Cinq régions du Sud-Est de la France se sont unies pour un "plan d'adaptation au changement climatique" présenté à Lyon, par le préfet de Rhône-Alpes. Les montagnes du Nord des Alpes sont aujourd'hui tout aussi vulnérables que les villes.
Les Alpes ont perdu un mois d'enneigement. Un litre d'eau sur deux en agriculture est gaspillé. Les villes trop bétonnées empêchent les nappes de se remplir... pour la première fois, un plan couvrant la zone Rhône-Méditerranée entend modifier les pratiques face à l"'urgence" de la situation hydrique.
"Il fait aujourd'hui à Lyon le climat d'Avignon il y a 30 ans, il y a une crise à venir de l'eau qui est une évidence", souligne le préfet du Rhône et de la région Rhône-Alpes, Jean-François Carenco, également préfet coordonnateur du bassin Rhône-Méditerranée.
Il a présenté, jeudi 5 juin, un "plan d'adaptation au changement climatique", une "première en France" puisqu'il réunit cinq régions (Franche-Comté, Bourgogne, Rhône-Alpes, Languedoc-Roussillon et PACA), ainsi que le comité de bassin Rhône-Méditerranée.
Le but: changer les pratiques via le futur schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux, (Sdage) pour la période 2016-2021, qui permettra d'agir localement, en fonction des spécificités (montagne, plaines, zones agricoles ou urbaines), des zones fragilisées par le changement climatique et les pressions urbaines.
La montagne très vulnérable
Contre toute attente, en réalisant des "cartes des vulnérabilités" du bassin rhodanien et méditerranéen, les experts ont noté que la montagne n'était pas épargnée par la pénurie en eau du fait d'un moindre enneigement."Si la fonte des neige baisse, on aura une baisse de 30% du débit du Rhône l'été d'ici 2050. Les Alpes sont une zone de grande vulnérabilité, on a déjà perdu un mois d'enneigement dans la montagne", a relevé Martin Guespereau, directeur général de l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée et Corse.
"La moyenne montagne a un sérieux souci à se faire avec la disparition des neiges de printemps d'ici à 30 ans", a confirmé Jean-François Carenco, pour qui les stations de ski concernées doivent songer à diversifier leurs activités.
Michel Dantin, président du comité de bassin Rhône-Méditerranée, évoque lui "une zone noire centrée sur Genève, le nord des Alpes et le sud du Massif Central, où il y a le plus de déficit hydrique". "Il faut apprendre tous ensemble à économiser l'eau et prendre des mesures pour prévenir", a-t-il alerté.
Faire revenir l'eau en ville
Alors que 40% des territoires de Rhône-Méditerranée souffrent désormais de pénurie chronique en eau, le plan présenté jeudi suggère notamment de laisser l'eau revenir en ville, par des systèmes de rigoles ou de bassins."L'urbanisation de nos villes continue à imperméabiliser les sols", avec paradoxalement des risques d'inondations encore plus violentes puisque l'eau ne peut pas retourner dans la terre, ont relevé MM. Dantin et Guespereau. "On a des parkings en zone urbaine qui pourraient avoir des fossés en bout pour laisser l'eau s'infiltrer", et ainsi approvisionner les nappes phréatiques directement et, par ricochet, refroidir les zones urbaines, suggèrent-ils.
"C'est la première fois qu'on ose l'idée de désimperméabiliser nos villes!", relève M. Carenco.
Des haies et du goutte-à-goutte
Il s'agit aussi de restaurer les rivières et les zones humides, créer des berges boisées, pour lutter contre la chaleur. "Pour rafraichir les cours d'eau, il n'y a que les arbres", indiquent les responsables du plan, d'autant que les centrales nucléaires disséminées le long de la vallée du Rhône rejettent des eaux à 26°C.En agriculture, très consommatrice d'eau, le plan invite aussi à appliquer le goutte à goutte plutôt que d'arroser massivement et à réhabiliter les haies pour retenir l'humidité et faire revenir la biodiversité.