirais que mon métier, c’est aussi trouver un équilibre avec tout cela, dans un univers qui est clos. »

Gérer l’enfermement donc... mais aussi préparer la liberté. La réinsertion fait grandement partie de ses objectifs, avec l’aide d’un service dédié spécialisé. Pour accomplir toutes ces tâches, il faut nécessairement, comme Célia Pouget, rassembler plusieurs qualités. « Je pense qu’il faut surtout être adaptable et dynamique » répond-t-elle. « Ces deux qualités guident le quotidien. »

Avec, parmi d'autres exigences, la mission d’aider à mieux amortir la surpopulation carcérale. « Effectivement, il y a, en France, des maisons d’arrêt qui sont perfois surencombrées. Donc, dès que l’on a des places libres dans les centres de détention comme celui que je gère à Roanne, l’idée est d’essayer de les soulager. »

Connaître et maîtriser la violence 

Roanne est une « prison mixte », qui comprend 600 places, dont 90 pour les femmes. Notre directrice y dirige 250 personnes, dont de nombreux surveillants. Un métier « de maton » qui a bien changé. « Il implique à la fois la sécurité, mais aussi le contact et la vie quotidienne avec les personnes détenues. Il faut donc savoir être à l’écoute, avoir des qualités de communication et humaines. Ce qui rend le concours difficile. C’est un métier que l’on connaît mal, contrairement à celui de policier ou de pompier » reconnaît notre interlocutrice.

Un quotidien rendu difficile par la hausse de la violence dans la société. « Ce n’est pas toujours facile. On a là un public contraint, qui est chez nous après avoir enfreint la loi. Logiquement, certains travers se reproduisent aussi dans les prisons. On doit veiller à les limiter, faute de l’éradiquer. Il faut limiter cette violence, la connaître et la maitriser ».

Des détenus formidables

Pour Célia, l’approche sociale de la détention ne change pas ce que l’on doit faire, mais la manière de s’y prendre. « Il faut aborder les problèmes avec ce que l’on est, et ce que l’on est capable d’apporter. C’est valable pour tous les maillons de la chaîne pénitentiaire. »

Une vrai positivité, sans doute indispensable, lorsque l’on passe toutes ses journées… en prison. Finalement, le personnel, lui-aussi, est un peu enfermé. « C’est au moment où cela peut commencer à avoir un impact, qu'il faut réagir, et peut-être changer de poste. Notre administration permet d’être un peu aussi hors des murs, quand cela devient nécessaire ».

N’empêche, elle garde toujours une fenêtre ouverte sur l’avenir de ses « pensionnaires » si particuliers. Pour la directrice du centre de détention de Roanne, il existe aussi des détenus formidables. « Bien sûr ! Comme c’est le cas dans toute communauté ! » sourit-elle.

Et vous, que pensez-vous des prisons en France ?

Voir ou revoir Vous êtes formidables avec Célia Pouget

 

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